Visites d'exploitations
« Une installation réussie, ce n’est pas 500 m² de radis »

En déplacement dans la Drôme le 14 décembre, Fabrice Pannekoucke, vice-président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes délégué à l'agriculture et aux espaces valléens, a effectué plusieurs visites agricoles. L'occasion d'évoquer les soutiens et les priorités de la Région dans la protection des cultures, les bâtiments d'élevage, l'installation, les énergies renouvelables...

« Une installation réussie, ce n’est pas 500 m² de radis »
À l'EARL La Pêcheraie (famille Betton), à Mercurol-Veaunes, la délégation s'est arrêtée dans un verger équipé de filets paragrêle (type V5) et d'une chaudière au fioul combinée à une tour à vent. ©AD26-CL

Défendre et soutenir les agriculteurs. C'est le message délivré par Fabrice Pannekoucke lors d'un déplacement dans la Drôme organisé par la chambre d'agriculture. Le nouveau vice-président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes délégué à l'agriculture et aux espaces valléens parle cash : « Une installation réussie, ce n'est pas 500 m² de radis ». Des propos assumés pour expliquer les priorités du conseil régional vers une agriculture nourricière, un foncier agricole productif et un soutien aux innovations, entre autres. Cela au moment où la collectivité vient de fixer sa feuille de route pour le Feader 2023-2027 (voir encadré).

« Protéger mieux »

En cette fin d'année, les responsables de la chambre d'agriculture de la Drôme ont emmené Fabrice Pannekoucke sur plusieurs exploitations. D'abord pour lui montrer l'intérêt des soutiens régionaux dans la protection des cultures face aux aléas climatiques. À l'EARL La Pêcheraie (famille Betton), à Mercurol-Veaunes, la délégation s'est arrêtée dans un verger équipé de filets paragrêle (type V5) et d'une chaudière au fioul combinée à une tour à vent. Un investissement aidé à hauteur de 40 %, à même de protéger 7 hectares. « 300 projets ont été accompagnés ces trois dernières années, majoritairement en Drôme, et aujourd'hui 10 à 15 % du verger drômois productif est sous protection », a indiqué Régis Aubenas, président de Fruits Plus. L'enjeu est désormais de poursuivre dans cette voie, en accentuant aussi l'expertise technique pour choisir les moyens de protection les mieux adaptés à chaque territoire. « Il faut sans doute faire un peu moins de vergers mais protéger mieux en accompagnant les investissements avec le Feader », a déclaré Fabrice Pannekoucke.

Innover pour sauver

Au Domaine Melody, 20 % du vignoble sont désormais sous filets tricotés indémaillables. ©AD26-CL

Quelques kilomètres plus loin, sur une parcelle du Domaine Melody, Marc Romak a montré ses vignes protégées par des filets. « Ici, c'était le couloir de la mort, a confié le vigneron en faisant référence à l'orage de grêle dévastateur de 2019. Nous avons sorti 5 hectolitres par hectare au lieu de 45. » Pour ne plus revivre un tel cataclysme, 20 % du vignoble du domaine sont désormais sous filets tricotés indémaillables. L'objectif est de monter à 35 %. Cela représente un investissement de 10 000 €/ha (aidé à hauteur de 40 %) et un surplus de manutention de 15 à 20 heures par ha. « C'est une innovation d'une simplicité absolue pour sauver une production », a admis le vice-président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes. En viticulture, « un équilibre est à trouver entre la pose de filets, l'assurance et la gestion des stocks », a souligné Marc Romak. Des essais sont en cours pour améliorer encore la qualité des filets et des réflexions sont lancées pour le cas spécifique des vignobles sur échalas, a indiqué Pierre Combat, vice-président de la chambre d'agriculture.

Installer et moderniser

Jean-Pierre et Loïc Royannez, père et fils, élèvent actuellement 570 chèvres laitières dans un bâtiment bois de 2 200 m² terminé en 2019. ©AD26-CL

Autre ambiance et autre thématique lors de la troisième visite effectuée au Gaec Chevrilait, à Alixan. Ici, Jean-Pierre et Loïc Royannez, père et fils, élèvent actuellement 570 chèvres laitières dans un bâtiment bois de 2 200 m² terminé en 2019. Avec une salle de traite rotative de 44 postes et un hangar de stockage de 650 m², l'investissement de 650 000 € a bénéficié de 125 000 € d'aides du plan de compétitivité et d'adaptation des exploitations agricoles (PCAE). Le Gaec, qui compte un salarié à temps plein, produit annuellement 450 000 à 500 000 litres de lait vendus à Agrial pour faire du Picodon. Installé en janvier 2017, Loïc Royannez ne regrette rien de son projet d'agrandissement et de modernisation, admettant une ambiance optimale dans le bâtiment, tout comme les conditions de travail. « Aujourd'hui, avec la forte hausse des coûts, un projet comme celui-ci ne pourrait pas voir le jour », a fait remarquer Frédéric Sourd, conseiller bâtiment à la chambre d'agriculture de la Drôme.

Pour conclure cette journée de visites, Fabrice Pannekoucke s'est rendu au Gaec des Couriols à Montmeyran, afin d'évoquer le plan bio de la Région en cours de finalisation. Puis à la ferme expérimentale d'Etoile-sur-Rhône pour visiter la plateforme des techniques alternatives et bio (Tab). « L'innovation, c'est mettre des moyens pour faire évoluer les modèles », a souligné l'élu régional, apportant son soutien aux stations d’expérimentation, à condition de « lister clairement les sujets à traiter ».

Christophe Ledoux

Installation, enjeux énergétiques, irrigation
À Montélier, Fabrice Pannekoucke (vice-président de la Région Aura), Jean-Pierre Royannez (président de la chambre d'agriculture de la Drôme), Franck Soulignac (vice-président du Département de la Drôme). ©AD26-CL

Installation, enjeux énergétiques, irrigation

À Montélier, lors d'une étape dans les locaux du Syndicat d'irrigation drômois, plusieurs dossiers ont été évoqués. D'abord, celui du renouvellement des générations et de l'enjeu démographique alors que plus de 500 exploitations drômoises seront à reprendre dans les dix prochaines années. Le tout sur fond de réforme de la DJA avec une montée en puissance de la Région dans les choix d'installation. « Avec 40 000 € en moyenne, nous sommes la première Région de France pour la DJA, a fait valoir Fabrice Pannekoucke, vice-président du conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes délégué à l'agriculture et aux espaces valléens. Et dans le paysage national, nous sommes les plus en avance tant dans le mode financement et dans l'organisation. » Il a, aussi, rappelé la place « essentielle » de la mission de service public des chambres d'agriculture et annoncé la création d'un « comité d'experts » (en remplacement des CDOA) dans chaque département.

Par ailleurs, la place de l'agriculture dans l'enjeu énergétique a été rappelée par les élus de la chambre d'agriculture, prioritairement dans l'utilisation des toitures de bâtiments agricoles pour le photovoltaïque. Des freins ont été évoqués comme le coût du désamiantage, la longueur des délais de raccordement au réseau par Enedis. « La Région va s'engager à faciliter la mise en œuvre des projets », a annoncé Fabrice Pannekoucke. À propos de l'autoconsommation, « c'est une vraie solution pour des sites isolés car cela permet de s'affranchir du coût du raccordement », a-t-il ajouté. Le vice-président de la Région a aussi évoqué des essais en cours de « photovoltaïque mobile » sur les exploitations agricoles, ainsi que de la possibilité d'utiliser l'énergie solaire pour faire de l'hydrogène, énergie stockable.

Enfin, le président et la directrice du Syndicat d'irrigation drômois (SID) ont présenté à Fabrice Pannekoucke l'impact de la hausse du coût de l'électricité sur les réseaux collectifs d'irrigation du département (lire nos précédentes éditions). « L'enjeu est de survivre à l'année 2023 », a confié le président du SID. Avec un prix du mètre cube à 0,30 €, la situation semble inextricable à ce jour. « On n'a pas le droit de ne pas mettre l'eau mais le SID n'a pas les moyens de la mettre », a résumé Jean-Pierre Royannez, président de la chambre d'agriculture.

Auvergne-Rhône-Alpes : les priorités du Feader 2023-2027

Le fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) provient du second pilier de la Pac. Sa gestion est confiée aux conseils régionaux. La Région Aura a fixé les priorités suivantes :

- Assurer l’installation de 4 000 jeunes par une DJA, 800 projets de transmission, 30 projets collectifs de protection du foncier. Budget : 36 M€ par an.

- Aider 8 500 projets d'investissements dans les exploitations agricoles, 1 300 exploitations engagées dans une mesure agro-environnementale et climatique (MAEC) forfaitaire, 2 000 projets d'investissements collectifs agricoles dont 600 dans les espaces pastoraux. Budget : 84 M€ par an.

- Relocaliser la production alimentaire régionale en soutenant 1 800 projets d'investissement dans les productions végétales à enjeu de souveraineté alimentaire, 1 700 projets pour la valorisation des productions agricoles dont 200 dans l'industrie agroalimentaire. Budget : 30 M€ par an.

- Développer l’innovation en soutenant 450 projets territoriaux et 40 projets de recherche appliquée. Budget : 7 M€ par an.

- Valoriser la forêt avec 450 opérations de desserte, 250 projets d'investissements d'entreprises forestières, 180 projets d'investissement de transformation du bois. Budget : 11 M€ par an.

- Soutenir les projets de territoire Leader. Budget : 19 M€ par an.