Les clés pour réussir une diversification fromagère
Diversifier sa production ne s’improvise pas. Cela doit être réfléchi et cohérent en termes de flux et d’organisation. Il faut aussi veiller à ce que cela ne devienne pas une contrainte de travail.

Les deuxièmes Rencontres du fromage fermier organisées au lycée agricole Reinach de La Motte-Servolex, en Savoie, ont rassemblé de nombreux producteurs ovins et caprins venus de toute la grande région Auvergne-Rhône-Alpes, qui ont pu mêler rencontre et partage de savoirs. Outre des échanges informels, la journée a permis la tenue de plusieurs ateliers utiles aux producteurs pour améliorer leurs techniques, leur productivité et, in fine, leur revenu. Les éleveurs de brebis laitières sont de plus en plus nombreux. Fin 2022, la région Auvergne-Rhône-Alpes comptait 237 élevages, dont 90 % en transformation fromagère.
La diversification fromagère peut représenter une opportunité pour améliorer son revenu. « Globalement, cela fonctionne bien », indiquent Sandrine Anselmet, technicienne à la chambre d’agriculture de l’Isère et Sylvie Morge, technicienne à celle de l’Ardèche, qui ont profité des deuxièmes Rencontres du fromage fermier pour donner quelques clés aux producteurs pour bien réussir leur diversification.
Ne pas brader ses produits
Il y a des associations qui fonctionnent bien, et d’autres qui ne fonctionnent pas. Pour éviter que des producteurs au moment de diversifier leur gamme ne commettent certaines erreurs, les deux techniciennes ont commencé par rappeler certains prérequis, comme s’équiper d’un thermomètre, d’un acidimètre et d’une balance-psychromètre1, se former avec des techniciens ou grâce à des échanges avec d’autres producteurs, et réaliser des analyses microbiologiques sur tous les produits. Elles ont aussi incité les producteurs à bien ajuster leurs prix de vente. « Tous les produits n’ont pas les mêmes coûts de production. Ils ne doivent donc pas être vendus au même prix, il ne faut pas brader ses produits, il faut qu’ils soient rentables. S’ils ne le sont pas, il ne faut pas se lancer », ont-elles mis en garde. Et elles ont insisté sur la nécessité de bien penser aux locaux. « Selon les productions, il faut voir les organisations du travail à mettre en place pour limiter les
contaminations et peut-être prévoir plusieurs caves d’affinage. Il ne faut pas imaginer que les glaces puissent se trouver au milieu des fromages », ajoutent-elles. Et elles enjoignent les producteurs à ne pas trop se diversifier. « Les journées ne font que 24 heures. Se diversifier représente du travail et une charge mentale importante. Il faut faire attention à ne pas trop en faire, et à ne pas non plus proposer trop de parfums différents », avertit Sandrine Anselmet.
Se former
Les deux expertes ont présenté les associations de fromages (pâtes molles, persillées, pressées, lactiques) qui peuvent fonctionner ensemble selon le matériel et les conditions d’affinage dont disposent les producteurs. Elles ont rappelé la nécessité de bien laver et même désinfecter les contenants. « Les salmonelles, par exemple, se conservent très bien à une température de - 3 °C pendant un an », soulignent-elles. Elles ont aussi reprécisé que pour confectionner des crèmes desserts, il faut faire très attention aux œufs et au risque de présence de salmonelles. S’ils sont pris en coquille, ils ne doivent pas être cassés dans la fromagerie. Réalisant un petit focus sur la fabrication des glaces, elles recommandent aux producteurs de se former, car il n’est pas évident d’obtenir un mix équilibré. Elles rappellent aussi que c’est une production qui nécessite des investissements importants2 et que les tarifs de vente ne sont absolument pas concurrentiels avec des produits vendus en grande surface. Il est donc indispensable de procéder en amont à une étude de marché pour
s’assurer d’avoir le débouché qui convient.