INSTALLATION
Un jeune vigneron à l’écoute du marché et des consommateurs

Jeunes Agriculteurs Drôme poursuit ses actions pour promouvoir l’installation en agriculture. Le 9 novembre, le syndicat a convié élus et partenaires pour inaugurer l’installation de Gaël Reynaud, vigneron à La Baume-de-Transit.

Un jeune vigneron à l’écoute du marché et des consommateurs
Élus et agriculteurs locaux mais aussi élèves de la MFR de Richerenches étaient présents pour cette inauguration. ©AD26-S.S.

À 28 ans, Gaël Reynaud poursuit l’histoire viticole familiale. Trois générations l’ont déjà précédé à la tête de l’exploitation qui n’a cessé d’évoluer. « Mon père a créé le domaine et commencé à vinifier en 1988, avant tout était vendu en cave coopérative. Puis il a amorcé la conversion bio des vignes en 1998 », se souvient le jeune exploitant. Après un parcours de formation au lycée viticole d’Orange (84), Gaël Reynaud rejoint le domaine familial comme salarié en 2014, avant de reprendre les rênes de l’exploitation le 1er janvier 2019 à la retraite de son père. Aujourd’hui, il exploite 30 hectares de vignes dont 17 en appellation Grignan-les-Adhémar, 5 en Côtes-du-Rhône villages Visan et 8 en Côtes-du-Rhône villages Suze-la-Rousse. En effet, lorsqu’il s’installe, l’exploitation est en train d’amorcer un virage avec la volonté de réduire les surfaces en lavandin au profit de la vigne. De 10 ha en lavandin, il n’en reste aujourd’hui que 2.

Nouveaux débouchés après la crise Covid

En parallèle, le jeune exploitant doit revoir la stratégie commerciale sur les vins. La crise de la Covid est passée par là et le marché du vrac, débouché majoritaire du domaine, s’est effondré. « J’ai trouvé de nouveaux débouchés auprès de négociants locaux pour la vendange fraîche », explique Gaël Reynaud. 60 % de sa récolte est ainsi valorisée, ce qui lui assure de la trésorerie. Le reste est vinifié au domaine. Pour la commercialisation, le jeune vigneron a choisi de créer la société* Saint Guery [du nom du domaine choisi à l’époque par son père, ndlr]. Il produit 10 000 bouteilles chaque année, à 80 % en appellation Grignan-les-Adhémar. « J’en vends environ 8 000 par an et j’assure un roulement pour en faire vieillir une partie et toujours proposer à mes clients un vin prêt à consommer », commente-t-il. Pour l’instant, les rouges représentent 75 % de ses ventes en bouteilles, le blanc 15 % et le rosé 10 %. 5 000 bag-in-box (Bib) sortent également de la cave chaque année.

Trouver sa place dans l'œnoutourisme

La vente directe au caveau a lieu essentiellement en période estivale et ne représente qu’une petite part des débouchés. Le reste est vendu auprès de cavistes, magasins bio, restaurants… Gaël Reynaud a testé l’œnotourisme en proposant des sorties en trottinettes électriques dans le vignoble au moment de la saison des truffes. « Mais ça a du mal à prendre car l’offre sur ces activités est déjà importante », reconnaît-il.

Patricia Picard, conseillère régionale, et Agnès Jaubert, conseillère départementale déléguée à l’agriculture, qui participaient à cette inauguration, incitent pourtant à poursuivre sur cette voie de l’œnotourisme. « Le Département réalise actuellement une étude sur le sujet », a souligné Agnès Jaubert. Tandis que Patricia Picard invite les élus locaux à s’approprier davantage l’identité viticole de leurs communes. « L’œnotourisme est une voie d’avenir. C’est un moyen d’attirer un public pas forcément consommateur de vins sur d’autres activités touristiques et de créer l’occasion d’un échange avec le vigneron », estime la conseillère régionale.

Développer l’offre en blancs AOC et IGP

Gaël Reynaud souhaite désormais poursuivre la diversification de son offre en vins. « Il y a encore dix ou quinze ans, les deux appellations du domaine fonctionnaient bien en vrac. Désormais, il faut proposer une offre plus complète, des vins différents », insiste-t-il. Cette année, 2,5 ha de cépages blancs ont été plantés en appellation Grignan-les-Adhémar et le jeune vigneron envisage d’implanter aussi 1 à 3 ha en blanc IGP, des produits sur lesquels la demande est forte selon lui. Pour compléter son activité vigneronne, il souhaite se lancer dans la plantation d’oliviers. Un projet envisagé avec prudence toutefois car l’investissement est élevé. Un hectare d’oliveraie pourrait remplacer des vignes en fin de vie sur des parcelles que le jeune exploitant a récemment acquises.

Sophie Sabot

* Société par actions simplifiée unipersonnelle.
« Sans le groupe, on ne peut pas s’en sortir »
Gaël Reynaud, 28 ans, insiste sur la nécessité du collectif, que ce soit pour le matériel en cuma ou via des groupements pour l’irrigation ou l’achat d’intrants. ©AD26-S.S.
CUMA

« Sans le groupe, on ne peut pas s’en sortir »

Gaël Reynaud en est convaincu : le collectif est aujourd’hui le seul moyen de s’en sortir. Il est trésorier de la cuma des Buttes que son père a relancée en 2015. « Nous sommes 17 adhérents et ça fonctionne très bien », annonce Gaël Reynaud. Une machine à vendanger partagée à quatre, une mini-pelle utilisée à sept, un projet d’achat collectif pour un semoir destiné aux couverts végétaux… la cuma est selon le jeune installé une solution « imbattable » pour disposer de matériels performants. Un argument largement repris par Jean-Pierre Feschet, président de la fédération des cuma de la Drôme, venu en voisin depuis Grignan pour cette inauguration. « Cela peut paraître plus simple d’avoir sa machine chez soi, mais c’est tellement plus cher », insiste le président. Il invite ainsi le monde viticole à balayer les préjugés qui laisseraient entendre que « le matériel en cuma ce n’est pas possible parce que tout le monde en aurait besoin en même temps. »

S.S. 

IRRIGATION

Sans eau, pas d’avenir pour les jeunes installés

Sur la quarantaine d’hectares de son exploitation, Gaël Reynaud ne dispose pas d’irrigation. L’année 2022 a confirmé les inquiétudes du jeune vigneron, avec des signes de dépérissement du vignoble. « J’ai déposé une demande de forage individuel qui m’a été refusée. Pourtant l’objectif n’est pas de produire plus mais juste de garantir une production. Lorsque je me suis installé en 2019, on nous a mis l’eau à la bouche avec le projet “Hauts de Provence Rhodanienne ” (HPR) mais pour l’instant sur le terrain, nous n’avons aucune solution », rappelle-t-il. 

Patricia Picard, pour la Région, et Agnès Jaubert, pour le Département, ont assuré que ce projet HPR « avance » mais que l’étude de préfiguration, qui se déroulera dans les prochains mois, est « indispensable » pour dimensionner les infrastructures au plus près des besoins du terrain. 

Lors de cette inauguration, Sandrine Roussin, présidente de la FDSEA de la Drôme, a aussi incité les agriculteurs à être présents pour faire entendre leur voix dans l’ensemble des instances qui traitent du partage de la ressource en eau. Enfin, Jean-Michel Avias, conseiller départemental du canton de Grignan, a appelé à « remarier l’agriculture avec nos habitants, nos administrés », notamment sur ces questions liées à l’irrigation.

S.S.