OVINS
Frédéric Gontard : « Entre le loup et l’agneau, il va falloir choisir »
Fraîchement élu à la tête de la section régionale ovine de la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes, Frédéric Gontard, éleveur dans la Drôme, entend poursuivre le combat sur la rémunération et milite pour un changement urgent de doctrine sur le loup.
Encore sous le coup de la nouvelle de la nuit, Frédéric Gontard a du mal à canaliser sa colère. Son troupeau de 200 brebis a de nouveau subi une attaque de loups dans la nuit du dimanche 14 au lundi 15 mai. Les trois chiens de protection veillaient pourtant sur les animaux et des clôtures électriques avaient été bien positionnées. En vain, se désole l’éleveur : « Le loup a de la malice, il est là 24 heures sur 24. Moralité, j’ai perdu une brebis, peut-être plus, et derrière ce sont des agneaux qui ne naîtront pas et du revenu en moins. Sans parler du préjudice moral. Nous sommes sans arrêt sur le qui-vive. La prédation est le terreau de drames humains. Nos politiques n’en ont pas encore mesuré la gravité ». Installé dans la Drôme sur la commune de la Laupie, au sud de Montélimar, Frédéric Gontard comme ses collègues du secteur sont révoltés et se sentent de plus en plus impuissants face à l’invasion du loup, dont le nombre est évalué à 200 sur le département. Pour limiter le risque d’attaque, les éleveurs en viennent à laisser les animaux en bergerie en pleine saison de pâturage ! L’herbe est coupée pour être apportée aux brebis. Un non-sens économique et écologique manifeste, complètement à rebours des attentes sociétales.
Changer de doctrine
L’éleveur qui vient d’être élu président de la section régionale ovine de la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes estime que si l’administration ne change pas de doctrine sur la prédation, on va droit vers la catastrophe : « Lorsque les populations de loups vont coloniser plus massivement les territoires auvergnats où les animaux pâturent sur de vastes parcelles une grande partie de l’année, cela va être effroyable ». Pour le vivre au quotidien, il connaît les limites, pour ne pas dire l’absurdité, de la coexistence. « Tout est fait par l’administration pour nous mettre des bâtons dans les roues. C’est un parcours du combattant pour obtenir des tirs de défense. » Ainsi, 90 % des loups en France sont abattus par des lieutenants de louveterie. Du nouveau plan loup, annoncé pour début 2024, le président attend « un plan de protection des éleveurs. Et pas un énième emplâtre sur une jambe de bois ».
Vivre de son travail
Alors que les éleveurs vieillissent, et que le renouvellement est loin d’être à la hauteur du nombre de départ à la retraite, il devient urgent de résoudre ce fléau de la prédation, « pour que les éleveurs puissent travailler sereinement », tout en offrant des perspectives de revenus aux porteurs de projets. C’est le second cheval de bataille de Frédéric Gontard : « La loi Egalim a rebattu les cartes en offrant aux producteurs la possibilité de reprendre la main sur les prix. Il faut que cette loi s’applique ». Pour lui, toutes les problématiques sont liées, d’où la
nécessité de se battre sur tous les fronts : « Nous ne produisons même pas la moitié des agneaux que nous consommons. Dans le même temps, nos gouvernants, qui brandissent pourtant l’objectif de souveraineté alimentaire, continuent de souffler le froid et le chaud en signant des accords internationaux délétères pour notre production. Ce n’est plus possible ! »