Gestion de l’eau : le PTGE sur les rails en vallée de la Drôme
Le 19 avril à Aouste-sur-Sye, a été réuni le tout premier comité de pilotage du PTGE en vallée de la Drôme. Objectif : préparer le territoire au changement climatique et lui assurer un développement harmonieux, dans le respect des équilibres entre besoins et ressources en eau.

Pays de Saillans et CC Val de Drôme) et du Département. ©S.S.-AD26
Les représentants de plus d’une quarantaine de structures étaient réunies le 19 avril à Aouste-sur-Sye pour le lancement du comité de pilotage du projet de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE) du bassin versant de la rivière Drôme. Autour de la table : des élus locaux, des représentants des usagers et des représentants de l’État.
Pour mémoire, la conduite de ce PTGE a été confiée à la commission locale de l’eau (CLE) de la rivière Drôme, présidée par le Loriolais Pierre Lespets. Créée en 1993, la CLE a pour missions l’élaboration, la révision et le suivi du schéma d’aménagement et de gestion des eaux (Sage). Sur ce bassin versant, le premier Sage - qui fut aussi le premier en France - date de 1997, le second de 2013 et le troisième est en cours d’élaboration. Ce dernier, baptisé « Sage Drôme 2050 », fixera de nouveaux objectifs d'utilisation, de mise en valeur et de protection quantitative et qualitative de la ressource en eau sur le territoire. Le PTGE sera en quelque sorte le bras armé de ce nouveau schéma. Il définira les actions opérationnelles nécessaires pour atteindre les objectifs du Sage.
Des efforts à accentuer
Thierry Devimeux, préfet de la Drôme, a résumé les enjeux cruciaux de ce PTGE. D’autant que les précédents objectifs, fixés par le Sage dans le cadre d’un plan de gestion de la ressource en eau (PGRE), n’ont pas été atteints, a-t-il rappelé. « Ce PGRE visait une réduction des prélèvements d’eau de 15 % tous usages confondus. L’agriculture a fait sa part du travail en particulier grâce à des actions structurantes de substitutions (extension de la réserve de Choméane, remontée de l’eau du Rhône vers Allex-Montoison...) Des efforts restent à poursuivre pour anticiper les baisses de débit et sécuriser l’irrigation de la zone de Crest Sud. Le bilan est malheureusement beaucoup moins favorable autour de l’eau potable qui a augmenté ses prélèvements de 28 % alors qu’on attendait une baisse de 15 %. Vous devez aller plus loin et plus vite pour ne pas être complètement dépassés par les conséquences du dérèglement climatique », a-t-il averti. S’adressant aux élus locaux, il les a invités à s’engager dans l’élaboration de ce PTGE pour accompagner les dynamiques territoriales. « Les ambitions de développement que vous portez ne peuvent se faire de manière déconnectée des ressources en eau (…) Le PTGE devra engager les débats et les prises de décision sur des sujets cruciaux : par exemple les modalités de répartition et l’arbitrage sur les volumes entre les usages humains, économiques mais aussi les besoins des milieux naturels », a-t-il affirmé.
Sobriété : quelles ambitions ?
Claire Petitjean, chargée de mission au syndicat mixte de la rivière Drôme (SMRD), a présenté la feuille de route de ce futur PTGE, validée par la CLE en décembre dernier. Dans le cadre de l’écriture du nouveau Sage et du programme d’actions PTGE, quatre points clés devront d’abord être travaillés collectivement. Primo, celui de la sobriété, définie comme prioritaire, mais avec quelles ambitions ? Secundo, celui de l’amélioration de la résilience des milieux et des sols pour réduire la vulnérabilité au changement climatique. Tertio, celui du renouvellement des règles de partage de la ressource en eau entre usages. Et quarto, celui de la création de stockages supplémentaires de l’eau. « Toutes ces questions sont entre les mains des acteurs pour les prochaines réunions PTGE », a déclaré la chargée de mission. Pierre Lespect a ainsi annoncé que le comité de pilotage PTGE se réunirait de nouveau le 12 novembre avec un focus sur les usages agricoles de l’eau, notamment les liens entre les projets alimentaires de territoires (PAT) et la répartition des volumes par l’organisme unique de gestion de l’eau (OUGC).
Sophie Sabot

Ils ont dit
Jean-Pierre Royannez, président de la chambre d’agriculture et de l’OUGC 26 : « Les agriculteurs sur ce secteur seront au rendez-vous mais pour agir, pas pour subir. On parle de revoir le partage de l’eau mais, aujourd’hui, il faut aussi mobiliser de la ressource. De l’eau, il en tombe. Il faut la stocker sur l’ensemble du territoire en privilégiant l’infiltration mais on ne doit rien s’interdire sur les autres méthodes pour la retenir. »
Jean Serret, président de la communauté de communes du Val de Drôme (CCVD) : « Quand vous imaginez que nous ne sommes pas capables de stocker 20 millions de m³ alors que dernièrement il est passé en dix jours 400 millions de m³ au pont de Crest, je trouve que nous ne sommes pas bons et que nous avons une bonne marge de progrès à faire sur notre territoire. »
3 à 5 millions de m³
Sur la vallée de la Drôme, à l’horizon 2050, il faudrait entre 3 et 5 millions de m³ d’eau supplémentaires pour satisfaire les besoins annuels dont 1,2 Mm³ pour l’eau potable et 2 à 4 Mm³ pour l’irrigation. Cette estimation dans le cadre des projections du Sage Drôme 2050 tient compte d’une élévation de température de 1,6°C, d’une augmentation de l’évapotranspiration de 60 cm et d’une baisse du débit de la rivière entre juin et septembre de 20 à 30 %. Elle s’appuie par ailleurs sur une croissance démographique estimée de 1 % par an sur le territoire du Sage, une croissance touristique de 1,75 % par an, des rendements stables des réseaux d’eau, une consommation d’eau par l’industrie et l’artisanat stable et un assolement irrigué constant mais un besoin en eau des plantes en augmentation de 20 à 35 %.
Petite histoire des PTGE…
Le concept de projet de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE) a été défini pour la première fois dans l’instruction du gouvernement du 4 juin 2015. Cette définition faisait suite à la conférence environnementale de septembre 2013, qui conditionnait la levée du moratoire sur le financement des stockages par les agences de l’eau à leur intégration dans des projets territoriaux.
Le 7 mai 2019, une nouvelle instruction du gouvernement a abrogé celle de 2015. Le PTGE est devenu une démarche plus globale pour lutter contre la sécheresse et les effets du changement climatique. Il est pensé sur un périmètre cohérent d’un point de vue hydrologique ou hydrogéologique et doit aboutir à un engagement de l’ensemble des usagers d’un territoire (eau potable, agriculture, industries, énergie, pêches, usages récréatifs, etc.). Objectif : atteindre, dans la durée, un équilibre entre besoins et ressources disponibles en respectant la bonne fonctionnalité des écosystèmes aquatiques.
En Drôme, plusieurs PTGE ont démarré : en vallée de la Drôme, sur le bassin Roubion-Jabron… D’autres sont en cours d’installation sur la Galaure, la Drôme des collines, la plaine de Valence.