Salon de l’herbe : les visiteurs en quête d’autonomie alimentaire

Au cœur des démonstrations de matériels, les concessionnaires n'ont pas eu besoin de préciser que leurs matériels s'adaptaient aux pires conditions. Les spectateurs, recroquevillés sous leurs parapluies en avaient la preuve sur place. Car cette nouvelle édition du Salon de l'herbe et des fourrages dans l'Allier fait hommage aux précédentes en étant humide et froide. Pour autant les conditions franchement exécrables n'ont pas découragé les milliers de visiteurs venus les 1er et 2 juin dernier à Villefranche-d'Allier.
Cultures intermédiaires riches en protéines
Au gré du parcours, les professionnels rivalisent d'imagination dans leur mise en scène afin de retenir le visiteur et engager la conversation. Les semenciers présentent leurs gammes et tentent de répondre aux attentes : « On observe que les éleveurs veulent aller de plus en plus vers l'autonomie fourragère à la fois qualitative et quantitative, explique Robert Laurent, responsable de la zone sud chez Eliard SPCP. Ils ont envie de travailler sur des cultures intermédiaires capables de leur amener des protéines. » Une orientation également perçue par Patrice Bonnin, président de la chambre d'agriculture de l'Allier, lors de son discours inaugural : « Il y a du monde sur les stands de machinisme oui, mais on voit aussi des éleveurs regarder, comparer et s'interroger sur les semences à implanter dans leurs prairies. Car, ils le savent, c'est en travaillant aussi de ce côté-là qu'ils seront plus performants ». Jean-François Perrin, responsable région sud chez Semences de France remarque « une préoccupation et des interrogations sur la nécessité de mettre des légumineuses, luzernes et trèfles en particulier, afin d'augmenter le niveau de protéines et ainsi gagner en autonomie. Les questions portent aussi sur le pourcentage de légumineuses dans les mélanges ». Sur ce point, impossible pour l'expert de donner une réponse toute faite « tant cela dépend du type de sol, d'exploitation et du mode d'élevage ».
Sentir les évolutions
Chez les concessionnaires, les derniers nés des marques s'offrent fièrement aux yeux des passionnées. Pour Gérard Danibert, directeur marketing et communication chez Kubota, ces deux jours de salon sont « le moment idéal pour échanger avec le consommateur final. Au fil des rencontres, nous essayons de sentir les évolutions du monde agricole pour faire, du même coup, évoluer nos machines ». Des évolutions qui sont déjà sur le marché dans une volonté « d'aller vers un machinisme plus adapté à un modèle économique changeant ». Même son de cloche chez Pöttinger par la voix de Mathieu Lallemand du service promotion des ventes : « On voit que les exploitants recherchent des machines simples à utiliser et à régler. Elle doit aussi venir compenser la baisse des effectifs pour des parcellaires de plus en plus vastes et de plus en plus éclatés ».
Marie Renaud
Des pistes pour équilibrer le menu et l’addition
A travers plus d’une dizaine de mini-conférences, un large éventail de questions a été abordé : de la récolte de foin multi-espèces à l’introduction de l’herbe enrubannée ou ensilée pour l’engraissement des jeunes bovins et des génisses, en passant par les couverts végétaux qui se pâturent, à la fertilisation, la rénovation et l'entretien des prairies... Dénominateur commun de tous ces exposés : la prise en compte systématique des notions d’autonomie fourragère et de raisonnement des coûts alimentaires.« C’est le souci premier des éleveurs. Ils souhaitent trouver la meilleure combinaison entre bons résultats techniques et optimisation de la ration », témoigne Daniel Lafaye (Institut de l’élevage et du réseau charolais).
Herbe pâturée versus herbe récoltée
Donner des conseils, sans toutefois tomber dans des recettes toutes faites adaptées pour les uns mais complètement décalées pour d’autres, c’était tout l’objet des quatre ateliers techniques mis en place dans le cadre du salon.
Le premier atelier a présenté les derniers résultats du réseau d’élevage charolais, avec analyse des commercialisations 2015, bilan des coûts d’alimentation et efficacité économique des élevages. Dans le second atelier, les travaux menés sur des agneaux et des brebis pour la valorisation des dérobées ont permis de mesurer l’intérêt d’une utilisation optimale des légumineuses dans la ration des ovins. Le troisième atelier est revenu en détail sur les différents outils à la disposition des agriculteurs pour prévoir et enregistrer leurs pratiques au quotidien (Boviclic, MesParcelles complétés par Diapro). Au-delà de la saisie des données, ces logiciels permettent d’établir un vrai diagnostic technico-économique. Enfin, la réduction des coûts d’alimentation par les fourrages a fait l’objet d’un quatrième atelier. Lorsqu’elle est bien gérée, l’herbe pâturée remporte le match économique face à l’herbe récoltée. Mais encore une fois, cette bonne gestion ne s’improvise pas.
Sophie Chatenet