L’exposition variétale cerises du verger expérimental de la chambre d’agriculture du Rhône s’est tenue à Saint-Laurent-d’Agny. Plusieurs variétés étudiées à la station expérimentale fruits Rhône-Alpes (Sefra) sont analysées en fonction de paramètres comme la fermeté, le calibre et la productivité.
Pour chaque variété étudiée, deux arbres sont évalués. « Certaines variétés sont sous filet : le frottement et l’aspect de la peau sont à prendre en compte dans ce contexte », a rappelé Noémie Darloy, conseillère spécialisée arboriculture à la chambre d’agriculture du Rhône, lors de la traditionnelle exposition variétale cerises. Des éléments extérieurs ont impacté l’évaluation variétale cette année. Si les gelées ont été assez douces et que la grêle n’a pas fait de dégâts sur le verger, les oiseaux, eux, ont empêché le ramassage de certaines variétés. « On a également eu une forte attaque des forficules toute la saison », a souligné la conseillère.
Les coups de cœur des ramasseurs
Sur plus de cinquante variétés étudiées, certaines sortent du lot. Si 2023 est sa première année de production, la variété SMS 16 de l’éditeur COT International est à burlat + 7. « Elle peut être intéressante, toutefois tout est à confirmer car c’est sa première année d’observation. Elle a été très bien notée pour son goût. » Avec seulement 5 % d’éclatement pour 44 mm de pluie depuis le 1er mai, SMS 16 dispose d’un potentiel de calibre intéressant (66 % de 28 mm et 14 % de 28 mm). Sa nouaison est bonne, mais « il ne faut pas la ramasser à sur-maturité car les pédoncules se foncent », a prévenu Noémie Darloy. De son côté, la variété carmen « ne présente pas d’éclatement alors qu’elle est signalée comme pouvant éclater », s’est étonnée la conseillère. Avec une première production en 2022 assez faible, son potentiel de production est noté à 4 tonnes, « reste à voir si on peut évoluer de ce côté-là ». Comme la SMS 16, elle présente de très bonnes qualités gustatives, avec une note de 8,5 sur 9. Sous filet, c’est l’une des seules variétés qui n’a présenté aucun dégât. Son calibre est plus qu’intéressant car en moyenne, 43 % font 30 mm et 32 % 28 mm. Elle se récolte à burlat + 14.
Des potentiels à confirmer
Sweet aryana, sweet valina, vanda, babelle ou encore dans la gamme bicolore starlam sont autant de variétés à suivre dans les prochaines années pour confirmer leur potentiel.
Présentant une bonne fermeté et un calibre en majorité de 26 mm, la sweet aryana de Dalival-Salvi se montre intéressante. Malgré 10 % de dégâts dus à la drosophila suzukii, cette année, son potentiel de production est estimé à 26,4 t. « Elle est très sucrée, c’est une jolie cerise même si elle présente un léger détachement pédonculaire. » Avec une production hétérogène d’une année sur l’autre, l’heure est à l’observation de sa stabilisation. La sweet valina, du même fournisseur, se montre intéressante également. « Facile à ramasser, son calibre attire avec une majorité de 30 mm et de 28 mm. » L’éclatement reste raisonnable à 13 % avec 60 mm de pluie. Elle présente une bonne tenue même après dix jours. Mais comme pour sweet aryana, le détachement pédonculaire est présent.
Malgré une très grosse chute du rendement, la vanda sort du lot avec un goût sucré noté 8 sur 9. En moyenne, son calibre est de 28 mm avec cette année, seulement 2 % d’éclatement. Si en 2022, la drosophila suzukii ne l’avait pas épargnée avec 20 % de dégâts, cette année, seulement 6 % sont à déclarer. Son potentiel de production est de 15,9 t. En burlat + 13, « nous regrettons que son homogénéité de maturité soit moyenne ».
Déjà dans le viseur l’année dernière, babelle, de l’éditeur CEP Innovation, tire son épingle du jeu. Récoltée depuis 2014 sur le verger expérimental, son potentiel de production s’élève à 31,9 t. Côté calibre, la moyenne est à 28 mm. Si, cette année, elle a présenté une hétérogénéité de maturité en burlat + 18, elle présente de belles cerises sucrées. Avec 5 % d’éclatement et 72 mm de pluie, elle se positionne dans les variétés à suivre de près.
Charlotte Favarel
Starlam : la bicolore à surveiller
Dans la gamme bicolore, la starlam, d’Agro sélection fruits, présente une bonne qualité gustative. « Elle est néanmoins très sensible aux coups qui impactent la peau, il y a eu 20 % de dégâts de boisage cette année », a indiqué Noémie Darloy, conseillère arboriculture. Si la récolte était estimée au 12 juin, cette année, elle a été faite au 23 juin. Avec un potentiel de production de 25,9 t, elle présente des calibres en majorité de 28 mm et de 26 mm. Une variété à surveiller donc.
La cerise denfer a de l’avenir !
En pleine période de ramassage de cerises, Cep innovation a présenté denfer, une variété prometteuse, récemment commercialisée, qui présente une régularité de production intéressante. La variété denfer est « intéressante pour sa régularité de production, son homogénéité de calibre et sa fermeté », présente Cep innovation, obtenteur et éditeur de porte-greffes et variétés fruitières. « Elle est souple et facile à cueillir. Il n’y a pas vraiment d’éclatement, la floraison est jolie cette année, plus tardive que babelle », constate Noémie Darloy, conseillère arboriculture à la chambre d’agriculture du Rhône. Ce à quoi Guy Perrot, gérant de l’EARL Les vergers du Cri à Chabanière, qui teste la variété denfer sur son exploitation, ajoute : « cette année, il y avait énormément de branches à plat et elles se sont bien ramifiées. On compte en moyenne 60 cm de pousse, les cerises sont plutôt fermes et juteuses, je pense que cette variété a de l’avenir ».
28 mm de calibre
Depuis 2011, le verger expérimental de Saint-Laurent-d’Agny a planté deux arbres de la variété denfer. « En général, on fait 22 kg par arbre. On a planté les deux en 2011, mais la vraie production a commencé à partir de 2016. On aurait pu aller jusqu’à 95 kg par arbre en comptant tous les déchets mais on a eu des dégâts. En grande majorité liés à la drosophila suzukii, à hauteur de 45 %, et la grêle à hauteur de 15 %. En théorie, on devrait faire 26 t/ha »,
observe la conseillère. Si 5 % des cerises avaient un calibre de 30 mm, la grande majorité (59 %) atteignait 28 mm en 2022 et 29 % affichaient un calibre de 26 mm. D’une coloration homogène avant récolte, la denfer « présentait une couleur verte/jaune au 23 mai et elle a basculé en couleur à partir du 1er juin pendant 10 à 15 jours », note Noémie Darloy.
Commercialisée depuis deux ans
« Sur ce verger, il y a une certaine régularité de production tous les ans et une mise à fruits. Elle mûrit juste avant babelle avec une régularité qui plaît. Comme la variété est assez homogène, on peut récolter en un seul passage », remarque Christelle Pitiot, responsable technique et développement chez Cep innovation. L’éditeur exclusif mondial de variétés fruitières commercialise la cerise denfer depuis deux saisons. « Nous avons un arbre donneur de greffons et, depuis deux ans, la variété est greffée », précise-t-elle. Pour arriver à des résultats intéressants, le temps de création de la variété a été long. « On observe les racines, on fait une présélection où beaucoup de variétés sont écartées selon leurs résultats. On en garde seulement trois ou quatre. Le schéma de sélection permet de repérer les variétés et des hybrides intéressants. Une fois ce choix effectué, on augmente le nombre d’individus et les sites. »
Cep Innovation édite la variété denfer dans le monde, « avec différents porteurs pour suivre le développement de la variété ».
Charlotte Favarel