Le déchaumage : adapter ses pratiques
enfouir les chaumes et restes de paille afin de favoriser leur décomposition. Il intervient généralement après moisson et avant
labour.

En agriculture biologique, le déchaumage est devenu une pratique très fréquente afin de faire germer adventices et graines (faux-semis) en vue d'une destruction avant implantation de la prochaine culture. Ce procédé a, en outre, l'avantage de relancer la minéralisation et de favoriser les micro-organismes du sol pour la culture suivante, de permettre l'incorporation d'effluents et d'amendements, de détruire certains ravageurs, ainsi que de préparer le sol pour la culture suivante. Mais l'opération peut aussi présenter quelques limites :
- relance des adventices si elles ne sont pas éliminées rapidement après le premier déchaumage ;
- efficacité limitée des faux-semis en conditions trop sèches ou trop humides ;
- difficulté de passage en cas d'intercultures longues avec couverts végétaux ;
- éventuel temps de travail important en cas de passages répétés ;
- asséchement des premiers horizons du sol et formation de blocs avec des passages grossiers trop profonds en sol argileux.
L'intérêt et la réussite du déchaumage résultent, comme souvent, de compromis de l'agriculteur en fonction des rotations, des conditions pédoclimatiques, de la pression adventice, de l'équipement et du temps de travail.
Adapter ses pratiques aux adventices
Pour réussir ses faux-semis sur des adventices annuelles, le déchaumage doit être réalisé superficiellement (5-8 cm) pour faire lever les adventices sans remonter trop de graines. Les déchaumages successifs devront être réalisés à profondeur égale ou décroissante pour la même raison. L’idéal étant de ne pas travailler plus profond que la profondeur de travail du semis dans le cas d’un semis sans labour. Les graines enfouies plus profondément ne germeront pas sans perturbation du sol. Dans tous les cas, le rappuyage a autant d’importance que le travail du sol, pour permettre un bon lit de semence pour les adventices qui seront détruites par la suite. À l’inverse pour lutter contre les vivaces à rhizomes, il sera préconisé un déchaumage plus profond (10 cm et plus) pour éviter le fractionnement des rhizomes. Des passages répétés permettront d’épuiser la plante mais il faudra préserver les premiers centimètres avant le semis et les déchaumages successifs devront être réalisés à profondeur décroissante pour induire des levées d’adventices annuelles échelonnées nettoyant progressivement les 2-3 premiers centimètres du sol.
Couverts végétaux vs déchaumage, disques vs dents
Les partisans du non-travail du sol préfèrent remplacer le déchaumage par l’implantation d’un couvert. Ceci a l’avantage de ne pas remonter le stock de graines présent dans le sol et le couvert peut servir d’engrais vert pour la culture suivante. On gagne aussi du temps et de la fraîcheur dans le sol pour que le couvert se développe vite. Toutefois, les implantations du couvert ne peuvent pas toujours se faire dans des conditions optimales (météo, dates…) et certains céréaliers en non-labour considèrent le déchaumage incontournable pour lutter contre des adventices comme le rumex, les chardons dont la période de destruction possible est très courte, ou les adventices comme les ray-grass qui lèvent de manière très étalée tout l’hiver. Les outils à dents sont généralement privilégiés car les disques ont l’inconvénient de fragmenter les rhizomes de certaines vivaces : liseron, chardon, chiendent… Toutefois, les déchaumeurs à disques ont aussi leurs avantages : ils permettent généralement un mélange plus homogène de la terre avec les effluents, amendements ou chaules et ils nécessitent moins de puissance et d’entretien. Par ailleurs, sur un sol pris en masse par le sec, il est souvent plus facile d’intervenir avec un outil à disques avant de passer aux outils à dents. Les constructeurs réalisent aussi des combinés à dents et disques plus polyvalents.
Un déchaumeur pour chaque usage
Pour travailler dans toutes les conditions, les outils à disques avec châssis en X, à disques indépendants ou avec châssis en Y s’avèrent les outils les plus exploités. La charge exercée sur chaque disque, liée au poids de l’équipement complet, est souvent choisie selon le type de sol : un sol lourd de type argileux nécessite une charge importante par disque et un grand diamètre pour pénétrer dans le sol et assurer un bon travail superficiel. Pour travailler sur des sols plutôt légers et peu argileux, les outils à dents rigides, avec ou sans système de sécurité selon la fréquence de pierres et le type de sol, assurent un déchaumage optimal. La présence d’un train de disques, à l’arrière des dents peut améliorer le mélange des débris végétaux avec le sol et assurer le nivellement. Le travail souhaité conditionne le type de socs à monter sur chaque dent. Pour ameublir en profondeur et rappuyer le déchaumage, il faut basculer sur des décompacteurs, notamment dans les sols riches en argile. Ce travail profond, effectué en période sèche, assure aussi une destruction superficielle des chaumes en surface. Un rouleau peut compléter le travail avec un léger mélange des résidus avec le sol et un rappuyage du travail réalisé.
Les avantage de la Cuma
Il n’existe pas d’outil idéal et parfait, puisque chaque matériel est adapté à des conditions particulières. Afin de ne pas investir seul dans une multitude de machines aux utilisations parfois très ponctuelles, mais de bénéficier d’un parc de matériels plus important et polyvalent, certains agriculteurs font le choix de mutualiser leurs investissements en Cuma (coopérative d’utilisation de matériel agricole). La Cuma de Montvendre, dans la Drôme, vient d’acquérir récemment un déchaumeur mixte à 11 dents avec démontage rapide du pied des socs pour les équiper d’ailettes minces, avec disques et rouleau. Ce matériel est un compromis entre les différents matériels déjà présents sur la Cuma : chisel classique, déchaumeur à disques et covercrop. Par temps sec ou légèrement humide, ce déchaumeur mixte est largement privilégié puisque moins de plantes résistent à son passage (même l’ambroisie et les plantes à pivot) et car son rouleau permet une meilleure finition du déchaumage en préparant le lit de semis. Ce dernier outil est très prisé pour réaliser des faux semis, et préparer l’implantation des couverts végétaux par exemple. Néanmoins, lorsque la terre est plutôt argileuse et humide, le rouleau a tendance à coller et les adhérents de la Cuma choisissent donc plutôt le chisel sans rouleau. Pour Denis Barlatier et Eric Mounier, respectivement président et secrétaire de la Cuma de Montvendre, la Cuma « permet de mutualiser les risques financiers sur des outils innovants, inconnus ou utilisés ponctuellement » et précisent que « le coût facturé à l’adhérent utilisateur est de 12 €/ha, avec une quinzaine d’adhérents sur l’activité ‘’déchaumeur’’ ».
La Cuma des Coteaux (Drôme), quant à elle, a fait le choix d’investir dans un déchaumeur semi-porté repliable à disques décalés à l’avant et indépendants à l’arrière, avec rouleau, afin de permettre une bonne pénétration dans le sol et une bonne finition superficielle. Grâce aux roues, un tracteur de forte puissance n’est pas nécessaire. Ce matériel est utilisé pour le mulchage du maïs, les faux-semis, la destruction des Cipan, le travail superficiel… et même pour les semis de couverts végétaux ! Un semoir de 120 l se situe en effet à l’arrière du déchaumeur pour semer des couverts de petites graines à l’avant du rouleau (type moutarde, vesce…). Lilian Moulin, président de la Cuma des Coteaux, est satisfait de cet investissement : « On a plus besoin de désherber ! », et explique que la « Cuma permet de choisir du matériel en fonction de l’usage » et qu’elle permet « de choisir du matériel plus confortable et performant ».