Assemblée générale
Cave de Tain : poursuivre sur la voie de la valorisation

Solidité financière, stratégie commerciale et contexte géopolitique sont les faits marquants de l’assemblée générale de la Cave de Tain, qui s’est tenue le 21 novembre à Tain-l’Hermitage.

 Cave de Tain : poursuivre sur la voie de la valorisation
« Le contexte économique de la filière vin est en train de se tendre sérieusement », prévient Claude Laÿs, président de la Cave de Tain. À ses côtés, Ludovic Beau, directeur, et Olivier Ringler, directeur du développement commercial. ©AD26-CL

Avec un chiffre d’affaires de 31 millions d’euros, en hausse de deux millions par rapport à l’exercice précédent, et un résultat d’exploitation frôlant les 356 000 euros, les dirigeants de la Cave de Tain évoquent une « situation saine et équilibrée, assurant à la coopérative son autonomie financière ». L’exercice clos au 31 juillet est marqué par une forte hausse du taux d’endettement liée à la réalisation d’investissements à hauteur de 8 millions d’euros. Avec de nouvelles capacités de vinification utilisées pour la vendange 2022, « nous sommes une cave remarquablement équipée », souligne Ludovic Beau, directeur. Dans les mois à venir, une nouvelle ligne de conditionnement verra le jour. En matière d’œnotourisme, la « Maison Cave de Tain » située face à la Cité du chocolat Valrhona a ouvert ses portes dernièrement. Quant au pôle d’excellence à la villa Caroube, située juste en face de la Cave, il devrait être opérationnel dans les prochains mois.

Développer la notoriété 

« Notre objectif est de développer la notoriété de la Cave », souligne Ludovic Beau. Sur le plan commercial, « nous avons maintenu la pression et réalisé une excellente année en termes de chiffre d’affaires, ajoute-t-il. Cela nous permet de faire évoluer notre stratégie commerciale à un moment où l’inflation galope. […] Notre axe de croissance sera le commerce et nous devrons monter d’un ou plusieurs crans dans l’image que nous donnons de notre cave. » Olivier Ringler, directeur du développement commercial de la Cave de Tain, confirme : « Le cap stratégique de la cave est inchangé, nous poursuivons dans la valorisation de nos vins ». En quinze ans, le chiffre d’affaires de la coopérative a doublé. Et ces deux dernières années, malgré la crise sanitaire de la Covid, il a fortement progressé. La coopérative continuera à suivre son plan stratégique commercial élaboré en décembre 2021 en vue d’assurer un meilleur équilibre de ses différents canaux de distribution.

Forte croissance des ventes en grande distribution

Réunis à Tain-l’Hermitage, coopérateurs et invités ont pu apprécier la bonne santé financière de la Cave de Tain qui se prépare à faire face à une conjoncture économique plus difficile.

Dans le détail, la vente de vrac aux négociants a augmenté et représente 9 % du chiffre d’affaires de l’exercice écoulé. « Ce qui est marquant, c’est la forte croissance de nos ventes auprès de la grande distribution, qui pèse plus de 50 % de notre chiffre d’affaires », fait remarquer Olivier Ringler. L’ouverture des magasins pendant la crise sanitaire explique cette tendance. Il en est de même pour les ventes en e-commerce, elles aussi en progression. Inversement, la Cave de Tain a connu une baisse sensible de son activité auprès des cafés, hôtels, restaurants et un arrêt brutal du grand export en dehors de l’Europe. « Depuis six mois et la fin de la crise sanitaire, les tendances s’inversent : la grande distribution se contracte et retrouve son niveau d’avant-Covid, avec notamment un processus de récession en Grande-Bretagne. Inversement, précise le directeur du développement commercial, le grand export redémarre, sauf l’Asie car plusieurs pays sont encore fermés au commerce. Les magasins des aéroports, eux, sont en plein redécollage. »

Les vins AOP revalorisés, pas les IGP

Avec un millésime 2022 « prometteur et aux antipodes du précédent », le président de la Cave de Tain se montre confiant. Sous l’effet de la sécheresse et de la canicule, les volumes entrés en cave ont cependant baissé de 10 à 15 %, le pire ayant cependant été évité grâce aux pluies salvatrices de la mi-août. Compte tenu des bons résultats financiers de la coopérative, Claude Laÿs annonce une revalorisation du millésime 2021 à hauteur de 20 centimes le litre pour les vins AOP, uniquement. « La décision fût compliquée à prendre et peut paraître injuste, admet le président de la Cave de Tain. Mais les niveaux de stocks et les sorties commerciales ne permettent pas de proposer une revalorisation des IGP. Une opportunité aurait été la reconnaissance des IGP Collines rhodaniennes en AOP Côtes-du-Rhône, mais malheureusement le projet de classement a reçu un avis négatif. »

Tension sur l’économie de la filière vin

L’augmentation fulgurante des coûts de l’énergie, liée aux conséquences de l’invasion russe en Ukraine, aura des conséquences. « Ce contexte d’incertitude générale et d’affaiblissement du pouvoir d’achat risque de conduire à une baisse de la consommation des ménages en vin qui, rappelons-le, n’est pas un produit de première nécessité, prévient Claude Laÿs. Le contexte économique de la filière vin est en train de se tendre sérieusement : on observe une baisse de la consommation des vins rouges au niveau national, les stocks augmentent sur les grosses appellations volumiques comme le Bordelais et les Côtes-du-Rhône. » Ne voulant pas se montrer pessimiste, « tous nos indicateurs sont au vert, assure le président de la Cave de Tain. La région septentrionale et les crus des Côtes-du-Rhône se portent bien. »

Pour conclure, Claude Laÿs rappelle les vertus du modèle coopératif où les agriculteurs sont au cœur de la gouvernance : « Nous sommes les usufruitiers de la Cave de Tain, laquelle ne peut ni être vendue, ni délocalisée. »

Christophe Ledoux

Vignoble et changement climatique
Benjamin Bois ©AD26-CL

Vignoble et changement climatique

En fin d’assemblée générale de la Cave de Tain, Benjamin Bois, maitre de conférence à l’université de Bourgogne, est intervenu sur l’impact du changement climatique sur les vignobles. Après avoir évoqué les projections des experts du Gieq à horizon 2100 (hausse des températures, fonte des glaces, élévation du niveau des mers) et les conséquences déjà observables (augmentation des vagues de chaleur, gels tardifs), il a présenté les conséquences de ces changements sur le vignoble : débourrement plus précoce, glissement des dates de récolte, évolution de la composition des raisins. Benjamin Bois émet des pistes pour l’adaptation des vignobles : recherche de nouveaux portes-greffes, ombrage, effeuillage tardif, pulvérisation de kaolin (pour diminuer la transpiration), rognages sévères, vendange de verjus pour baisser le pH des vins.