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Oléiculture

Ferme Haas Maury : un lieu où les olives sont choyées

Apiculteurs sédentaires sur la commune de Venterol, Julie Maury et Charles Haas ont aussi investi les terres familiales pour cultiver des oliviers Tanche et produire la célèbre olive AOP de Nyons. Malheureusement, les prévisions pour la récolte 2024 ne sont pas à la hauteur des attentes.

Ferme Haas Maury : un lieu où les olives sont choyées
ulie Maury et Charles Haas sont installés depuis vingt-quatre ans. ©AP-Apasec

La huitième génération. Julie Maury suit les traces familiales laissées par ses ancêtres depuis 1834, sur les terres de Venterol. Titulaire d’un BTS agricole gestion et protection de la nature obtenu à la MFR de Mondy à Bourg-de-Péage, Julie Maury s’est installée en 2000 avec son compagnon, Charles Haas. « Quand mon beau-père est parti à la retraite, nous avions l’opportunité de rentrer dans le Gaec qu’il composait avec son associé. Mais nous avons préféré créer notre propre structure », se souvient l’agriculteur, obtenteur d’un DUT de mesures physiques. 
« Historiquement, la ferme était en polyculture élevage (vignes, céréales, lavandin, chèvres, brebis, cochons, etc.). Lorsque mon père a repris l’exploitation, il a arrêté l’élevage pour se consacrer aux abricotiers, plantés par mon grand-père dans les années 1920, et à la vigne. Aujourd’hui, c’est un fermier qui mène la majeure partie de nos terres puisque nous ne cultivons plus qu’une petite surface d’oliviers (450 arbres) sur un hectare et demi », raconte Julie Maury. En effet, dans les années 1990, alors que les cultures d’abricots commencent à peiner, le couple participe à la plantation d’oliviers, sans savoir qu’un jour il en serait responsable. « Nous avons commencé notre activité agricole avec une centaine de ruches, grâce à des expériences passées chez des apiculteurs. Nous étions alors cotisants solidaires et avons intégré, progressivement, les récoltes d’olives de table AOP Nyons à notre métier », poursuit Charles Haas. 

Une activité apicole complémentaire

Alors qu’ils récoltaient entre 1,5 et 3 tonnes de miel par an, ils ont fait le choix progressif de diminuer les ruches (une cinquantaine aujourd’hui, ndlr) pour se consacrer plus particulièrement aux oliviers. « Pendant près de vingt ans, nous nous étions aussi spécialisés dans la production de gelée royale, un produit à forte valeur ajoutée. Cela nécessitait beaucoup d’investissement humain, au printemps. Nous avons donc fait le choix, il y a trois ans, d’arrêter cette production afin d’alléger notre temps de travail ».
Ainsi, le couple d’agriculteurs - installé depuis 2019 en entreprise individuelle suite à une demande de dotation jeunes agriculteurs (DJA) - se recentre principalement sur la culture d’olives AOP. « Nous avons en tête le désir de continuer de progresser en termes de rendement, en apportant un soin tout particulier à nos arbres.  Nous fertilisons nos vergers avec 10 à 15 tonnes de “grignon” par an. Il s’agit du résidu de la presse des olives que l’on trouve dans les moulins, et c’est un fertilisant organique naturel. Cependant, il est de plus en plus difficile à trouver car il est également utilisé comme combustible. C’est un déchet local aujourd’hui mal valorisé », regrette les deux agriculteurs. Un complément minéral est toutefois nécessaire pour une fertilisation complète des oliviers. 

Une exploitation résiliente face au manque d’eau

Pour répondre aux sécheresses successives du sud de la Drôme de ces dernières années, les oléiculteurs ont fait le choix de réhabiliter une vieille réserve d’eau de 2 000 m³, construite il y a près de 300 ans et comblée depuis par les crues passées. « Cette réserve d’eau collinaire nous permet aujourd’hui d’irriguer près de 300 arbres de notre production, par micro-aspersion. Depuis, nous avons créé un deuxième lac en vue de renforcer notre résilience face aux épisodes successifs de sécheresse, qui n’est aujourd’hui pas en fonction faute de fuites », indique Charles Haas. 
Toujours dans un souci de recherche de qualité, la Ferme Haas Maury s’attache à récolter l’ensemble de ses olives à la main. « Nous embauchons un salarié lors des périodes de taille et de récolte », indique Charles Haas. Les fruits sont ensuite soit conditionnés, soit pressés par le Moulin Jouve de Venterol pour en faire de l’huile. « Nous vendons principalement nos produits à la ferme mais aussi sur les marchés de Nyons et de Vaison-La-Romaine depuis de nombreuses années. Cela nous permet d’être au contact de la clientèle, de lui expliquer notre métier et d’assurer la qualité de nos produits. Aussi, nous travaillons avec quelques magasins, épiceries fines, fromageries et supermarchés locaux. Nous envoyons également quelques colis chez des clients installés à Lyon, Paris, ou encore Strasbourg, explique l’agricultrice. Finalement, le conditionnement de nos produits mais aussi la vente constituent les trois quarts de notre activité ».

Un prévisionnel de récolte en demi-teinte

Toutefois, les ventes risquent d’être un peu moins satisfaisantes l’an prochain : « Nous faisons face à une saison moyenne, où les prévisions seraient plutôt comprises entre 50 à 70 % des récoltes habituelles qui sont de six tonnes en moyenne, annonce l’oléiculteur. Nous n’avons pas d’explications pour l’instant, même si nous n’écartons pas l’aspect climatique. Pour nous, ce n’est pas une question d’alternance car nous taillons nos arbres chaque année pour garantir une qualité et un calibre intéressants. Mais dans le secteur, la situation est à peu près la même partout : la floraison a été plus faible, il y a pas mal de coulures. C’est la première année que nous sommes confrontés à ça », poursuit-il. Et son épouse de conclure : « Je suis très attachée à la ferme, au lieu, à mes racines. Aujourd’hui, notre seul vrai projet est de maintenir notre activité. Nous avons deux enfants qui font des études de commerce et d’ingénierie. Si l’un d’entre eux souhaitait s’installer sur la ferme, alors nous réfléchirons à d’autres projets, comme celui de créer un atelier de conserverie sur place. Mais pour l’instant, la question ne se pose pas, ils sont plus attirés par la ville (rires) ».

Amandine Priolet

Syndicat des olives de Nyons

« Une récolte plus hétérogène que la précédente »

La récolte des olives de Nyons, l’an dernier, avait été historique autant d’un point de vue quantitatif que qualitatif. « Cette année, elle sera a priori plus hétérogène et nous retrouverons des volumes plus classiques, estime Patrick Floret, président du syndicat des olives de Nyons. Nous n’avons pas eu de conditions optimales au moment de la floraison, avec de la pluie. Certains oléiculteurs nous ont fait remonter que les arbres avaient perdu pas mal de fleurs à cause de cela. Ainsi, certains vergers seront moins chargés que d’ordinaire…, poursuit-il. Toutefois, la pluie tombée autour du 10 septembre aura été plus que bénéfique pour les arbres, jusqu’alors en stress hydrique. Cette pluie a permis de faire grossir les olives et de relancer la végétation. » Les récoltes des olives à huile devraient débuter la première semaine de novembre, alors qu’il faudra attendre début décembre pour cueillir les olives de table. Au niveau de la commercialisation, « les ventes, en majorité locales grâce au tourisme, ont connu un petit fléchissement en juillet, avant une belle reprise en août, selon les échos des oléiculteurs et des mouliniers », conclut Patrick Floret. 
A.P.