Allons faire un tour à la bataille de Gergovie

Nous sommes en 52 avant J.C., Jules César mène une guerre de conquête intraitable en Gaule pour asseoir son pouvoir au Sénat à Rome. Il gagne Gergovie et en prend possession au fil des batailles. Une soixantaine de peuplades habitent alors ce territoire. Les Arvernes sont parmi les plus puissants grâce à la richesse de leurs sols volcaniques assurant d'abondantes récoltes. C'est d'ailleurs l'un de ses jeunes chefs arvernes qui mène la fronde contre César. Vercingétorix attire l'empereur romain et ses six légions (36 000 hommes) dans ses terres qu'il connaît bien. Chaque armée prend place, les Gaulois sur le replat de l'oppidum (forteresse gauloise) de Gergovie et les Romains sur les collines alentour. Les troupes gauloises, unies par Vercingétorix, vont alors établir un stratagème et infliger l'une des plus grandes et humiliantes défaites à Jules César. Frédéric Nancel, directeur du musée archéologique de la Bataille de Gergovie en est certain : « la guerre des Gaules aurait pu prendre fin ici, à Gergovie. »
Un musée entièrement dédié
Le plateau de Gergovie, situé à 15 km au sud de Clermont-Ferrand, est bien connu des Puydomois. Cette formation géologique issue d'une éruption volcanique offre un panorama à 360° sur toute la plaine environnante, jusqu'à la chaîne des puys. Pas étonnant qu'il y a 2 000 ans, les gaulois arvernes aient choisi ce lieu pour y bâtir un imposant oppidum contre lequel Jules César verra se briser son fameux « veni, vidi, vici1 ». Le musée archéologique de la bataille de Gergovie, ouvert en octobre dernier, retrace dans son intégralité le pan de cette histoire, « fierté du peuple arverne ».
Le bâtiment d'une surface de plus de 1 200 m², se fond parfaitement dans le paysage. Semi-enterré, il s'avance tel un belvédère pour offrir aux visiteurs une vue imprenable. « L'idée était d'avoir à la fois le point de vue des assiégés et des assiégeants », explique Frédéric Nancel. Depuis la grande salle vitrée du musée, il est facile d'imaginer les légions romaines en pleine ascension. D'en bas, de l'extérieur par le chemin de randonnée menant au plateau depuis le village de Gergovie, le bâtiment s'érige tel un rempart. « J'aurais été Romain, je ne me serais pas aventuré plus loin. »
Quatre ans de travaux
L'effet de style est plus que réussi. Outre son positionnement, sa couleur et sa forme font corps avec le paysage. « Quatre ans ont été nécessaires à l'édification de ce musée. L'État, la Région, l'Union européenne, le Conseil départemental, Mond'Arverne Communauté, l'Inrap2... ont travaillé ensemble pour concevoir un musée qui raconte l'histoire de la bataille mais aussi comment le paysage, la géologie, la nature ont eu une importance capitale dans cette victoire. » À l'intérieur, tout a été également pensé pour conduire le visiteur deux mille ans en arrière.
Voyage historique ludique
Oublié le musée sombre et poussiéreux ; dans celui de Gergovie, lumière, sobriété et interactivité ont pris possession des lieux. Divisé en plusieurs « îlots », chacun revient en détail sur la vie gauloise, les personnalités de Vercingétorix et César, les prémices et préparatifs de la bataille et, bien sûr, la victoire ! « La quasi-totalité des objets exposés ici ont été découverts par les archéologues sur le plateau et dans les sites environnants. » C'est d'ailleurs une vitrine à l'apparence interminable qui court le long du musée. Plus de 250 poteries, vaisselles, armes, bijoux, pièces de monnaies nous montrent à quel point nos ancêtres arvernes étaient loin d'être des barbares. « Ils étaient soucieux de leur apparence. Ils aimaient prendre soin d'eux. » Même dans la bataille, l'équipement du soldat gaulois, comme celui du romain, était aussi pratique que beau. On apprend dans ce musée que les similitudes entre les uniformes ont joué un rôle non négligeable. « La plus grande force de Vercingétorix était d'être parvenu à réunifier les peuples gaulois. César ne s'attendait pas à cela surtout que certains peuples gaulois, romanisés, se battaient avec lui. Au cours de la bataille, il y a donc eu une confusion monstrueuse du côté romain. » Une scénographie filmée mettant en scène Jules César, le chef gaulois un soldat romain et un combattant gaulois, retrace d'ailleurs cette confusion intentionnelle.
Mélodie Comte
3 En pratique : Ouvert du mercredi
au dimanche de 11 h à 18 h.
1. Je suis venu, j'ai vu et j'ai vaincu.
2. Institut national de recherches archéologiques préventives.
Zoom / Spectacle audiovisuel immersif
Outre la vue, l’incroyable immortalité des objets, les reconstitutions, c’est surtout la bataille en trois dimensions qui coupe le souffle. Dans une pseudo-salle de cinéma, le visiteur prend place devant une scène sur laquelle la topographie du plateau de Gergovie, et des environs, est reconstituée. Commence alors le saut dans le temps. Sur cette maquette monumentale sont projetées des images de synthèse retraçant toutes les étapes de la bataille, de l’arrivée de Vercingétorix à la reddition de César. L’écran géant en fond immerge encore davantage le spectateur. « Nous avons intégré l’art à l’histoire pour une immersion totale, une expérience complète.» Le musée de la bataille de Gergovie contient autant d’objets millénaires que de nouvelles technologies. « Les tablettes tactiles, l’écran géant, les films… sont des supports ludiques et qui surtout peuvent évoluer facilement. Les archéologues découvrent des choses tous les jours. Peut-être demain apprendrons-nous quelque chose qui remettra totalement en cause notre vision actuelle de la bataille. ». D’ici les vacances de Noël, le musée sera complet avec en plus de l’exposition permanente, une exposition temporaire, une cafétéria, une boutique…Gergovie, capitale Arverne
Situé à 750 mètres d’altitude et difficilement accessible, le plateau de Gergovie était une place forte naturelle toute choisie. Les Arvernes, peuple gaulois qui occupait le territoire s’approchant de l’Auvergne actuelle, ne s’y sont pas trompés et ont fait de l’oppidum de Gergovie leur capitale pendant près de 70 ans. Sur le plateau de Gergovie, on retrouve ainsi de nombreux vestiges de l’occupation gauloise puis galloromaine. Les visiteurs peuvent voir les traces d’un ancien sanctuaire, de remparts, de portes d’entrée, d’un quartier artisanal ou encore de chemins et places pavés. Tandis que partout des débris d’amphores rappellent la force du commerce qui existait entre Gergovie, les autres peuples gaulois et Rome. La cité a continué de se développer jusqu’au début de notre ère avant de laisser sa place de capitale à Augustonemetum, l’actuelle Clermont-Ferrand, située à une quinzaine de kilomètres.