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Dossier spécial rentrée agricole

Les distributeurs de matériel agricole font face à la crise

Traditionnellement, votre journal agricole départemental vous propose à cette période un supplément « spécial Beaucroissant », panorama des nouveautés et thèmes de la rentrée agricole du mois de septembre. L'événement n'ayant pas lieu, nous avons fait le choix de ne pas l'éditer cette année. A la place, nous avons décidé de vous proposer ce « Dossier spécial Rentrée agricole », pour vous permettre de vous informer des tendances du marché et de découvrir les dernières nouveautés en matière d'agroéquipements et d'élevage. Votre presse agricole s'adapte pour continuer de vous informer et de vous accompagner dans votre quotidien, sur vos exploitations, dans vos entreprises.
Les distributeurs de matériel agricole font face à la crise
Depuis le début de la crise sanitaire, l'agriculture a démontré, s'il en était besoin, son rôle essentiel dans nos vies. D'abord pour nous nourrir : sans agriculture, il n'y a pas d'alimentation ! Et nous le voyons bien ces derniers mois, l'autosuffisance alimentaire redevient une priorité absolue pour nos gouvernants. Ensuite pour entretenir nos paysages, modeler nos campagnes, les rendre vivantes et en faire des destinations touristiques de premier choix. Nous l'avons constaté cette année, le tourisme rural, de proximité, de plein air a été plébiscité par les Français, qui ont fait le choix d'éviter les destinations de forte affluence. Pour autant, la crise que nous affrontons depuis le mois de mars a et aura des conséquences moins honorifiques pour notre agriculture. L'économie de notre pays a commencé de souffrir et va traverser des mois difficiles d'ici cette fin d'année, qui risquent de durer davantage pour certains secteurs. L'agriculture n'est pas épargnée par ces incertitudes. Parmi les conséquences que nous connaissons déjà, l'annulation de plusieurs événements, fêtes et foires populaires et agricoles de rentrée : le Space de Rennes, la Foire de Châlons-en-Champagne, la Foire internationale de Clermont-Cournon, le Sommet de l'élevage (annonce du 28 août), les concours départementaux, régionaux et national de labours, etc. Sans oublier, bien entendu, la Foire de Beaucroissant, qui devait se dérouler les 11, 12 et 13 septembre prochains. La déception est grande pour les acteurs agricoles de notre région, même si les raisons qui ont poussé à annuler le rendez-vous isérois n'appellent aucun commentaire. Le concours régional charolais Sud-Est, qui devait se dérouler comme chaque année à Beaucroissant, est lui aussi annulé...
Sébastien Duperay, rédacteur en chef de l'Apasec (Agence de presse agricole du Sud-Est Centre).

 

Malgré l’effondrement de leur chiffre d’affaires qui a tendu leur trésorerie, les distributeurs de machinisme agricole ont assuré la continuité du service auprès des agriculteurs pour les dépannages et la fourniture de pièces détachées.

Comme tous les secteurs d’activité, les entreprises de services et de distribution du machinisme agricole et des espaces verts ont payé un lourd tribut à la crise. Ainsi, elles ont vu leur chiffre d’affaires s’effondrer de 29 % pour le matériel agricole neuf et même de 52 % pour les espaces verts en avril par rapport au même mois en 2019, selon le Syndicat national des entreprises de service et distribution du machinisme agricole, d’espaces verts et des métiers spécialisés (Sedima). Même si la situation s’est redressée au mois de mai, le chiffre d’affaires est resté encore en retrait de 9 % pour le machinisme agricole et de 34 % pour les espaces verts pour le matériel neuf. Sans parler de l’impact provoqué par les retards de livraison pour le matériel et les pièces détachées.
Conséquence immédiate, de nombreuses entreprises doivent faire face à des difficultés de trésorerie, notamment dans le secteur des espaces verts, davantage sinistré. En effet, les entreprises de vente et de distribution de matériel d’espaces verts ont particulièrement souffert de la fermeture des magasins, de l’annulation de nombreuses commandes de la part des entreprises du paysage et des collectivités. A la crise de la Covid-19 s’est ajoutée la suspension des projets d’investissements dans les collectivités territoriales liée au report du deuxième tour des élections municipales, quand le maire n’avait pas été élu au premier tour, observe Pierre Prim, le président du Sedima.

Perspectives incertaines

Au final, la crise devrait se traduire par un repli du chiffre d’affaires annuel de la profession compris entre 7 et 15 %, alors que les ventes étaient plutôt bien orientées avant l’arrivée de la pandémie. La fin de la saison, en septembre et octobre, pourrait rattraper l’effondrement du printemps. En tout cas, le président voudrait le croire, la conjoncture du machinisme agricole étant fortement dépendante de celle des productions agricoles. Depuis quelques mois, à l’exception du maïs, le prix des céréales est orienté à la hausse et celui des intrants s’inscrit en baisse. Dans le secteur de l’élevage, la production de viande porcine est repartie à la hausse et elle s’accompagne d’un repli du prix des aliments. En production laitière, la crise est intervenue alors que le prix et les volumes étaient plutôt soutenus. La pandémie a entraîné un fléchissement volontaire de la production qui pourrait repartir, une fois la crise terminée. Seule ombre au tableau, la viande bovine qui enregistre simultanément une diminution des prix et de la production. Quant aux grandes cultures, les rendements de la moisson 2020 et donc sur les volumes ont été en net retrait. Le secteur viticole, quant à lui en pleine récolte, subit de plein fouet les surtaxations américaines. En tout cas, « la visibilité est nulle et les perspectives ne sont pas extraordinaires » pour la fin de l’année, corrige Pierre Prim.

Relations tendues

Quoiqu’il en soit, les entreprises de distribution du machinisme agricole, comme d’ailleurs toutes celles de l’agrofourniture, ont assuré la continuité du service auprès des agriculteurs, notamment pour les dépannages et la fourniture de pièces détachées pendant la période du confinement, sans trop de conséquences sanitaires négatives sur les salariés. Grâce à la diffusion d’un guide sanitaire dès le début du confinement auprès de ses adhérents, le Sedima n’a observé que 31 cas de covid-19 dans 27 entreprises, sans qu’on sache vraiment si la maladie a été contractée à l’intérieur ou à l’extérieur de l’entreprise. « En tout cas, il n’y a pas eu de propagation au sein d’une même entreprise », se félicite le président. Cet épisode a tendu les relations entre les constructeurs et les distributeurs de machinisme agricole. Ces derniers accusent notamment les constructeurs de les avoir encouragés à surstocker du matériel, au besoin en leur accordant des crédits fournisseurs à des taux usuraires. Une situation que le président considère comme « inadmissible et immorale. Ils ont profité de la crise en bénéficiant de dispositifs d’évasion fiscale parfaitement légaux », s’insurge-t-il. En effet, les constructeurs et leurs banques dont la plupart ont leur siège aux Pays-Bas ou au Luxembourg, (c’est-à-dire dans des paradis fiscaux) ont bénéficié de flux financiers importants, bref de revenus complémentaires soumis à une imposition allégée de 3 à 5 % sur les bénéfices, alors que ce taux est de l’ordre de 30 % en France.