L'étonnante cantine de la Ferme aux crocodiles

Premier site touristique de la Drôme avec plus de 300 000 visiteurs par an, la Ferme aux crocodiles de Pierrelatte abrite quelque 600 animaux dont 350 crocodiliens. Ces derniers côtoient des oiseaux, tortues, iguanes, varans, pythons et autres serpents. « Une population qui s'est densifiée et se porte bien », assure Hervé Perret, directeur adjoint de la Ferme aux crocodiles. Une équipe de soigneurs veille quotidiennement au bien-être des pensionnaires, en particulier à leur alimentation. Une tâche qui s'avère complexe.
La quantité de nourriture distribuée à l'ensemble des animaux ne se calcule pas en jours. En effet, le régime alimentaire de certaines espèces varie au cours de l'année. De plus, certaines ont une digestion plus favorable en période chaude, qui correspond à la période d'après-ponte. La « cuisine animalière » de la Ferme présente aux visiteurs les menus destinés aux animaux. C'est aussi le cas lors d'ateliers pédagogiques avec les écoliers. Et lors des nourrissages, un soigneur explique le comportement et la biologie des animaux « car le but n'est pas de faire de ce moment uniquement un spectacle mais bien d'apporter des connaissances », souligne le responsable.
Des crocodiles qui jeûnent
Pour les 350 crocodiles, deux nourrissages hebdomadaires sont effectués l'été, ce qui correspond à environ 500 kilos de viande de poulet par semaine. Mais chaque espèce fonctionne différemment. A Pierrelatte, la plupart sont des crocodiles du Nil. Dans leur milieu naturel, ils capturent leurs proies sans trop d'effort, par noyade. Et ils ne consomment la viande qu'une fois faisandée car ils aiment qu'elle ait du goût... La digestion est assez lente. Grâce à des masses graisseuses situées à la base de la queue, le crocodile peut faire régime pendant de nombreuses semaines, voire des mois et même une ou deux années pour certains animaux. « De décembre à mars, nous les faisons jeûner afin de les faire maigrir et suivre au plus près le régime alimentaire de leur milieu naturel d'origine », précise Hervé Perret.
Poulets, rats, lapins, poissons, fruits, légumes...
Le poulet est parfois remplacé par du chapon, « lors des grandes occasions », plaisante le responsable. Le fournisseur de la Ferme aux crocodiles s'approvisionne auprès d'abattoirs. « Il s'agit de pièces de viande déclassées du fait de défaut extérieur ou de date limite dépassée d'une journée », précise-t-il. Quant aux gavials du Gange, crocodiles originaires d'Inde et du Népal qui se nourrissent uniquement d'animaux aquatiques, leur menu est à base de poissons.
Pour les tortues, le régime alimentaire est essentiellement composé de fruits et légumes (endives et carottes) ainsi que de foin à volonté. Les tortues alligators, elles, consomment des truites et des gardons. Des salades composées (céleri, mâche, blettes fruits ou autres selon la saison) sont servies aux iguanes. Chez les oiseaux, des criquets jetés en vol font le bonheur des rolliers à ventre bleu. Le merle métallique préfère des vers de farine et l'ibis sacré des poussins et des souris... Quant aux serpents, les pythons réticulés avalent un gros lapin par mois et les anacondas verts un lapin moyen. Plus économes, les boas constricteurs se contentent seulement d'un rat tous les quinze jours. En voilà qui prennent soin de leur ligne...
Christophe Ledoux
Une nurserie vient d'éclore
La nurserie de la Ferme aux crocodiles vient d'être rénovée (200 000 euros d'investissement). Conçue tel un camp de base de chercheurs naturalistes, elle est désormais composée de quatre espaces : l'observatoire pour observer des bébés crocodiles et autres reptiles ; le bureau du professeur pour en savoir plus sur la reproduction des reptiles ; le cabinet de curiosités comprenant deux cents objets appartenant à un passionné des crocodiles ; et le bivouac pour découvrir d'autres thématiques. « Sur une centaine de mètres carrés, la nouvelle nurserie a été conçue selon une approche plus contemporaine, plus ludique et plus pédagogique », indique Hervé Perret.
Une rénovation thermique des bâtiments
L'énergie est fondamentale car à la base de la survie des animaux de la Ferme aux crocodiles. Sous les serres, la température moyenne annuelle est de 25 degrés, avec un fort taux d'humidité pour recréer un climat tropical. Pour économiser l'énergie et assurer un meilleur confort aux animaux (moins de variations de température), la rénovation thermique des bâtiments a débuté au printemps 2018. Après l'isolation de tous les murs et le changement des portes, le chantier consiste actuellement au remplacement de la toiture (1 hectare). Les travaux ont débuté par la plus grande serre (qui culmine à 10 mètres). Le verre est remplacé par des panneaux en polyuréthane d'une dizaine de centimètres d'épaisseur. Un investissement de plusieurs millions d'euros.