GROTTE CHAUVET

« Animal », de l’art pariétal au street art

Depuis les artistes de la grotte Chauvet qui ornaient les parois rocheuses de leur fantastique bestiaire jusqu’au street-artiste prénommé WAR qui poétise les murs de nos cités de ses peintures animalières, la faune sauvage n’a cessé de fasciner notre humanité. C’est la beauté de ces destins reliés et pourtant séparés par plus de 36 000 années que donne à voir l’exposition immersive « Animal ». Elle est proposée au cœur d’un espace de 360° en forme de large tunnel utilisant les technologies les plus abouties pour transporter le spectateur dans le monde merveilleux où passé et présent n’ont plus de frontières. « Animal » n’est pas une simple exposition, elle constitue une expérience qui saisit aussi bien les petits que les grands. Elle nous parle de gestes d’artistes, de ces lignes tracées d’un mur à l’autre… et tire sur ce fil qui nous lie, nous relie à nos ancêtres de génie et aux illustres peintres inspirés par la nature. Cette chevauchée fantastique à travers les âges nous fait toucher du doigt l’extrême délicatesse de ces hommes des cavernes dont la dextérité n’a rien à envier à nous autres, hommes et femmes du temps présent.

Le génie créatif par-delà le temps

« La modernité des œuvres de la grotte Chauvet, dans leurs tracés, leurs effets de mouvement nous a insufflé l’envie de travailler avec des spécialistes de l’image et de l’image en mouvement. Musique originale, œuvres légendaires animées, création artistique de street artistes viennent servir un scénario qui donne toute sa place au génie créatif, du plus ancien au plus actuel », explique Valérie Moles, responsable culturelle de Chauvet 2. Le site est baptisé Chauvet 2 car il abrite, au delà des différentes salles d’exposition, la fameuse reconstitution de la grotte Chauvet, la vraie découverte le 18 décembre1994 à quelques pas de là par trois spéléologues, Jean-Marie Chauvet, Éliette Brunel et Christian Hillaire. 
À proximité de la célèbre arche du Pont d’Arc, à l’époque, Jean-Marie Chauvet identifié un « trou souffleur » dans le cirque d’Estre, un indicateur avéré qu’une cavité se trouvait de l’autre côté. Après un travail de désobstruction de l’ouverture, les trois spéléologues s’enfoncent dans une cheminée étroite de 10 m de long, débouchant dans une vaste cavité. Il y a 21 500 ans, le porche d’entrée préhistorique de la grotte s’était effondré, empêchant dorénavant animaux et humains de pénétrer à l’intérieur, jusqu’à la découverte des trois spéléologues. Cet éboulement fortuit a permis de conserver de manière exceptionnelle cette cavité et ce qu’elle renfermait : le plus ancien chef-d’œuvre de 
l’humanité connu à ce jour. Il est daté d’il y a 36 000 ans, soit 18 000 ans de plus que les parois ornées de la grotte de Lascaux (Dordogne). Elles sont l’œuvre de sociétés de chasseurs collecteurs du Paléolithique. Les parois de la grotte présentent plus de 1 000 dessins, dont 425 figures animales. Le bestiaire de la grotte, avec 14 espèces représentées, dont une majorité d’animaux dangereux (mammouths, félins, rhinocéros laineux, ours des cavernes…), est inédit avec certaines représentations uniques dans l’art pariétal paléolithique (panthère, hibou et bœuf musqués).

Une réplique pour préserver ce joyau de l’humanité

Dès le début des années 2000, le projet d’une réplique est envisagé. Cinq ans d’études et trente mois de chantier ont été nécessaires pour relever ce défi culturel, technologique et scientifique unique rassemblant architectes, scénographes, techniciens, entrepreneurs, maçons, soudeurs, sculpteurs, artistes, plasticiens, scientifiques et élus. Si la Grotte Chauvet 2 est deux fois et demie plus petite que la grotte originale (3 000 m² au sol sur les 8 500 m² de la grotte Chauvet-Pont d’Arc), le relief des parois est restitué au millimètre près, et les peintures, gravures et représentations les plus remarquables ainsi que les éléments paléontologiques et géologiques essentiels sont traités à l’échelle 1, à partir des originaux numérisés. Un an avant son ouverture au public en 2015, le 22 juin 2014, la Grotte ornée du Pont d’Arc dite « Grotte Chauvet » est inscrite sur la liste des biens culturels du patrimoine mondial. Le bien inscrit englobe la totalité de la cavité, mais également l’écrin paysager naturel et le bassin hydrogéologique, dont l’arche naturelle du Pont d’Arc et ses 54 m de haut. Il s’agit du plus ancien bien culturel jamais classé au patrimoine mondial de l’Unesco. Ce joyau présente en effet trois caractéristiques très rarement réunies : l’ancienneté, la qualité de la conservation et la richesse des représentations artistiques.

Sophie Chatenet