Les enseignes de la grande distribution dans le viseur des agriculteurs
Afin que la pression ne retombe pas à l’approche du Salon international de l’agriculture, les FDSEA de l’Isère et de la Drôme ainsi que Jeunes agriculteurs Isère ont bloqué la base logistique d’Intermarché située à Saint-Quentin-Fallavier.

Dès 13 heures, le 21 février, quelques agriculteurs de la FDSEA de l’Isère se sont rendus devant la plateforme d’Intermarché de Saint-Quentin-Fallavier (38) et l’ont bloquée avec des tracteurs. Leurs revendications : obtenir « une juste rémunération » ainsi que « le contrôle des GMS* et des restaurateurs par l’État », explique Jérôme Crozat, président de la FDSEA de l’Isère. Jocelyn Dubost, président des Jeunes agriculteurs Auvergne-Rhône-Alpes, a rejoint le mouvement dans l’après-midi.
Le 22 février, la FDSEA de l’Isère a été rejointe par les FDSEA de la Drôme et de la Loire ainsi que par quelques Jeunes agriculteurs isérois et drômois. Un barrage filtrant a été mis en place : les syndicats ont empêché les camions de pénétrer la plateforme, mais ceux chargés à vide ont pu quitter les lieux.
Des agriculteurs drômois sont venus en renfort de leurs collègues isérois pour tenir le point de blocage. ©AD26
Une représentante d’Intermarché est également venue à la rencontre des agriculteurs pour discuter avec eux des problèmes rencontrés. « Nous comprenons, c’est pourquoi nous travaillons le plus possible avec les producteurs locaux. Nous vendons 25 % de produits locaux dans nos magasins à l’année, et ce nombre atteint les 30 % en été, grâce à un apport plus conséquent de fruits et de légumes », a-t-elle expliqué.
Des Mousquetaires compréhensifs
Le 23 février, les rangs des manifestants ont grandi avec l’arrivée de jeunes agriculteurs du département. Le barrage a été levé en début d’après-midi. Le groupe Les Mousquetaires, qui détient Intermarché, a accédé aux requêtes des FDSEA et des JA et s'est dit prêt à « coconstruire avec l'ensemble des acteurs, dont vous agriculteurs en premier lieu, les solutions garantissant l'avenir de notre agriculture et alimentation française ».
Le groupe dit s'aligner avec la FNSEA sur différents points. Il s’agit de la « transparence dans les négociations pour sécuriser [les] revenus », notamment en mettant en place un « mécanisme d’encadrement préalable des négociations entre le monde agricole et les transformateurs », mais aussi d’assurer « une véritable transparence de la matière première agricole tout au long du cycle de négociations ». Les Mousquetaires disent également rejoindre la FNSEA quant à la volonté d’exclusion de centrales d’achat européennes des produits à forte composante agricole. Et de rappeler que, depuis 2019, le groupe s’efforce de faire figurer l’origine des produits sur les emballages grâce à son « FrancoScore ».
Morgane Poulet
* GMS : grandes et moyennes surfaces.
Dans la Drôme, des bennes vidées devant plusieurs administrations

La colère des agriculteurs s’est également traduite la semaine dernière par des actions coup de poing de la FDSEA et de JA 26. Le 23 février, tôt le matin, des bennes ont été vidées devant la préfecture de la Drôme, la DDT 26 et la sous-préfecture de Die, entre autres. Pour les deux syndicats, le but était de « continuer à mettre la pression sur le Gouvernement » et montrer la « détermination à obtenir des réponses rapides et concrètes, à J-1 du Salon de l’agriculture ».
Par ailleurs, la veille, des agriculteurs drômois sont venus en renfort de leurs collègues isérois pour maintenir le blocage de la centrale d’achat d’Intermarché à Saint-Quentin-Fallavier (lire ci-dessus).
Devant la DDT de la Drôme. ©AD26
Devant la préfecture de la Drôme. ©AD26
Devant la sous-préfecture de Die. ©AD26
La pression maintenue en Auvergne-Rhône-Alpes

D'autres centrales d’achat ont été bloquées dans la région. Aux confins de l’Isère et du Rhône,l'activité de la plateforme logistique Socara fournissant les magasins Leclerc à Villette-d'Anthon (Isère), a été paralysée les jeudi 22 et vendredi 23 février. Des dizaines de camions se sont retrouvés bloqués aux abords, empêchés de sortir ou de charger de nouvelles marchandises. Plus au Nord, dans le département de l’Ain, une quarantaine d’agriculteurs avait déjà installé leur campement depuis la veille, afin de bloquer les entrées et sorties de la plateforme Kuehne + Nagel, située à Bâgé-Dommartin. Le lieu n’avait pas été choisi au hasard : cette entreprise logistique compte comme unique client le mastodonte Carrefour.
Dans l'Est du département de l’Ain, à Saint-Just, FDSEA et JA ont bloqué la plateforme logistique de SystèmeU du 21 février en fin de journée jusqu'au lendemain dans la soirée. Une mobilisation qui a porté ses fruits, avec à la clé des engagements écrits de l’enseigne. Le même jour, une soixantaine d'agriculteurs venus de l’Allier, du Puy-de-Dôme, de Saône-et-Loire, de Creuse, de Haute-Loire, du Cantal et de la Nièvre ont bloqué la SCA Centre à Yzeure (Allier), l’une des centrales d’achat du géant Leclerc.
Par ailleurs, dans la Loire, le 21 février, une délégation d'agriculteurs s'est rendue dans des rayons d’enseignes de la grande distribution (Super U, Intermarché et Fresh) afin de s’assurer que la traçabilité des produits vendus était en règle. Le 22 février, quatre hypermarchés des deux Savoie étaient visités en même temps pour vérifier la provenance des références alimentaires. Une centaine de syndicalistes a participé à cette action coup de poing qui visait les magasins Leclerc de Cran-Gevrier et de Tournon, le Géant Casino d’Annemasse et le Carrefour de Bassens.