INNOVATION
EARL Clair Fruits: des pionniers de l’agrivoltaïsme sur cerisiers

À Loriol-sur-Drôme, l’EARL Clair Fruits vient de planter trois hectares de cerisiers sous persiennes solaires. Une installation agrivoltaïque pensée avec l’entreprise Sun’Agri.

EARL Clair Fruits: des pionniers de l’agrivoltaïsme sur cerisiers
L’EARL Clair Fruits vient de planter 3 ha de cerisiers sous des persiennes solaires mobiles. L’installation agrivoltaïque est gérée par la société Sun’Agri en partenariat avec un investisseur privé. ©AD26-S.S.

Christian et Adrien Clair, père et fils associés au sein de l’EARL Clair Fruits, viennent d’achever l’implantation d’un verger de trois hectares de cerisiers sous persiennes solaires mobiles. L’installation, entourée de hautes haies de cyprès, est à peine visible dans la plaine de Loriol, non loin de l’autoroute A7. Ce projet agrivoltaïque a été mené avec l’entreprise Sun’Agri.

Un projet né sur le salon Tech&Bio

C’est une rencontre fortuite sur le salon Tech&Bio en 2019 qui les a lancés dans l’aventure. « Avec mon père, nous avions un objectif bien précis : trouver une réponse au changement climatique pour nos vergers, notamment en les protégeant de la grêle ou des excès de soleil. Nous avions pensé aux filets paragrêle mais nous n’avions ni les machines, ni la main-d’œuvre, ni les capacités financières pour ce type d’équipement », se souvient Adrien Clair. C’est une « petite maquette » sur le stand de Sun’Agri qui va attirer leur attention. « Nous avons échangé longuement avec leur représentant commercial sur ce concept d’agrivoltaïsme, l’idée nous a tout de suite plu », poursuit le jeune homme. D’autant qu’elle ne générait aucun investissement pour l’exploitation. L’installation agrivoltaïque est portée par un investisseur privé dont l’unique interlocuteur est la société Sun’Agri. « Nous ne payons rien et nous ne recevons rien sur la production d’électricité mais nous bénéficions de la protection des persiennes sur nos vergers », précise Adrien Clair. Sun’Agri gère les paramètres de pilotage de l’installation et s’engage à garantir « un ensoleillement adapté à la culture et à ses objectifs de production ».

3 ha plantés sous persiennes agrivoltaïques

L’EARL Clair Fruits fait partie des pionniers sur ce type d’installation. Peu d’exploitations ont franchi le pas. D’une part parce que le contexte réglementaire entourant l’agrivoltaïsme est particulièrement complexe. D’autre part parce que la profession arboricole attend des références solides sur ce nouveau type de vergers, notamment celles qui seront fournies par le dispositif expérimental de la Sefra* à Étoile-sur-Rhône, mis en service en 2022, sur abricots, pêches et cerises. « Nous avons fait le choix de la cerise parce que nous avions des vergers vieillissants à renouveler. Nous savions aussi que la cerise viendrait à maturité, même sous les panneaux. Nous avions un doute pour l’abricot », confie Adrien Clair. Le projet a été monté en deux étapes : une première installation « expérimentale » de 2 000 m² début 2022 sur un verger de vingt ans (variétés primulat, burlat, bigalise, folfer) puis la pose de 3 ha de persiennes durant l’hiver 2022-2023 sous lesquelles ont été plantés dans la foulée 3 ha de cerisiers. Dans les deux cas, les exploitants ont maintenu des surfaces témoins, non couvertes.

« Plus fermes et plus brillantes »

« Sur la partie expérimentale, en 2022, nous avons récolté les cerises sous persiennes avec deux ou trois jours de retard par rapport au témoin mais elles étaient plus fermes, plus brillantes aussi. En revanche, aucun changement sur le calibre », commente le jeune producteur. Il estime que les quantités d’eau apportées sur le verger couvert ont été moins importantes et les arbres moins stressés. Sans oublier, précise-t-il, « de meilleures conditions de travail pour les salariés qui ont pu récolter à l’ombre ».

Reste à suivre l’évolution des jeunes plants sous persiennes. Vingt-sept variétés ont été implantées, soit une centaine de plants par variétés. « Nous avons fait le choix de variétés plutôt de gros calibres, c’est ce que recherchent les clients aujourd’hui », commente Adrien Clair. Pour Sun’Agri, la parcelle implantée sur les terres de l’EARL Clair va permettre de poursuivre l’acquisition de références pour le pilotage des persiennes agrivoltaïques sur cerisiers.

Sophie Sabot

*Sefra : station d’expérimentation fruits Auvergne Rhône-Alpes.
EARL CLAIR FRUITS

Sécuriser via les circuits courts

L’exploitation compte une vingtaine d’hectares de vergers dont presque 8 en abricot, 6,5 en cerise (dont les 3 ha récemment plantés), 5 en kiwi (bio) et 3 en grenade (bio). « Nous avons réalisés nos premières plantations de grenadiers en 2017. La moitié est valorisée en frais, l’autre en jus transformé par un prestataire. Nous n’avons pas encore fait de grosse récolte mais je suis assez optimiste sur cette production dont les besoins en eau l’été sont très limités », commente Adrien Clair. Depuis qu’il a rejoint son père sur l’exploitation il y a cinq ans, il a souhaité développer les circuits courts et demi-courts. « Avant mon arrivé l’ensemble de la production partait sur les marchés de gros de Rungis ou Lyon Corbas. Mais, les années où nous sommes confrontés à des accidents climatiques, c’est plus facile de valoriser en circuits courts. Sur le marché, on peut expliquer aux clients pourquoi les fruits sont plus chers », justifie le jeune homme. Toute la semaine, il sillonne les marchés de la Drôme et de l’Ardèche (Saint-Paul-Trois-Châteaux, Die, Bourdeaux, Crest, Tournon). « Nous avons créé une SAS pour la commercialisation. Je propose donc nos produits et une gamme plus complète d’autres fruits et légumes locaux », précise-t-il.

S.S.

Première récolte le 15 mai
Adrien Clair ©AD26.
CERISES

Première récolte le 15 mai

L’EARL Clair Fruits a récolté ses premières cerises le 15 mai. Adrien Clair estime qu’il y aura moins de fruits cette année en raison du froid au moment de la floraison. « Mais nous espérons du calibre », souligne-t-il. Reste à savoir ce que donnera la pression en drosophila suzukii. « Nous avons la chance qu’elle arrive assez tardivement ici. En général, jusqu’à fin juin, nous arrivons à gérer. Pour la première année, nous testons des pièges à phéromones. Sur la parcelle agrivoltaïque, entourée de haies, nous allons aussi prendre contact avec la LPO [ligue pour la protection des oiseaux, ndlr] pour installer des nichoirs », détaille-t-il.

S.S.