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Des alpages aux pistes

Justine Sibué, agricultrice et monitrice de ski

Justine Sibué est une jeune agricultrice passionnée. Salariée aux côtés de son père sur la ferme familiale, la ferme du Poingt, perchée à 1 600 mètres d’altitude à Saint-Jean-d’Arves (Savoie), l’élevage est sa vocation depuis sa plus tendre enfance. Au petit matin, elle enfile avec joie ses bottes pour la traite journalière : quelques heures plus tard, elle les troque contre une paire de skis, puisque la jeune femme de 22 ans est également monitrice École française du ski (ESF) sur le domaine de Saint-Sorlin-d’Arves – Les Sybelles. Portrait.

Justine Sibué, agricultrice et monitrice de ski
©Justine_Sibué
ustine Sibué, agricultrice et monitrice de ski à Saint-Jean-d’Arves.

Avec 180 hectares, 32 vaches tarentaises et abondances, une centaine de brebis, 25 chèvres, deux chevaux et un âne, les journées de Justine Sibué sont déjà bien chargées. Un rythme qu’elle affectionne tout particulièrement, tant la jeune femme aime être en mouvement permanent : « J’adore être à l’extérieur, c’est quelque chose qui compte beaucoup pour moi. Rester dans un bureau me serait impossible, avoue-t-elle. J’aime bien évidemment être au contact des animaux, m’en occuper, tout particulièrement quand il y a des naissances. J’ai aussi une passion pour les chiens, alors j’en ai toujours un à mes côtés », explique-t-elle. Au-delà de la ferme, la jeune agricultrice entretient une relation singulière avec sa montagne. « Je fais souvent des marches, puisque nous avons deux montagnes, l’une pour les génisses, l’autre pour les moutons. Ce sont des paysages qui comptent pour moi, dont je ne me lasse pas. » 

Un rythme effréné

Un programme bien rodé, pas d’accalmie, Justine Sibué tient à ses journées denses et riches en émotion. « Je me lève le matin pour partir à la traite des vaches, à 6 h. Je me dirige ensuite vers mon deuxième métier, le ski. Je finis à la ferme vers 8 h15, j’ai une demi-heure pour prendre ma douche et me changer. Puis je pars sur les pistes. J’y passe la journée avant de retourner à la traite des vaches et tout ce qui s’ensuit : donner le foin et les croquettes. Enfin, nous nous occupons des moutons », explique la jeune femme. Les journées de Justine s’achèvent alors aux alentours de 21 h 30. Son choix de vie étonne souvent son entourage qui s’interroge comment la jeune femme fait « pour tenir des journées pareilles, surtout les jeunes de mon âge. Mais pour moi c’est un rythme de vie, celui que j’ai presque toujours eu, alors je le trouve normal. Dans dix ans, je me vois toujours faire la même chose, vivre de mes deux passions, reprendre la ferme de mon père avec un salarié et continuer les cours de ski », assure-t-elle avec détermination. 

L’amour de la montagne

Si la jeune femme adore ses deux métiers, c’est aussi parce que l’univers montagnard a toujours fait partie d’elle. « Le ski, j’en fais depuis toute petite. Ce n’est pas le cas de ma famille, qui ne skie pas beaucoup, mais pour ma part j’ai été rapidement inscrite au ski club, très populaire dans nos territoires ». De progression en progression, Justine Sibué atteint un niveau qui lui permet de donner des cours, « une activité » qu’elle exerce depuis trois années. Elle continue de progresser afin de monter en niveau et obtenir d’autres diplômes. Actuellement, la skieuse a en charge des niveaux allant des Piou-Piou (de 3 à 5 ans) jusqu’à la deuxième étoile, mais également les adultes débutants et intermédiaires. « Il faut avoir un peu de patience, comme avec tout, mais c’est une activité très enrichissante. Le fait d’être jeune et d’enseigner à des plus jeunes est également un plus, ils sont contents de voir des profils de moniteurs variés », explique-t-elle. Chaque jour, des groupes de jeunes lui sont attribués, la jeune femme enchaîne donc trois groupes sur des tranches horaires de deux heures, de 9 h à 17 h. Et comme elle aime être au cœur de ses montagnes, Justine Sibué attend chaque année, avec grande impatience, la saison des alpages. « Cela commence en juin ou mi-juin. C’est la période que je préfère, c’est dans ces moments-là que je réalise que je ne voudrais rien changer à ma vie, je n’attends que ça. Voir monter les vaches en altitude, admirer le paysage, me balader, savoir que ce moment signe le début du travail à l’extérieur pour tout l’été… c’est ma période préférée », relate la jeune savoyarde. 

Un modèle inspirant 

C’est sans demander l’avis de qui que ce soit que Justine Sibué mène sa vie avec passion. « J’aimerais dire aux jeunes, surtout aux jeunes filles, que le métier d’agricultrice est accessible à toutes, même en double activité. Les jeunes femmes, les femmes en général, ne sont pas toujours assez valorisées dans le monde agricole, qui reste encore majoritairement masculin. Mais pour moi ça marche très bien, alors pourquoi pas les autres ? », affirme-t-elle. Une force de caractère qu’elle transmet aux jeunes qui visitent l’exploitation, puisque Justine Sibué a l’envie de transmettre. « Transmettre, partager, s’entraider, c’est ce que nous faisons entre agriculteurs, surtout en montagne », conclut-elle. 

Charlotte Bayon

Médaille d’or  pour la ferme  du Poingt

La ferme du Poingt produit du lait livré à la coopérative laitière de la vallée des Arves, par le biais d’un système tout particulier : un téléphérique à lait, qui transporte des bidons de 40 litres à travers la montagne. « Notre route est peu accessible en hiver, alors ce système est très pratique pour les livraisons », explique Justine Sibué. Leur travail a été reconnu, puisque cette année le beaufort produit a été décoré d’une médaille d’or à Paris. L’AOP beaufort a choisi la jeune femme comme visage de ses campagnes de communication. En tant qu’égérie, Justine Sibué incarne la passion de la montagne, une agricultrice ancrée dans son terroir et pleine de dynamisme.