FOURRAGES
Ovin : du sorgho fourrager pour sécuriser l’autonomie alimentaire 

À Divajeu, après la sécheresse de 2003, Éric Theolier a introduit le sorgho multi-coupes qu’il récolte en fourrage ou fait pâturer par ses brebis.

Ovin : du sorgho fourrager pour sécuriser l’autonomie alimentaire 
Chez Éric Theolier, le sorgho, pâturé ou fauché, offre une sécurité qui lui évite de taper dans son stock de fourrages en période estivale. © E.Theolier.

Éric Theolier est installé à Divajeu sur une centaine d’hectares. La moitié est cultivée en céréales et semences. L’autre moitié est constituée de prairies permanentes, parcours et cultures fourragères pour son troupeau de 200 brebis (préalpes et mourerous). Les agnelages s’étalent de novembre à mars et les agneaux sont commercialisés en direct à des bouchers drômois.
Après l’épisode de sécheresse de 2003, il s’est lancé dans la culture du sorgho fourrager. « J’avais engagé une réflexion pour savoir avec quoi alimenter les brebis à partir de mi-août pour ne pas puiser dans le stock fourrager. J’ai, dans les années qui ont suivi, été aidé par le conseiller ovin de la chambre d’agriculture de l’époque, Jacques Benoit, pour trouver des variétés de sorgho de qualité », commente-t-il. Désormais, il cultive chaque année une petite surface en sorgho qu’il récolte en fourrage ou fait pâturer.
En 2023, dans le cadre de l’action « fourrages ovins et changement climatique », portée par la chambre d’agriculture et la fédération ovine de la Drôme (FDO 26) grâce au programme Territoire d’innovation Biovallée, il a testé le mélange Estimax Opti. Celui-ci se compose de sorgho multi-coupe, moha, tournesol et pois fourrager. « Je l’ai semé début juillet sur 0,5 ha à proximité de la bergerie. Les brebis ont pu y pâturer cinq semaines de début septembre à début octobre en complément de l’herbe. Chaque jour je leur donnais accès à une bande d’environ 5 m de large par 50 m de long. Généralement en une heure c’était mangé », commente l’éleveur. D’après les mesures réalisées par Jean-Pierre Manteaux, conseiller élevage et adaptation au changement climatique, le rendement du mélange pâturé en septembre chez Eric Theolier a atteint 4 tonnes de MS/ha*. 

Une sécurité  pour préserver les stocks de fourrage

Avec une quinzaine d’années de recul sur l’introduction du sorgho sur son exploitation, l’éleveur confirme que c’est une plante très productive. Sur une autre parcelle il avait également implanté, toujours dans le cadre du suivi avec la chambre d’agriculture, quatre variétés différentes de sorgho. Mais il a semé là aussi tardivement, début juillet, car il disposait déjà d’un bon stock de fourrage par ailleurs. Le sorgho pouvant vite représenter des volumes important, l’éleveur n’avait pas assez de place pour stocker la récolte de plusieurs coupes. « Habituellement, je le sème plutôt fin mai - début juin », précise Eric Theolier. Sur les 0,5 ha, fauché une seule fois fin septembre, il a atteint 4,5 t de MS/ha**. 
Le sorgho, pâturé ou fauché, offre ainsi une sécurité qui lui évite de taper dans son stock de fourrages en période estivale. D’autant qu’Éric Theolier dispose d’une retenue collinaire d’environ 12 000 m³ construite en 1991. Celle-ci lui permet d’avoir accès à un peu d’eau pour faire repartir le sorgho si nécessaire, même si la culture est capable d’attendre sans se dégrader en période sèche.
« Le but du projet “fourrages ovins et changement climatique” est de montrer l’intérêt du sorgho dans les systèmes ovins allaitants. Aujourd’hui, il existe un plus grand nombre de variétés qui permettent de mieux répondre aux besoins des éleveurs ovins, davantage qu’il y a une dizaine d’années », assure Louise Riffard, animatrice à la FDO 26.

Sophie Sabot

* MS/ha : matière sèche par hectare.
** Un autre suivi expérimental réalisé chez Frédéric Andéol à Montclar-sur-Gervanne a permis d’estimer à 10 t de MS/ha le rendement d’un sorgho non irrigué pâturé trois fois.

Bien récolter le sorgho fourrager

Pour Éric Theolier, le choix des variétés est important selon la valorisation que l’on choisit pour son sorgho fourrager. Il recommande de choisir des variétés à épiaison tardive pour pâturer ou faucher avant l’apparition des épis. « Si l’on veut faire pâturer, mieux vaut choisir différentes variétés dont la croissance s’étalera dans le temps, sinon on aura trop de matière à la fois pour le pâturage ou alors, il faudra le faucher pour garder la qualité », conseille-t-il. 
Il faut également avoir en tête qu’en cas de fauche, le sorgho a besoin d’une fenêtre de huit jours avant d’être pressé. Éric Theolier utilise une faucheuse conditionneuse qui écrase la tige et accélère le séchage. Il fane également deux fois. 

S.S.

PRÉCAUTIONS

Les variétés multi-coupes de sorgho peuvent être récoltées en vert et distribuées ou être pâturées. Dans ce cas, il faut attendre que la plante atteigne 60-70 cm de hauteur (en deçà, la plante contient de la dhurrine qui, en se dégradant dans le rumen, produit de l’acide cyanhydrique, toxique pour les animaux). Un pré-fanage de 24 heures limite ce risque de toxicité. 

Source : Idele