Droit rural
La coupe de bois  par le fermier

Selon la nature des parcelles au moment de la conclusion du bail, il peut être indispensable d’obtenir une autorisation préalable du bailleur pour pouvoir couper des arbres.

La coupe de bois  par le fermier
© Pixabay

Question : Je suis fermier de nombreuses parcelles. Certaines que j’ai pu récupérer en fermage n’ont pas été travaillées depuis longtemps et les bois ont gagné du terrain. J’aimerais les couper pour pouvoir cultiver les terres. Un voisin qui avait coupé des bois bordant son champ a eu des problèmes avec son propriétaire et il m’a dit que je ne pouvais pas couper les bois qui me dérangent. Est-ce vrai ?

Réponse : Votre voisin n’a pas tort mais il n’a pas raison non plus. En réalité, la réponse dépend de votre bail et de la nature des parcelles au moment de la conclusion dudit bail. Si vous vous êtes mis d’accord avec le propriétaire sur la nature de la terre, par exemple comme terre labourable, et que dans l’état actuel les terres ont été envahies par des bois, ceci pourrait être analysé comme une autorisation de coupe et le propriétaire ne pourrait pas se retourner contre vous si vous procédiez à une coupe des bois.
Si le bail ne précise rien, la règle de droit dit que vous avez, en tant que preneur, l’obligation de cultiver et d’entretenir le fonds comme le ferait un propriétaire soucieux de son bien. Mais cette obligation est limitée aux seules réparations locatives ou de menu entretien. Il n’est donc pas clairement défini où commence et où s’arrête cette obligation. La jurisprudence a par exemple admis que le remplacement des fils de fer de pieux de la vigne (cass. soc. 10 mai 1957) ou l’entretien d’une installation de drainage (cass. soc. 1 décembre 1960) fait partie de cette obligation. En vue de se chauffer, le preneur pourra demander au bailleur l’autorisation de procéder à la coupe de quelques arbres. Le bailleur est libre de refuser. S’il accepte, seuls les arbres dont la coupe a été autorisée pourront être supprimés, et leur utilisation strictement personnelle. Il est donc essentiel de disposer d’un écrit signé du bailleur.

Pour ce qui est des arbres morts, c’est normalement au bailleur de les faire enlever dans l’année suivant la demande des preneurs. Une fois ce délai écoulé, le preneur pourra en faire son affaire. Dans la réalité, et dans un contexte de bonne entente entre les parties, rien n’empêche de définir par accord d’autres modalités.

Pour déterminer l’étendue de l’obligation d’entretien, il est essentiel de savoir dans quel état était la parcelle concernée lors de l’entrée en jouissance car le but est de ne pas dégrader le fonds. S’il s’agit par exemple de couper des arbres qui existaient sur la parcelle lors de l’accord de fermage et qu’aucune disposition concernant ces arbres n’avait été prise, ceux-ci doivent être conservés. Il est donc indispensable d’obtenir une autorisation préalable du bailleur pour pouvoir les couper.
Ceci est aussi valable pour les obstacles (haies, arbres mais aussi talus, rigoles...) entre des parcelles : le preneur n’est pas libre de les supprimer pour réunir les parcelles en vue d’améliorer les conditions d’exploitation. Il ne peut procéder à ces aménagements fonciers pendant la durée du bail qu’avec l’accord du bailleur (art. L. 411-28 du code rural). En pratique, il faut notifier son projet au bailleur par lettre recommandée avec accusé de réception. Le bailleur dispose ensuite d’un délai de deux mois pour s’opposer à la réalisation des travaux. Sachez que l’absence de réponse dans les deux mois vaut accord du bailleur.

En cas de non-respect : les travaux qui n’ont pas été autorisés, sont irréguliers et engagent la responsabilité du preneur. En clair, le propriétaire peut demander la remise en état des lieux ou, à défaut, des dommages et intérêts pour dégradation. Comme la détermination de l’obligation d’entretien n’est pas toujours facile, il est judicieux de demander l’autorisation écrite de votre bailleur si vous avez le moindre doute sur l’étendue de votre droit de couper des bois.

Le service juridique de la FDSEA 26 , Nathalie Kotomski