Accès au contenu
Machinisme

Le déchaumage retrouve ses lettres de noblesse 

Immédiatement après la moisson, un travail superficiel du sol sur les chaumes permet de faire germer bon nombre d’adventices en vue de leur destruction ultérieure. Mais ce n’est pas tout, le déchaumage apporte bien d’autres avantages.
Le déchaumage retrouve ses lettres de noblesse 

On attend parfois beaucoup trop d'un seul déchaumage. Pour tous, il doit concilier plusieurs objectifs : éviter la grenaison de plantes qui se trouveraient en dessous du plateau de coupe de la moissonneuse ; permettre de faire germer un stock de semences libérées par les plantes hôtes avant la récolte de la céréale, tels que les vulpin, brôme, folle avoine, pâturin ou autre rumex... ; restructurer le sol en le fissurant, voire encore détruire les œufs de limaces en attente de la saison humide pour éclore... Mais atteindre tous ces objectifs en un seul passage d'outil relève de la quadrature du cercle !
Pour essayer de répondre à ces attentes plurielles, les constructeurs ont développé, ces dernières années, ce qu'il est convenu d'appeler, des « néo-déchaumeurs », c'est-à-dire des outils portés ou traînés qui combinent un train de dents à l'avant, suivis de disques de petits diamètres (moins de 45 cm) et d'un rouleau de rappui à l'arrière. Chaque constructeur a dans son catalogue une offre que l'on retrouve avec le Cultimer et l'Optimer de Kuhn, le Centaure ou Cenius d' Amazone, le Cruiser de Horsch ou encore le Cross cutter de Vaderstad ...
Mais pour atteindre tous ces objectifs, mieux vaut décomposer les passages avec plusieurs types d'outils en graduant la profondeur de travail au fur et à mesure des interventions.

Un premier déchaumage superficiel s'explique

Si l'agriculteur s'inscrit dans une stratégie de plusieurs déchaumages pour avoir une culture suivante la plus propre possible, il faudra commencer par un travail léger, à 4 ou 5 centimètres de profondeur maximum avec des outils à dents ou à disques, tout en rappuyant le sol afin d'avoir une meilleure levée des adventices. En cas de présence de vivaces, chiendent ou liseron, il vaudrait mieux éviter les disques qui auront l'inconvénient de « bouturer » les rhizomes et les propager dans la parcelle. Dans ce cas, un outil à dents est préconisé. Ce travail se fera tout de suite après les moissons pour bénéficier de l'humidité résiduelle du chaume. Un travail trop profond, 10 à 15 centimètres, pourrait empêcher la germination d'adventices qui entreraient en dormance et que l'on retrouverait à l'automne avec une préparation de semis plus superficielle. Ce travail de faux-semis permet une réduction de l'ordre de 40 % des levées d'adventices dans la culture suivante. L'agriculteur pourra ainsi mieux cibler son désherbage sur une céréale qui suivra et, pourquoi pas, ne réaliser qu'un anti-graminées ou un anti-dicots, s'il est arrivé à nettoyer sa parcelle en inter-culture d'été.

Un travail plus profond en deuxième passage

En deuxième passage, environ un mois plus tard, vers le 20 août, un travail plus profond, 15 à 20 centimètres, allie une destruction du premier faux-semis, une extraction des rhizomes de vivaces, un mélange dans les différents horizons du sol des résidus de récolte et peut avoir un effet restructurant avec un outil à dents... Ce deuxième déchaumage peut détruire jusqu'à 70 % des adventices dans la culture suivante et a un effet désherbage indéniable.

Des outils hybrides : à la fois chisel et cover-crop

Après la vague des néo-déchaumeurs apparus sur le marché depuis une dizaine d'années, une nouvelle offre d'outils de déchaumage est en train de faire son apparition, celle des déchaumeurs « hybrides ». Ils associent un train de dents de chisel qui peut travailler à une bonne trentaine de centimètres de profondeur suivi par des disques de plus grands diamètres, au moins 60 cm. Ils sont aussi équipés de rouleaux arrières en spire, lame de ressort, en tubes hélicoïdeaux ou de rouleaux en caoutchouc, autant de configurations que de constructeurs... Certains peuvent dissocier la profondeur de travail des dents ou des disques en obtenant au champ un outil plus chisel ou plus pulvériseur selon la nécessité. Ces matériels sont plus exigeants en puissance de traction que le néo-déchaumeur, de 50 à 100 chevaux par mètre de travail, mais ils peuvent remplacer les bons vieux chisels et cover-crop de jadis. Ces nouveaux matériels se déclinent en gamme Performer chez Kuhn, Ceus chez Amazone, Sysmixx chez Green...
Avec une telle offre de matériel sur le marché, le déchaumage mécanique retrouve peu à peu ses lettres de noblesse, un temps délaissé par l'option chimique. Ces matériels largement repensés par les constructeurs donnent une polyvalence qui permet d'atteindre les objectifs multiples du déchaumage et de répondre à la pression sociétale qui voit de plus en plus mal l'usage des herbicides totaux en période d'interculture. 

Roland Saint Thomas