Chambre d'agriculture : améliorer le revenu des agriculteurs et simplifier
Réunis en session, les élus de la chambre d'agriculture de la Drôme ont adopté plusieurs motions dont une portant sur la simplification et le maintien des revenus et une autre sur l'éligibilité des surfaces pastorales ligneuses.

En ouvrant la session de la chambre d'agriculture de la Drôme, le 12 mars à Étoile-sur-Rhône, son président, Jean-Pierre Royannez, a rendu un vibrant hommage à la mémoire de Didier Beynet, membre du bureau, décédé le 11 mars. Une minute de silence a été observée suivie d'applaudissements nourris.
Puis l'actualité a repris le pas. Jean-Pierre Royannez a rappelé les doléances du monde agricole suite aux actions de blocage menées dernièrement. « La colère s'est exprimée pour réclamer une simplification des réglementations en agriculture et pour des revenus décents », a-t-il dit, avant d'ajouter qu'un document de sept pages, listant les revendications de la profession agricole, avait été remis au préfet le 7 février. « Des premières réponses ont été apportées le 6 mars mais elles sont loin d'être complètes », a fait remarquer le président de la chambre d'agriculture. Des avancées ont été obtenues sur les volumes prélevables en Nord-Drôme et sur les projets de retenues collinaires. « Trois à quatre pourraient aboutir sur les neuf projets qui avaient été retoqués ces dernières années, a-t-il indiqué. La machine administrative semble s'être dégrippée mais pour en avoir la certitude, nous voulons un engagement écrit de la volonté du préfet. »
Des évolutions attendues de pied ferme
Les élus de la chambre d'agriculture ont ensuite adopté, à l'unanimité, une motion demandant à l’État d'intervenir dans les meilleurs délais pour que des évolutions soient apportées en termes d'amélioration du revenu des agriculteurs et de simplification. Il s'agit, entre autres, de faciliter les procédures de création/modification des entreprises en rendant opérationnelle la plateforme INPI(1), d'améliorer et simplifier les procédures de télédéclaration (notamment celles-liées aux mesures « loups »), de simplifier le travail des OUGC(2), d'éviter les lourdes dépenses que constituent les études de volumes prélevables ; ou encore d'unifier les zonages faune, flore et sol et de mettre fin à la surtransposition des textes européens dans la réglementation nationale… Les élus consulaires demandent également l'arrêt des négociations d'accords de libre échange avec des pays tiers ne respectant pas les critères de production français, un contrôle renforcé de l’État pour l'application des lois Égalim, le respect du mécanisme permettant de bâtir chronologiquement le prix agricole en marche avant…
« Arrêter de stigmatiser les territoires pastoraux »
Les membres élus de la chambre d'agriculture de la Drôme réunis en session le 12 mars à Étoile-sur-Rhône. ©CL-AD26
Par ailleurs, les membres de la chambre d'agriculture contestent l'introduction, en 2023, d'une nouvelle mécanique de plafonnement des surfaces ligneuses éligibles aux aides surfaciques du premier pilier de la Pac. Ils pointent une « stigmatisation des territoires pastoraux » et « l'iniquité des modes de calcul du chargement ». À l'unanimité, ils ont adopté une motion pour réclamer : d'une part, deux années blanches (2023-2024) dans l'application du plafonnement des surfaces ligneuses (SPL, CAE, CEE)(3) selon un critère de chargement plancher de 0,2 UGB/h ; d'autre part, la suppression du critère de « chargement minimum » pour l'ensemble des surfaces ligneuses et du critère cumulatif d' « absence d'enfrichement » pour les SPL. 99 dossiers sont concernés en Drôme par la rétropolation, pour 656 ha. « L'impact a pu être réduit à ce jour à 522 ha suite au recalcul manuel du taux de chargement », a précisé Manon Courias, cheffe du service agriculture à la DDT 26. « Nous avions plaidé pour un taux de chargement à 0,12 pour les montagnes sèches », a indiqué Yvan Jarnias, président de Jeunes agriculteurs de la Drôme.
Aides Pac, fonds d'urgence...
Autre point abordé lors de la session de la chambre d'agriculture de la Drôme, le versement des aides Pac promis pour le 15 mars par le Premier ministre. En fait, la promesse de Gabriel Attal ne concerne « que les aides ayant fait l'objet d'un acompte en octobre », a précisé Manon Courias. Le ministère de l'Agriculture a précisé, le 12 mars, qu'il s'agit des DPB(4), ICHN(5) et des aides couplées animales. Concernant les MAEC(6) et les aides à la bio, « le paiement a débuté en mars et va se poursuivre au cours du premier semestre ».
Parmi les sujets d'actualité, Jean-Pierre Royannez a jugé les avancées du nouveau Plan loup « bien insuffisantes ». Idem avec l'enveloppe du fonds d'urgence à la viticulture : « L'enveloppe attribuée à la Drôme est de 1,83 M€. Il faudrait au moins 3 M€ », a indiqué Sandrine Roussin, vice-présidente de la chambre d'agriculture. Une revalorisation est attendue, ce qui permettrait de lancer la procédure de demande d'aide. Quant au nouveau fonds d'urgence à la bio, à payer avant le 30 juin, « à ce jour, il n'est pas encore ouvert, a indiqué Manon Courias le 12 mars. Dès son ouverture, une vaste communication sera faite auprès des agriculteurs. » Les difficultés qui touchent l'ensemble de la filière PPAM ont aussi été évoquées. « Il faut tout remettre à plat dans la filière, permettre des arrachages massifs, sinon on en a pour trois ans minimum pour remettre le marché sur de bons rails », a dit Alain Aubanel, élu chambre d'agriculture et président de PPAM de France.
La tenue de permanences « multi-administrations » pour les agriculteurs en difficulté a été rappelée, tant par Manon Courias, au nom de la DDT, que par Guy Péran, administrateur de la MSA Ardèche-Drôme-Loire. Une fois de plus, cette session de la chambre d'agriculture a été marquée par une actualité dense et lourde.
Christophe Ledoux
(1) INPI : Institut national de la propriété industrielle.
(2) OUGC : Organisme unique de gestion collective de l'eau.
(3) SPL : Surfaces pastorales ligneuses ; CEE : chênaies ; CAE : châtaigneraies.
(4) DPB : Droit au paiement de base.
(5) ICHN : Indemnité compensatoire de handicaps naturels.
(6) MAEC : Mesures agro-environnementales et climatiques.
Prospect'Aura 2040 : construire des scénarios
Les chambres d'agriculture d'Auvergne-Rhône-Alpes travaillent depuis l'automne dernier à anticiper les changements futurs qui pourraient impacter le monde agricole. Baptisé Prospect'Aura 2040, la réflexion a pour but d'élaborer des hypothèses afin de construire et expertiser des scénarios à horizon 2040. En session de la chambre d'agriculture de la Drôme, l'avancée des travaux a été présentée. À cette heure, elle se résume à l'élaboration d'hypothèses et l'ensemble apparaît assez complexe. Des scénarios devraient être validés en septembre en vue d'une présentation lors du Sommet de l'élevage, en octobre.
C.L.
Énergies renouvelables : vigilance sur les démarchages
Depuis la promulgation de la loi Aper en mars 2023, laquelle vise à déployer massivement les énergies renouvelables sur le territoire français, un décret est attendu pour élaborer un document cadre. Celui-ci a pour but de préciser les surfaces agricoles et forestières ouvertes aux énergies renouvelables ainsi que les conditions d’implantation, sachant que seules peuvent être identifiées des surfaces réputées incultes ou non cultivées depuis une durée minimale de dix ans. Faute de décret, des opérateurs démarchent actuellement les agriculteurs avec des propositions jugées parfois hasardeuses par la chambre d'agriculture. En session, il a été rappelé les positions de la profession agricole drômoises pour encadrer l'installation de surfaces photovoltaïques : priorité sur bâtiments et surfaces dégradées ou artificialisées ; hors de tout espace ayant un potentiel agricole ou forestier. En ce qui concerne l'agrivoltaïsme : uniquement à titre expérimental ou pour les projets labellisés Afnor, « une position pouvant évoluer au grès de la capitalisation des expérimentations ».
C.L.
Assurance récolte : premier bilan
En session chambre d'agriculture de la Drôme, un premier bilan de la nouvelle assurance récolte a été fait. Onze missions d'enquête ou tours de plaine ont été réalisés, a indiqué Manon Courias, cheffe du service agriculture à la DDT. Au 8 mars, 51 dossiers liés à des dégâts de grêle de 2023 avaient été enregistrés. Pour 2024, une nouvelle plateforme de signalements pour les pertes de récolte est mise en œuvre avec davantage de simplification dans les informations demandées mais avec une obligation de signalement dans les 72 heures après sinistre. Caroline Brenas, pour Pacifica, a indiqué qu'il est encore possible de souscrire (jusqu'au 15 avril) à l'assurance récolte en grandes cultures et prairies.
Versement de la DJA : « Tout est en train de se régulariser »

Autre sujet abordé en session de la chambre d'agriculture : le renouvellement des générations, qualifié d'« enjeu majeur » par Stéphanie Oliveira, élue consulaire en charge de ce dossier. À ses côtés, plusieurs conseillers ont donné des chiffres (170 installations par an dont une soixantaine avec DJA...), présenté les actions menées en matière d'accompagnement des porteurs de projets et des cédants, de formation mais aussi les évolutions en cours, notamment celles prévues dans le projet de loi d’orientation agricole. S'agissant du retard de versement des dotations jeune agriculteur (DJA), dont la gestion est confiée depuis 2023 à la Région, « tout est en train de se régulariser », a assuré Patricia Picard, conseillère régionale. Nous mettons une grosse pression sur l'Agence de services et de paiement (ASP) pour faire sauter les verrous. » Sur les 270 demandes de DJA en attente, plus de 70 ont été transmises à l'ASP début mars, a-t-il été indiqué.