VALORISATION DU LAIT
Coûts de production maîtrisés et travail sur la qualité

A Hauterives, le Gaec de la Fayardaie réunit depuis 2020 trois jeunes associés. L’exploitation produit plus d’un million de litres de lait en IGP Saint-Marcellin. 

Coûts de production maîtrisés et travail sur la qualité
Eric Fayan, Cédric Fayan et Valentin Balaye, les trois associés du Gaec de la Fayardaie à Hauterives. © E.Fayan

Avec son troupeau de 110 vaches laitières et une production de 1,1 million de litres de lait sur la dernière campagne, le Gaec de la Fayardaie à Hauterives fait partie des plus gros cheptels de la Drôme. Il se classe même parmi les 15 % d’exploitations laitières françaises détenant plus de cent vaches (chiffre Institut de l’élevage - 2019). A sa tête depuis 2020, trois associés : Valentin Balaye (32 ans), Cédric Fayan (33 ans) et Eric Fayan (40 ans), tous cousins. Eric est entré dans le Gaec en 2006, Cédric en 2009. Mais l’histoire du Gaec a commencée dès 1986 avec deux frères, Pierre le père d’Eric et Alphonse Fayan, et un troupeau d’une trentaine de vaches. Au fil des années, le Gaec a vu passer neuf associés, toujours dans un cadre familial. Sa configuration a évolué jusqu’à compter quatre associés de 2011 à 2020.

De quatre à trois associés 

« En 2020, suite à un départ en retraite, Valentin est entré dans le Gaec et le quatrième associé [proche de la retraite, ndlr] est passé salarié de l’exploitation. A ce moment là, nous n’avions pas de candidat pour le remplacer. Nous avons donc fait le choix de rester trois », expliquent Eric et Cédric Fayan. Un choix qui s’est accompagné d’investissements pour assurer, avec un associé de moins, la gestion du troupeau tout en se libérant du temps pour la vie personnelle. « Nous avons amélioré le confort de travail en salle de traite [2 x 9 postes, traite par l’arrière, ndlr] avec des systèmes automatisés pour le trempage des trayons et la désinfection des griffes. L’objectif est de pouvoir traire seul. Nous avons aussi modifié la nurserie et le logement des génisses pour faciliter le travail et pour le bien-être animal. Enfin, nous avons investi dans un logiciel complet pour la gestion du troupeau », commentent les associés. Coût total de ces améliorations : 350 000 euros (138 000 pour la salle de traite et 212 000 pour la nurserie), subventionnés en partie dans le cadre du plan de compétitivité et d’amélioration des exploitations agricoles (PCAE).

420 euros en moyenne les 1000 litres 

Si l’exploitation est parvenue au fil des années à investir et rémunérer ses associés, c’est grâce à la maitrise des coûts de production, plus particulièrement les coûts de ration. Depuis 2016, la valorisation du lait en IGP* Saint-Marcellin a également apporté une bouffée d’oxygène. Le Gaec de la Fayardaie fait partie des élevages du Nord-Drôme adhérents Sodiaal dont le lait est livré à la fromagerie de Vinay (38) dans le cadre d’un accord avec Eurial. « Sur les douze derniers mois, notre lait a été payé en moyenne 420 euros les 1 000 litres », détaillent Cédric et Eric Fayan. Le prix de base s’établit à 358 euros et inclut une valorisation de 20 euros pour le Saint-Marcellin. « Cette valorisation et notre travail sur la qualité (50 à 70 euros en plus du prix de base) nous permettent d’atteindre l’équilibre économique », précisent les éleveurs.

Mais qui dit valorisation dit aussi contraintes. « En entrant dans l’IGP, le cahier des charges nous a obligés à des adaptations car certaines de nos parcelles sont hors de la zone IGP et ne sont pas prises en compte dans le calcul de l’autonomie alimentaire », poursuivent-ils. Pour rappel, le cahier des charges de l’IGP prévoit que l’alimentation principale est composée de fourrages locaux à 80 % et plus particulièrement d’herbe (au moins 50 %). Les animaux sont tenus de pâturer au moins 180 jours par an. 

Un équilibre régulièrement remis en question

Malgré de bons résultats techniques, préserver l’équilibre économique devient de plus en plus compliqué. « Les charges grimpent en flèche depuis six mois que ce soit l’alimentation, le matériel, la main-d’œuvre pour les réparations, les engrais... L’urée par exemple est passée de 340 à 805 euros la tonne, nous en consommons 28 tonnes en moyenne par an », souligne Valentin Balaye. Depuis l’installation de ce dernier et en passant de quatre à trois associés, la rémunération de chacun a été augmentée. « Il fallait que Valentin puisse à la fois rembourser ses parts sociales et vivre, souligne Eric Fayan. C’est d’ailleurs l’un des freins à la transmission des exploitations laitières. On voit de grosses structures arrêter, mettant en péril des collectes, parce que les successions sont trop compliquées et, il faut le reconnaître, parce que les éleveurs n’en peuvent plus des pressions administratives. » Autre problématique à laquelle pourrait être confronté le Gaec, comme d’autres exploitations : l’avenir de son foncier. De nombreux propriétaires souhaitent vendre leurs terres. «  Mais les terrains sont hors de prix et nous n’aurons pas la capacité financière d’acheter », confient les associés.

« Les mentalités ont évolué »

Face à ces obstacles, l’avenir de nombreuses fermes laitières pourraient se jouer dans les prochaines années. D’autant qu’un autre paramètre sera à prendre en compte : celui du temps de travail. « Sur ce sujet, les mentalités ont évolué, estime Eric Fayan. Quand je me suis installé, on travaillait tous les week-end, il fallait y aller à tout prix. Aujourd’hui, nos enfants nous reprochent de trop travailler, témoigne-t-il. L’outil de travail dont nous disposons, c’est grâce à nos anciens qui ont trimé sans relâche. Mais ceux qui restent ou s’installeront demain vont vouloir se dégager du temps ». Pour y parvenir, pas de miracle : le prix du lait devra couvrir les coûts de production, la rémunération des associés mais aussi les investissements nécessaires à l’amélioration des conditions de travail. 

Sophie Sabot

* IGP : indication géographique protégée.

D'autres reportages sur des exploitations bovins lait en Drôme :

- EARL de Grimolle à Comps.

- Gaec de l'Echarasson à Saint-Julien-Vercors.

Le confort de travail en salle de traite (2 x 9 postes, traite par l’arrière) a été amélioré grâce à des systèmes automatisés pour le trempage des trayons et la désinfection des griffes. ©AD26-S.S.

Carte d’identité Gaec de la Fayardaie

- Trois associés : Eric Fayan, Cédric Fayan, Valentin Balaye.

- 110 vaches laitières (3/4 race prim’holstein, 1/4 montbéliarde).

- 30 % du troupeau en IA semences sexées.

- 1,1 million de litres produits sur la dernière campagne en IGP Saint-Marcellin.

- Adhérent à la coopérative Sodiaal, lait collecté pour la fromagerie de Vinay (38) dans le cadre d’un accord avec Eurial.

- 214 ha de SAU : 60 de maïs, 56 de céréales, 65 de prairies permanentes, 32 de prairies temporaires.

- Autonomie alimentaire atteinte à plus de 80 %.

Parole d’éleveur 

« L’IGP Saint-Marcellin a permis une meilleure valorisation de notre lait et offre une certaine sécurité sur l’avenir même s’il faut rester prudent. Dégager un revenu, pouvoir investir, progresser, améliorer ses conditions de travail et aussi participer à la production d’un produit local identifié, c’est ça qui donne envie de continuer son métier », confie Eric Fayan, éleveur à Hauterives.