Viticulture
Vins des collines rhodaniennes : le projet d’AOP avance
Le syndicat des vignerons de la Drôme des collines a déposé un dossier pour passer ses vins IGP en AOP Côtes-du-Rhône. Le point avec son président, Raphaël Cros, sur l’état d’avancement de ce projet.
Raphaël Cros, en tant que président du syndicat des vignerons de la Drôme des collines, présentez-nous votre IGP ?
Raphaël Cros : « Les vins de pays collines rhodaniennes sont devenus IGP en 2009. Notre démarche AOP était d’ailleurs l’objet premier de la création, en 2014, du syndicat des vignerons de la Drôme des collines. Nous étions déjà un noyau de viticulteurs car le secteur de Saint-Donat a un gros passé viticole, avec sa cave coopérative fondée en 1931. Par la suite, avec les différentes crises une grande partie du vignoble a disparu. Mais, avec la reprise de la cave de Saint Donat par celle de Tain-l’Hermitage en 1986, il y a eu un renouveau. Une dizaine de viticulteurs a continué à cultiver de la vigne en se spécialisant un peu. Et, à la cave de Tain suite à la crise des années 2000, on avait mis en place - de notre propre chef - une charte qualité diminuant le rendement maximal de l’IGP collines rhodaniennes, dans le but de produire du vin plus haut de gamme. Et cela a payé : on s’est retrouvé avec des supers vins. Sur notre territoire, il n’y a pas d’intermédiaire entre IGP et AOP voisines classées en crus. Alors, on s’est dit pourquoi ne pas demander une AOP Côtes-du-Rhône pour élargir la gamme et faire reconnaître notre travail ? L’idée est partie de là. Une autre cave coopérative, la Cave Clairmont, et plusieurs caves particulières ont rejoint la démarche. »
Justement, où en est votre dossier de demande d’AOP ?
R. C. : « On a déposé officiellement notre dossier AOP auprès de l’Inao en 2017. En 2018, on a reçu une commission de l’Inao. Elle a ensuite nommé quatre experts qui, de fin 2019 jusqu’à cet été, ont étudié l’historique, la géologie, le vignoble existant, les parcellaires… Un rapport, “le rapport Piron”, déterminait déjà les conditions d’accès à l’AOP Côtes-du-Rhône mais il avait été établi principalement sur les Côtes-du-Rhône méridionales, pas pour les septentrionales. Les experts ont donc été chargés de le compléter. Leur rapport a été validé au niveau régional par les services de l’Inao (de Valence et d’Avignon), ainsi que par le syndicat général des vignerons des Côtes-du-Rhône. Il sera présenté à la commission nationale de l’Inao en novembre ; on ne connaîtra son contenu qu’après. Ensuite, des experts seront nommés pour entrer dans les détails. Ils vérifieront, commune par commune, si les critères AOP Côtes-du-Rhône sont applicables sur notre terroir. »
Le 19 octobre à Peyrins, vous avez invité la députée Emmanuelle Anthoine et le sénateur Gilbert Bouchet sur l’exploitation d’Isabelle et d’Aurélie Mourvillier, productrices de vins IGP collines rhodaniennes. Pourquoi cette rencontre ?
R. C. : « Emmanuelle Anthoine est membre du groupe vin de l’Assemblée nationale et Gilbert Bouchet de l’association des élus de la vigne et du vin (Anev). Donc, notre but est de les tenir au courant de notre démarche et aussi de leur montrer l’intérêt de la filière viticole pour l’agriculture de la Drôme des collines. Lors de cette rencontre, tous deux nous ont dit prendre en compte ce projet et son incidence favorable pour la Drôme des collines. Nous nous sommes engagés à les informer de l’évolution de notre dossier AOP et eux à nous accompagner dans la poursuite de ce projet. Et nous nous sommes donné rendez-vous en novembre une fois que l’Inao aura rendu sa décision. »
Propos recueillis par Annie Laurie
L’IGP collines rhodaniennes
Le vignoble est situé sur une dizaine de communes bordées des AOP Crozes-Hermitage et Hermitage. Il est actuellement classé en IGP (indication géographique protégée) sur la zone des Côtes-du-Rhône septentrionales.
18 acteurs concernés par la demande d’AOC, dont deux caves coopératives (Tain et Clairmont) et plusieurs caves particulières. Plus de 180 hectares plantés, une production de 7 000 hectolitres et une surface potentielle de 240 hectares.
Deux grands types de terroirs : en Drôme des collines, plutôt du sable, de la molasse avec quelques terrasses de gravier ; sur le secteur de Granges-les-Beaumont et Châteauneuf-sur-Isère, plutôt des diluviums alpins, une terre graveleuse avec un peu d’argile rouge.
Chronologie de la demande d’AOP
- 2018 : rédaction de la lettre de mission, nomination des consultants, collecte des données sur les Côtes-du-Rhône, étude de terrain pour analyse.
- 2019 : rédaction du rapport formateur, présentation des premiers travaux d’analyse.
- 2020 : finalisation du rapport formateur avant présentation à l’ODG puis, fin août, validation par le syndicat général des vignerons des Côtes-du-Rhône.
- Prévisionnel : présentation du rapport formateur au Comité national de l’Inao en novembre prochain ; extension de la mission des consultants et experts pour l’examen des demandes d’intégration… ; début des travaux des experts et consultants pour les études parcellaires ; rendu du rapport d’étude à l’ODG, puis présentation pour validation à l’Inao.
L’EARL du Maupas
Au sein de l’EARL du Maupas (créée en 2017) à Peyrins, Isabelle et Aurélie Mourvillier, deux sœurs, cultivent une soixantaine d’hectares dont 12 de vigne en IGP collines rhodaniennes, 6 de noyers, 1 d’abricotier, 1,5 de maraîchage sous serres ou en plein air et le reste de la surface en grandes cultures. Cette exploitation est dans les mains de leur famille depuis plusieurs générations.
« C’est notre grand-père qui a commencé à planter de la vigne, explique Isabelle Mourvillier. Nos parents ont fait le choix d’arracher des pêchers pour augmenter la surface de vigne. Ils livraient la vendange à la cave coopérative de Saint-Donat-sur-l’Herbasse, qui a fusionné avec celle de Tain-l’Hermitage en 1986. Ma sœur et moi avons encore développé la surface en vigne de l’exploitation et prévoyons d’en planter encore un ou deux hectares. Et nous sommes aussi adhérentes à la Cave de Tain. »
Isabelle Mourvillier est administratrice du syndicat des vignerons de la Drôme des collines. A propos de la démarche AOP Côtes-du-Rhône engagée par celui-ci, elle confie : « Nous demandons l’AOP pour valoriser nos vins, notre travail, obtenir une meilleure reconnaissance au niveau national et international ».
A. L.