Foire de Beaucroissant
Entre tourments et attentes

Après un hiver marqué par la crise agricole et un été caractérisé par le développement de la fièvre catarrhale ovine (FCO), le monde agricole est en souffrance. Les responsables professionnels et les élus politiques en ont fait état lors de l’inauguration de la 803e édition de la Foire de Beaucroissant.

Entre tourments et attentes
Le protocole de la 803e édition de la Foire de Beaucroissant a été inhabituel. Au lieu de tenir leurs discours dans la salle des fêtes, les élus les ont énoncés sur le ring du concours charolais. ©I.B.- T. D.

Comme d’habitude, l’inauguration de la Foire de Beaucroissant avait été minutieusement préparée. Mais vendredi 13 septembre, alors que le cortège officiel avait commencé sa déambulation et faisait une première halte dans le ring où se déroule le concours charolais pour échanger avec son président Raphaël Loveno, les élus ont bouleversé le protocole préférant le ring à la salle des fêtes où ils se sont installés. Sous la direction d’Antoine Reboul, maire de Beaucroissant, ils ont tour à tour évoqué la Foire, son rôle de vitrine pour l’agriculture, l’importance de son rayonnement dans le territoire et l’implication de tous ceux qui contribuent à faire vivre ce grand évènement populaire et professionnel.

Passer le cap

C’est en effet une tradition : la journée professionnelle de la Foire de Beaucroissant sonne la rentrée agricole. Jean-Claude Darlet, le président de la chambre d’agriculture de l’Isère en a profité pour rappeler à quel point l’agriculture se porte mal et encore plus depuis que la fièvre catarrhale ovine (FCO) affecte les élevages. « Dans toute la région, touchant les troupeaux ovins, bovins et caprins, elle fait des ravages. Les pertes sont considérables, plusieurs centaines d’exploitations sont concernées. Il faut impérativement aider les éleveurs à passer le cap grâce à un accompagnement d’urgence et une attention particulière des OPA1 et des vétérinaires. Ensuite, nous aurons besoin des collectivités pour reconstituer les troupeaux. Cela va demander des fonds d’investissement importants. Tout le monde va devoir nous aider », a-t-il déclaré. Il a terminé son allocution en revenant sur les difficultés rencontrées par les secteurs des grandes cultures et de la noix. À quelques jours du début de la récolte qui s’annonce « bien meilleure cette année », il a exhorté l’assemblée à manger des noix et des produits isérois sans modération.

Pas de « no man’s land »

Bien qu’il soit tout juste élu à la tête de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, Fabrice Pannekoucke n’a pas découvert la Foire cette année. Alors en charge du portefeuille de l’agriculture à la Région, il était déjà présent dans ses allées l’an passé et se souvient bien du désarroi exprimé par la profession. Aussi, a-t-il insisté sur la nécessité qu’un ministre de l’Agriculture soit rapidement nommé et reprenne les travaux en attente. Il a aussi rappelé le soutien mis en œuvre par la collectivité envers ses agriculteurs grâce au Feader2, aux plans de filières, à la DJA3. « Pour répondre aux besoins, nous avons adapté notre budget en le rallongeant de 20 millions d’euros. Doté de 130 millions d’euros annuels, il est le plus gros budget agricole de France », a souligné l’élu régional. Le mot de la fin fut pour le préfet de l’Isère, Louis Laugier, qui reconnaissant les grandes difficultés rencontrées par la profession, a indiqué aux agriculteurs que les services de l’État restaient à leurs côtés. « Depuis la crise, les réunions avec la chambre d’agriculture de l’Isère, la MSA, les syndicats, n’ont pas cessé. Certes, le travail a été légèrement interrompu par la dissolution de l’Assemblée nationale, mais il va reprendre. Et sur la FCO, ne nous racontons pas d’histoires, même avec un ministre démissionnaire, les canaux fonctionnent. Il n’y a pas de “ no man’s land “ au sein des services de l’État », a-t-il explicité. 

Isabelle Brenguier

1 OPA : Organismes professionnels agricoles.
2 Feader : Fonds européen agricole pour le développement rural.
3 DJA : Dotation jeunes agriculteurs.

Ce dont les agriculteurs ont besoin

Thierry Coué, secrétaire général de la FNSEA, était présent à la Foire de Beaucroissant pour clamer l’impatience du monde agricole face aux besoins exprimés depuis janvier dernier.
«C’est une année particulière », a lancé Thierry Coué, secrétaire général de la FNSEA, lors de son déplacement, vendredi dernier, à la Foire de Beaucroissant. Devant le cortège inaugural et en présence des présidents du Département et de la Région, ainsi que des députés de l’Isère, il a égrené les bouleversements qui affectent la profession agricole : conjugaison du changement climatique et de crise sanitaire « qui crée de l’insécurité en élevage, dans les cultures et dans l’agriculture en général ». Il ajoute à cela « une incertitude politique en France qui ne participe pas à rassurer le monde agricole ». Thierry Coué regrette que l’accord trouvé avec le gouvernement portant sur les revendications des manifestations de janvier dernier et traduit dans le cadre de la loi d’orientation agricole (LOA) n’ait pas abouti. La FNSEA demande principalement : davantage de simplification et des outils fiscaux pour aider les productions animales et végétales. C’est la raison pour laquelle le syndicat majoritaire a rédigé son projet de loi contenant « ce dont on a besoin », indique le secrétaire général.
Prévention, vaccins et trésorerie
Tous attendent une meilleure prévention face aux crises sanitaires, l’arrivée des vaccins et des avances de trésorerie pour les éleveurs via le fonds FMSE * et avec le soutien des Régions et des Départements. Objectifs : le maintien de l’outil de production en élevage et la négociation de « ce virage important ». 

Isabelle Doucet

*FMSE : Fonds national agricole de mutualisation du risque sanitaire et environnemental.