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Énergie : trois nouveaux dispositifs pour accompagner les entreprises et les collectivités

Élisabeth Borne,Première ministre, a annoncé le 27 octobre une série de mesures pour accompagner les entreprises et collectivités face à la hausse des prix de l’énergie. 

Énergie : trois nouveaux dispositifs pour accompagner les entreprises et les collectivités
Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique, Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Élisabeth Borne, Première ministre, et Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des Territoires, ont présenté le nouveau dispositif gouvernemental pour faire face à la hausse des prix de l’énergie. ©DR

Alors que les prix sur les marchés du gaz et de l’électricité pour des livraisons en 2023 sont toujours à des prix près de dix fois supérieurs à ceux de 2020 (550 €/MWh en électricité, 160 €/MWh en gaz), la Première ministre, Élisabeth Borne, a annoncé des évolutions du dispositif de soutien de l’État aux entreprises, aux collectivités locales et aux associations. Pour couvrir les différentes situations en 2023, trois dispositifs sont mis en place :

Un amortisseur électricité

Pour les TPE qui ne bénéficient pas du bouclier tarifaire, les PME et toutes les collectivités publiques, l’État prendra en charge 50 % du surcoût au-delà d’un prix de référence de 325 euros par MWh. La prise en charge sera automatique, sans constitution de dossier. Les TPE de moins de 10 salariés, 2 millions d’euros de chiffre d’affaires et ayant un compteur électrique d’une puissance inférieure à 36 kVA sont éligibles au bouclier tarifaire des particuliers.

Des aides amplifiées et simplifiées

Concernant l’électricité, des aides sont ouvertes aux entreprises les plus consommatrices en énergie (au moins 3 % de leur chiffre d’affaires) et non couvertes par l’amortisseur électricité (ex : entreprises de taille intermédiaire et grandes entreprises industrielles). S’agissant du gaz, le guichet concernera toutes les entreprises, y compris les exploitations agricoles et les entreprises de l’agroalimentaire.

Filet de sécurité pour les collectivités

Pour les collectivités, un filet de sécurité s’ajoute à l’amortisseur électricité et couvrira aussi les surcoûts liés au prix du gaz.
L’ensemble de ces mesures représente un montant de près de 12 milliards d’euros. Le financement est assuré pour plus de 7 milliards d’euros par la récupération des marges exceptionnelles des énergéticiens ; 3 milliards d’euros sont déjà provisionnés pour les aides aux entreprises les plus consommatrices d’énergie et 1,5 milliard d’euros est budgété pour le filet de sécurité aux collectivités locales. Ces mesures s’ajoutent à celles déjà mises en place par le gouvernement pour protéger les particuliers et les petites entreprises (gel des tarifs réglementés sur le gaz, remises sur les carburants, baisse de la TICFE...) et dont la prolongation a été annoncée au mois de septembre dernier (le mécanisme des boucliers tarifaires sur le gaz et l’électricité a été prolongé en 2023, la hausse de prix du gaz est limitée à 15 % au 
1er janvier 2023 et celle de l’électricité à 15% au 1er février 2023).                 

C. D

La FNSEA pas rassurée  par les annonces gouvernementales

Réagissant aux annonces faites par le gouvernement le 27 octobre, la FNSEA estime que les « agriculteurs demeurent très inquiets ». Même si ces « mesures vont dans le bon sens », la FNSEA fait part de sa « déception » sur les mesures concernant le gaz. Pour le syndicat agricole, le critère retenu (3 % de la facture énergie dans le chiffre d’affaires pour être éligible) exclut trop d’exploitations agricoles. Elle déplore par ailleurs que pour « le premier niveau de protection, à savoir le bouclier tarifaire pour les TPE, le plafond de puissance électrique de 36 kVA continue à s’appliquer », excluant là aussi beaucoup d’entreprises agricoles. « Nous demandons que toutes les TPE puissent bénéficier de ce bouclier sur les tarifs de l’électricité, d’autant que ce plafond n’est pas un critère communautaire », insiste la FNSEA qui craint une rupture d’approvisionnement dans la chaîne alimentaire. 

Ils témoignent

Valsoleil / « Les conditions ne seront pas acceptables »

« Nous ne savons pas du tout à quelle sauce nous serons mangés. Nous sommes affectés par l’augmentation du prix du gaz et de l’électricité, mais pas dans l’immédiat car nous avons souscrit par chance un contrat pluriannuel jusqu’en 2024, explique Lionel Eydant, président de la coopérative drômoise Valsoleil. Fin 2023, nous devrons renégocier les contrats, ce qui reste vague, flou et malhonnête. » La coopérative a surtout des besoins en énergie pour le séchage des céréales. « Heureusement, nous avons de l’avance cette année, avec un très faible taux d’humidité. Mais une année normale, le maïs rentre en novembre au moment où le kilowatt est le plus cher. » Le président de Valsoleil est inquiet car il a vu les difficultés de négociation de Top Semence, le semencier coopératif. « Les contrats ont été renégociés pour janvier prochain. On avait une proposition avec un tarif multiplié par 10. Nous n’avons pas accepté. Puis on nous a proposé une augmentation fois 6,6. Nous n’avons pas accepté non plus. La dernière proposition était fois 2,4. » Lionel Eydant, compte sur l’État « pour stabiliser les choses, pour les PME et les coopératives. Sinon, les conditions ne seront pas acceptables. Nous ne pourrons pas vivre comme ça. » Quant aux adhérents de Valsoleil en production intégrée de volailles de chair ou de poules pondeuses, ils mesurent déjà « l’impact énorme » de la hausse du coût de l’énergie sur leurs charges. « Nous avons essayé de faire passer cette augmentation à travers la revente de matière première. Les aliments coûtent plus cher, les charges sont énormes pour le gaz dans les bâtiments, aussi ces augmentations ont été répercutées sur les prix de vente. Et l’abattoir a joué le jeu, ainsi que les grandes surfaces », indique le président de la coopérative.

Les Vergers de Chateauneuf / Incertitude sur la gestion de l’entreprise

En arboriculture, ce sont surtout les frigos nécessaires à la conservation des fruits qui représentent la plus grosse part de la consommation, avant le matériel de calibrage et de la chaîne d’emballage. Dès le début de l’année 2022, Frédéric Bergin, arboriculteur en Savoie, a changé d’opérateur et négocié un tarif fixe sur une durée de deux ans auprès d’Antargaz Énergie. Il pensait avoir fait quelques économies sur le prix annoncé au kWh, mais l’opérateur a indiqué il y a quelques jours qu’il ne pourrait pas tenir ses engagements et que son client allait recevoir une lettre recommandée modifiant les conditions tarifaires de ce contrat. Pour l’instant, ce courrier n’est pas arrivé et l’incertitude pèse sur la gestion de l’entreprise. En 2021, Les Vergers de Chateauneuf avaient un budget pour l’électricité de 85 468 €. Sur les dix premiers mois de l’année 2022, et avec des tarifs pourtant renégociés, les factures s’élèvent à 104 875 €. Dans le même temps, l’inflation sur les fruits et légumes demeure inférieure à 2 %. 

Volailles de Bresse / La hausse des charges fait exploser les prix

Morgan Merle est éleveur de volailles de Bresse à l’EARL du Domaine de la Pérouse sur la commune de Montracol dans l’Ain. Il réalise 65 % de son chiffre d’affaires en décembre et prévoit une hausse de 15 % de son prix pour les fêtes de fin d’année. En cause, la hausse des charges dont le prix de l’aliment et de l’énergie sur l’exercice comptable 2021-2022. « On a fait le calcul, on a une énorme augmentation du prix du lait en poudre (42 %) et de 30 % sur l’aliment poussin. Pour les cartons, il faut compter 54 % en plus. Le maïs a lui augmenté de 62 %, le blé de 51 %, et le GNR de 75 % », détaille-t-il. Pour le gaz, il faut compter 40 % d’augmentation, même si l’exploitation reste peu touchée dans ce cas-là puisqu’elle bénéficie d’un contrat avec tarif bloqué, grâce au groupement des éleveurs de volailles de Bresse. Malgré un élevage en plein air, les éleveurs de volailles de Bresse ne sont pas épargnés par la hausse du prix de l’électricité. Et l’éleveur d’ajouter : « L’électricité est deux fois et demie à trois fois plus chère. Je suis aussi en contrat bloqué sachant que depuis cette année, je suis passé au tarif réglementé proposé par l’État. J’ai ouvert un nouveau compteur donc j’en ai profité pour réviser l’ensemble de mon contrat ».