Inoculation du soja : produits et usages
La capacité du soja à fixer l’azote atmosphérique est une caractéristique des plantes de la famille des légumineuses et c’est un avantage agro-économique notoire. Pour garantir le bon fonctionnement de la symbiose plante-rhyzobium responsable de ce mécanisme, il faut utiliser un produit inoculant de qualité et respecter les modalités d’usage. Terres Inovia fait le point.

Jusqu’au début des années quatre-vingt, l’inoculation du soja en France était réalisée avec un produit à base de rhyzobium USDA138. Les travaux réalisés sur cette souche de rhyzobium ont alors fait apparaître un risque portant sur la difficulté potentielle à remplacer cette souche dans les sols au profit d’autres souches plus performantes, si besoin en était dans un futur plus ou moins proche. Pour éviter cette situation, une nouvelle souche a été sélectionnée par l’Inra (Bradyrhizobium diazoefficiens G49), à la fois pour sa capacité à noduler avec les variétés conduites en France, mais aussi sur sa facilité à être remplacée par une nouvelle souche si nécessaire. Une approche basée sur une logique de réflexion à long terme. Les variétés inscrites en France sont inoculées avec cette souche au cours des étapes de sélection. À l’inverse, d’autres pays comme le Brésil, après avoir intégré dans leurs sols une grande diversité de souches, ont dû sélectionner des souches plus agressives (ex : Semia 5079 et Semia 5080) pour permettre leur installation dans ces mêmes sols. Un choix qui rend aujourd’hui difficile la possibilité de remplacer ces souches en cas de problème, par exemple une perte de leur capacité à noduler à la suite d’une mutation.
Votre parcelle a-t-elle besoin d’être inoculée ?
La bactérie nécessaire à la fixation symbiotique de l’azote atmosphérique étant naturellement absente des sols français pour le soja, elle doit être apportée par inoculation au semis. Cette étape doit être réalisée lorsque la parcelle n’a jamais porté de soja ou lorsque l’on veut sécuriser la mise en place des nodosités (sols calcaires, sols sableux, ou parcelles n’ayant pas porté de soja depuis de nombreuses années). Une fois introduite, la bactérie survit bien dans les sols et la ré-inoculation est souvent inutile. De nouvelles modalités d’inoculation sont aujourd’hui possibles grâce à une diversification de l’offre en type d’inoculum : tourbe sur graine, tourbe sur micro-granulés, tourbe plus additif collant, liquides et semences pré-enrobées. Au-delà des procédés, la nature de la souche de la bactérie (rhyzobium) est un élément majeur à prendre en compte, d’autant plus qu’aujourd’hui les souches utilisées dans les produits commercialisés n’offrent pas toutes le même niveau de qualité.
La qualité du produit
Un produit de qualité est un produit garantissant la concentration en bactéries, la nature et les propriétés de la souche utilisée, l’absence de contaminants extérieurs. Le système de licence mis en place par l’Inra depuis 40 ans offre ces garanties. Chaque année, l’Inrae fournit la souche aux industriels, contrôle des échantillons des productions, et revérifie à postériori l’aptitude à former des nodosités et à fixer l’azote du produit. Ce travail est une garantie très importante pour l’agriculteur utilisateur.
Semences pré-enrobées
Les semences pré-enrobées évitent de procéder à l’inoculation et donc sont pratiques pour le producteur. Les comparaisons réalisées entre le Force 48 au semis et le pré-enrobage avec Hicoat Super montre un avantage au Force 48 à base de G49. Cet avantage se retrouve plus particulièrement sur le nombre moyen de nodosités par plante et sur la teneur en protéines (+0,7 point de protéines pour Force 48). Les performances de rendement sont relativement proches, à l’avantage de l’inoculum à base de G49 (+ 1,2 q/ha). Sur le critère du nombre de nodosités par plante, remarquons également un écart entre Hicoat pré-enrobé à 90 jours avant semis contre 30 jours, à l’avantage du délai réduit. L’utilisation de ce procédé sera à réserver aux situations ayant déjà porté un soja. Après achat, le produit inoculant ou les semences pré-inoculées doivent être conservés à température fraîche et à l’abri de la lumière, pour en conserver la qualité.
Apporter de l’azote au semis ? Une fausse bonne idée
Un apport d’azote au semis sera-t-il bénéfique à mon soja en accélérant son démarrage ? La réponse est non. Sur le plan technique, le point fort d’une légumineuse telle que le soja est sa capacité à mobiliser l’azote présent dans l’atmosphère. C’est une ressource gratuite et disponible en quantité, grâce à ses nodosités. Néanmoins, dans les premières phases de son cycle, alors que les nodosités se mettent en place, le soja va mobiliser une partie de l’azote du sol, avant de basculer en grande majorité sur l’azote atmosphérique par la voie symbiotique, via les nodosités. Une quantité d’azote trop importante au début du cycle a alors pour effet de retarder la mise en place de ces nodosités ce qui peut alors pénaliser le soja. On observe une diminution du nombre de nodosités en lien avec l’augmentation de l’azote disponible dans le sol. Dans une majorité de situations, un apport modéré de 30 à 40 unités ne se traduira pas forcément par un rendement pénalisé, mais le bilan économique sera quant à lui négatif ; l’investissement en azote n’étant quasiment jamais amorti, en particulier dans le contexte actuel du prix de l’azote. En règle générale, il est donc déconseillé d’apporter de l’azote au semis d’un soja, c’est par ailleurs totalement interdit en zone vulnérable. Seule exception, si un défaut de nodulation est observé à l’approche de la floraison, un apport d’azote peut se justifier entre la floraison et la formation des premières gousses, dans la limite de 150 unités. En zone vulnérable, un tel apport n’est possible que dans cette situation de nodulation défectueuse.
La double inoculation
L’inoculation réalisée classiquement avec un inoculum à base de G49 comme le produit Force 48, doit apporter environ dix fois plus de bactéries par rapport à la concentration minimale requise : soit un million de bactéries par graine contre environ cent mille requises. Toutefois, si les conditions de conservation de l’inoculum ne sont pas respectées, la concentration bactérienne peut facilement diminuer de dix fois, cent fois, mille fois ou davantage encore. Le fait de multiplier la dose par deux est donc dérisoire. La preuve chiffrée : en situation de bonnes conditions de conservation de l’inoculum, une double dose apportera deux millions de bactéries au lieu d’un million… pour un besoin de seulement cent mille ! En revanche, en situation de mauvaises conditions de conservation, si la concentration est cent fois plus faible, la double inoculation revient à apporter vingt mille bactéries au lieu de dix mille pour une dose simple : on reste alors toujours nettement inférieur au besoin de cent mille bactéries. Cette pratique de double inoculation peut être observée dans les cas d’utilisation de semences pré-enrobées avec Hicoat. Souvent moins concentrées en bactérie, on souhaite alors ré-inoculer par sécurité, avec une solution à base de G49. Dans ce cas de figure et sur la même base de raisonnement que précédemment, si une inoculation à la ferme, même à demi-dose est réalisée en plus du pré-enrobage, alors autant privilégier dès le départ une semence non pré-inoculée. En effet, le nombre de bactéries apporté par l’inoculation juste avant le semis sera suffisant (dans ce cas privilégier tout de même la pleine dose).
Tout savoir sur l'inocualtion du soja
Arnaud Micheneau – Terres Inovia
Contact régional : Alexis Verniau ([email protected])
Les inocula à éviter
Terres Inovia recommande clairement l’utilisation des inocula fabriqués avec la souche sélectionnée G49 et relevant du dispositif de contrôle qualité Inrae. Néanmoins, depuis quelques années, les mécanismes de reconnaissance mutuelle entre États européens des autorisations de mise sur le marché permettent à d’autres inocula d’être commercialisés. Terres Inovia les déconseille absolument. Outre l’absence de garanties liées à un contrôle qualité, certains produits sont fabriqués avec des souches inconnues ou connues pour leurs inconvénients. Une souche indésirable survit en général bien et ne pourra plus par la suite être remplacée. Les inocula à éviter sont Biofix In et Liquifix.