"Personne n’a intérêt à nous balader"
Après la levée des blocages routiers, les organisations agricoles drômoises ont participé à une réunion de travail présidée par le préfet. Objectif : concrétiser au plus vite les demandes des agriculteurs au niveau départemental sur de nombreux sujets.

« La colère est toujours vive, les gens attendent des résultats concrets, a prévenu le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, ces derniers jours. Personne n’a intérêt à nous balader », a-t-il ajouté tout en laissant planer la menace de perturbations pendant la visite d’Emmanuel Macron pour l’inauguration du Salon de l’agriculture, qui ouvre ses portes le 24 février à Paris.
Dans la Drôme, les syndicats agricoles maintiennent également la pression. Après la réunion du 7 février présidée par le préfet et en présence de plusieurs services de l’État (DDT, DDPP, OFB…) et représentants de la profession agricole, « on a l'impression que le préfet nous entend mais pas certains de ses services, constatent Sandrine Roussin et Jean-François Giguel, respectivement présidente et secrétaire général de la FDSEA de la Drôme. Il faut changer de logiciel pour que les choses avancent rapidement, que ça bouge à tous les échelons : sur la prédation, les jachères, l'eau, Écophyto... Nous avons d'ores et déjà obtenu des acquis au niveau national : sur le GNR, la prise en charge de la MHE, le versement des aides Pac d'ici le 15 mars, le fonds d'urgence pour la viticulture, pour la bio, certaines simplifications environnementales… Mais toutes les annonces du Gouvernement ainsi que nos demandes locales doivent se traduire en faits, sinon nous remobiliserons nos troupes très rapidement », préviennent-ils.
« On est au charbon »
Plusieurs représentants de la chambre d'agriculture de la Drôme, dont le président Jean-Pierre Royannez, ont également participé à cette réunion. Les échanges ont porté sur la simplification administrative, l'application de la loi Égalim et le renforcement des contrôles des distributeurs, la gestion de l'eau, le versement des aides de la PAC, le règlement des dossiers de calamités agricoles… « Pendant plus de deux heures, j'ai présenté un document récapitulant l'ensemble demandes de la profession agricole. Localement, ce que nous constatons d'ores et déjà, c'est que peu d'arrêtés préfectoraux posent problème. Ce sont davantage des particularités locales qu'il faut résoudre comme les retards du greffe du tribunal de commerce de Romans qui bloquent des dossiers d'installation. C'est aussi et bien sûr l'eau où nous devons obtenir impérativement des avancées sur les volumes prélevables - en particulier sur la Drôme des collines et la Galaure - et sur les projets de retenues collinaires pour lesquels on a obtenu la réouverture de dossiers déposés depuis 2019. Il y a aussi, bien évidemment, le dossier de la prédation et celui des ICHN perdues suite à la révision des zones défavorisées simples. »
Depuis la suspension des barrages routiers, « on est au charbon », assure Jean-Pierre Royannez. C'est un travail de très grande ampleur et de longue haleine, on se bat sur tous les dossiers. Toutes les pistes sont explorées afin de récolter un maximum de choses. » La prochaine réunion de travail entre la profession agricole drômoise et les services de l’État est fixée à début mars.
Christophe Ledoux
Contrôles des grandes surfaces : des enseignes drômoises verbalisées

Le gouvernement s’est engagé auprès des agriculteurs à faire respecter la loi Égalim en augmentant le nombre de contrôles dans le but de protéger les produits français face à la concurrence étrangère. Dans la Drôme, les inspecteurs de la répression des fraudes et de la DDPP ont procédé à de nombreux contrôles dans les hypermarchés Lidl, Casino, Aldi, Vival, Leclerc, Super U, Monoprix, Franprix et Intermarché, indique la préfecture dans un communiqué le 13 février. Ces contrôles ont donné lieu à :
- trois procès-verbaux pour étiquetages trompeurs s’agissant de l’origine des fruits et légumes (dont trois francisations) et de la présentation à la vente de légumes conventionnels faisant croire qu'ils bénéficiaient de la qualité de produits bio dans plusieurs grandes surfaces « discount » ;
- un procès-verbal pour manquements sur des erreurs d'origine au rayon fruits et légumes (17 manquements, dont 11 sont de la francisation) ;
- un procès-verbal pour absence de l'affichage de l'origine de la viande bovine au rayon « traditionnel » ;
- un procès-verbal pour fausse indication d'origine et indications d'origine prêtant à confusion sur des fruits et légumes.
« D’autres établissements feront également l’objet d’avertissements pour rappel à la réglementation », précise la préfecture de la Drôme.
Sous pression, le ministère de l'Agriculture précise le calendrier
Le projet de loi d’orientation pour l’agriculture devrait être soumis au Conseil d’État « avant la fin du mois de février, c’est-à-dire entre la fin de cette semaine et le début de la semaine prochaine- », a indiqué le cabinet du ministre de l’Agriculture à la presse le 12 février. Avant cette étape, « les ministres (Marc Fesneau et Agnès Pannier-Runacher, NDLR) verront dans la semaine chacune des organisations agricoles pour échanger » sur le contenu de la loi. Le ministère de l'Agriculture réaffirme l’objectif d’adopter la loi au premier semestre 2024.
Par ailleurs, selon l’entourage du ministre, plusieurs concertations vont démarrer dans les prochains jours. L’une d’elles s’inscrira dans le cadre du « mois de la simplification », démarche pour laquelle l’ensemble des préfets ont rencontré les syndicats au niveau départemental (lire ci-XXXXXX). La concertation est également « relancée » sur le plan de souveraineté élevage, « dans une logique de renforcement », afin d'aboutir « d’ici le Salon de l'agriculture ». Enfin, le ministère a annoncé la tenue prochaine de deux réunions : un comité de suivi des négociations commerciales le 19 février, et un Groupe national loup « en fin de semaine, début de semaine prochaine » afin de finaliser le Plan loup 2024-2029. Enfin, comme chaque année avant le Salon de l'agriculture, Emmanuel Macron a prévu de rencontrer l'ensemble des syndicats agricoles d'ici la semaine prochaine.
Écophyto : une décision avant le Salon de l'agriculture
Le comité d’orientation et de suivi de plan Écophyto (COS) s’est réuni le 12 février pour « mettre à plat » l’ensemble des indicateurs existants afin de décider, avant le Salon de l’agriculture, lequel sera retenu pour mesurer l’objectif de réduire de 50 % l’utilisation des produits phytopharmaceutiques d’ici 2030. Plusieurs possibilités ont été évoquées par les membres du COS, en présence des quatre ministres présents (Agriculture, Écologie, Enseignement supérieur, Santé) : le Nodu (NOmbre de Doses Unités) très franco-français et qui reste « une ligne rouge » pour certaines ONG écologistes ; le HRI-1 issue de la directive européenne 2009/128 et qui correspond à la somme des quantités de substances actives vendues en année n, pondérée par les coefficients liés à leur classification, et dont la référence historique est 2011-2013 ; le Farm to Fork qui a une référence historique 2015-2017… La décision sera « collégiale » et interviendra « avant le Salon de l’agriculture », indique-t-on au ministère de l'Agriculture.
Fruits et légumes traités au thiaclopride : la France demande la suspension des importations
Le 9 février, le ministère de l’Agriculture a officiellement demandé à la Commission européenne de suspendre la mise sur le marché européen des fruits et légumes traités à l’insecticide thiaclopride. En effet, cette substance interdite en France depuis septembre 2018 et en Europe depuis février 2021 continue toujours d’être importée par le biais des fruits et légumes étrangers provenant de pays qui n’ont pas interdit cet insecticide. Selon l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa), ce produit est considéré comme « étant cancérogène de catégorie 2, toxique pour la reproduction de catégorie 1 et perturbateur endocrinien », souligne le communiqué. Le ministère demande implicitement un renforcement des contrôles et envisage de prendre une « clause de sauvegarde » si l’Europe ne réagissait pas rapidement. Mais il n’a pas donné de limite calendaire pour que la Commission européenne agisse avant de déclencher cette clause de sauvegarde.
PAC : la dérogation sur les jachères officiellement adoptée
Le journal officiel de l’Union européenne a publié dans son édition du 13 février, le règlement autorisant la dérogation à la BCAE 8. Autrement dit, les agriculteurs sont officiellement autorisés à emblaver leurs 4 % de jachères en cultures intermédiaires ou fixatrices d'azote (lentilles, pois...) et non plus seulement en jachères et surfaces non-productives (haies, bosquets, mares...). Ce seuil a par ailleurs été abaissé par rapport à 7 % initialement proposé fin janvier. Après le déclenchement de la guerre en Ukraine, la Commission européenne avait suspendu l’application de cette règle pour augmenter les productions et compenser notamment la perte de l’offre céréalière liée à la guerre. L'exemption aux obligations de jachères était réclamée par une partie des agriculteurs lors des grandes manifestations qui ont éclaté dans plusieurs pays européens en janvier. Pour la FNSEA, « imposer 4 % de surfaces agricoles improductives en Europe est un non-sens », avait-elle indiqué dès le mois de novembre 2023. Surtout « à l’heure où les conflits se multiplient sur la planète, où 800 millions de personnes dans le monde sont confrontés à l’insécurité alimentaire, où l’Europe a importé le double de volumes de céréales par rapport à l’année passée », avait-elle justifié.