Le paiement des fermages

Question : Depuis les aléas climatiques de 2019, mon fermier ne m'a pas payé son fermage. J'envisage de le poursuivre. Quels sont mes droits ?
Réponse : Le paiement des fermages est une des obligations essentielles du fermier en place, il caractérise même au besoin l'existence du bail rural.
L'échéance normale de paiement souvent inscrite dans le bail est en principe la fin de l'année culturale. Mais il peut être convenu un paiement en deux fois avec une première partie payée à l'échéance, le solde ultérieurement dans un délai fixé par l'accord.
Une autre modalité consiste à payer un acompte avant l'échéance, puis le solde en fin d'année culturale. Cette seconde est moins favorable au fermier, notamment le jeune qui s'installe sans revenu antérieur.
A défaut d'accord entre les parties le paiement s'effectue en une seule fois en fin d'année culturale.
Le paiement doit être effectué auprès du bailleur ou de toute personne habilitée à cet effet (article 1239 du code civil). Le fermier doit donc s'assurer que la personne qui reçoit le fermage est bien mandatée pour cela. En effet, un paiement effectué auprès d'une personne non mandatée n'a pas d'effet libératoire, c'est comme si le fermier n'avait pas payé son fermage qui peut lui être réclamé de nouveau. Les personnes à qui il faut payer sont, notamment, le propriétaire, l'usufruitier, les gérants d'indivision ou de société bailleur...
A défaut de bail écrit, les modalités de règlement des fermages seront déduites de la pratique lorsque la location existe depuis plusieurs années ou selon les clauses du bail type départemental.
En cas de difficultés financières
Le fermier reste tenu de payer ses fermages. Ce principe étant rappelé, il est des circonstances où le fermier est vraiment dans l'impossibilité de payer à l'échéance : épizootie sur l'élevage, accident grave ou longue maladie du fermier, calamité sur récoltes... bref une situation grave et inquiétante faisant que la trésorerie de l'exploitation n'est plus suffisante. Pourtant il ne faut pas oublier que le non-paiement peut entraîner la résiliation judiciaire du bail, suite à deux mises en demeure faites par lettre recommandée avec AR (Art. L 411-53 code rural).
Pour éviter ce risque majeur, le fermier ne doit pas s'isoler. A l'échéance, il doit informer le bailleur de ses difficultés financières et lui demander des délais de paiement. Dans la très grande majorité des cas, le bailleur comprend la situation et accorde des arrangements de paiement. Chaque fermier peut conclure avec son bailleur un report de paiement.
A défaut d'un tel arrangement, le fermier doit tout mettre en œuvre pour payer son fermage avant qu'une procédure ne soit engagée. Une décision admet que ce paiement tardif avant l'introduction d'une instance devant le tribunal paritaire n'entraîne pas la résiliation de bail (cass. 3° Civ. 30 janvier 2002 consorts Thirouin). Mais il reste aléatoire de s'en remettre à l'appréciation des juges. Si l'article L 411-53 du code rural prévoit que la résiliation n'est pas encourue en cas de force majeure ou de raisons sérieuses et légitimes, les motifs retenus par la jurisprudence jusqu'à ce jour ne comprennent pas les calamités agricoles.
En cette période exceptionnelle, le recours au tribunal paritaire ne devrait pas être une solution. Il faut éviter cet affrontement stérile par la recherche d'un accord entre les parties, solution la plus sûre pour que fermier et bailleur conservent leur confiance réciproque.
Le service juridique rural de la FDSEA 26, Nathalie Kotomski