SOLAIRE
Quelle place pour le photovoltaïque dans les fermes ?

Depuis quelques années, dans les fermes et les champs, poussent des panneaux solaires qui offrent de nombreux avantages aux agriculteurs qui en font le choix mais qui posent certaines questions.

Quelle place pour le photovoltaïque dans les fermes ?
Les grands bâtiments d’élevage sont les plus propices au développement d’installations photovoltaïques. ©Chambre d’agriculture du Rhône

Dans un contexte d’accélération du développement des énergies renouvelables, le photovoltaïque connaît une croissance exponentielle.  En effet, la production d’électricité d’origine solaire a bondi de 13 % entre 2020 et 2021, pour atteindre 14,3 TWh au niveau national, soit 3 % de la production électrique totale, selon le bilan électrique 2021 de RTE. Avec 1,327 TWh produit en 2020, la région Auvergne-Rhône-Alpes a fourni 10 % de la production nationale d’électricité photovoltaïque (selon l’Observatoire régional climat air énergie).

L’agriculture, un terrain propice

S’il est bien difficile d’évaluer la place du secteur agricole, par manque de chiffres, les acteurs du terrain le voient : « Il y a un énorme engouement. Les agriculteurs sont de plus en plus démarchés par des installateurs », constate ainsi Enzo Casnici, conseiller énergie à la chambre d’agriculture du Rhône et référent régional sur le photovoltaïque. Notamment parce qu’un arrêté du 6 octobre 2021 (S21) a supprimé un certain nombre d’obstacles au développement de grands projets photovoltaïques dans le cadre d’installations agricoles. « Le précédent arrêté avait tendance à limiter les installations à 100 kWc, se souvient Enzo Casnici. Avec l’arrêté S21, les projets allant jusqu’à 500 kWc deviennent d’une simplicité déconcertante. » Depuis, la tendance est au développement de grands projets avec vente totale de l’électricité, notamment parce qu’ils affichent une rentabilité intéressante. Pour une installation de 250 kWc, avec l’ensoleillement du département du Rhône, « on peut espérer 60 000 à 80 000 euros de bénéfice net sur vingt ans, estime ainsi le spécialiste, qui précise que les installations ont plutôt une durée de vie de trente à quarante ans actuellement. » Ces grandes installations nécessitent de grandes surfaces de toiture. C’est pourquoi, ce système est particulièrement adapté aux exploitations d’élevage bovin, notamment en Auvergne-Rhône-Alpes. On trouve également quelques-uns de ces grands projets sur des grands bâtiments de stockage de matériels, dans les cuma par exemple.

À la croisée des chemins

Un autre système continue à avoir la cote auprès des agriculteurs en ces temps de flambée des prix de l’électricité : celui de l’autoconsommation. Réglementé depuis 2017, il permet de consommer l’électricité produite sur place et, si on le souhaite, de revendre le surplus. « L’autoconsommation peut plus facilement s’envisager sur de petites exploitations et est notamment intéressante pour tous ceux qui font de la transformation : une exploitation caprine fromagère, du maraîchage ou de l’arboriculture avec transformation en bocaux par exemple », explique Enzo Casnici. « Mais un projet d’autoconsommation se calcule de façon très fine. Il faut bien connaître ses consommations pour être sûr que la production et la consommation s’équilibrent. Et il faut avoir une majorité de consommation d’électricité en journée. »

L’agrivoltaïsme à l’étude

Pour trouver le projet le plus adapté, les chambres d’agriculture proposent un accompagnement, via du conseil, des formations ou encore une étude des offres reçues. Si les bâtiments agricoles sont le support historique des panneaux solaires, de nouveaux types d’installation se développent, via l’agrivoltaïsme qui fait cohabiter production agricole et production d’électricité : installation de panneaux sur des serres, ombrières sur des exploitations en arboriculture, viticulture, élevage… Selon la définition de l’Ademe, les panneaux doivent toutefois apporter « un service d’adaptation au changement climatique, un service d’accès à une protection contre les aléas, un service d’amélioration du bien-être animal ou un service agronomique pour les besoins des cultures, et ce, sans induire ni dégradation importante de la production agricole quantitative et qualitative, ni diminution des revenus issus de la production agricole ». « Il y a un véritable emballement, analyse Enzo Casnici. Mais nous préférons rester vigilants. Ces projets encore à l’état d’expérimentation doivent être étudiés sur le temps long, avec différentes conditions climatiques. Il faut encore s’assurer que cela n’entraîne pas de perte de production et ne génère pas à terme une perte de foncier agricole. »

Leïla Piazza

Énergies  renouvelables

Sénat et exécutif s’entendent  sur un « avis conforme » des maires

Le Sénat et le gouvernement sont parvenus le 3 novembre à trouver un compromis dans le cadre du projet de loi d’accélération des énergies renouvelables pour tenir compte de l’avis des maires sans instaurer un droit de veto aux projets. En commission, le rapporteur LR Didier Mandelli avait fait adopter une mesure visant à donner aux communes un droit de veto pour pouvoir s’opposer à tout projet d’énergie renouvelable, y compris pour les communes limitrophes. Cette disposition a été supprimée dans l’hémicycle. Le Sénat a voté un dispositif alternatif proposé par la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher. Il combine la proposition votée en commission d’une planification « ascendante », partant des territoires, avec un amendement du gouvernement permettant aux maires d’avoir « le dernier mot » pour la phase d’application. « Chaque maire définit des zonages dans lesquels il peut ou souhaite recevoir des énergies renouvelables », a détaillé la présidente de la commission des Affaires économiques, Sophie Primas (LR). « Tout ça est agrégé et va redescendre dans les documents d’urbanisme opposables – ScoT, PLUI, PLU ». Un sous-amendement du rapporteur pour avis Patrick Chauvet (centriste) « précise que la commune doit donner son accord ». 

Les sénateurs proposent davantage  de contrôle des installations
De nouveaux types d’installation se développent, via l’agrivoltaïsme qui fait cohabiter production agricole et production d’électricité. ©Sun agri

Les sénateurs proposent davantage  de contrôle des installations

Le Sénat a adopté, le 4 novembre en première lecture, le projet de loi (PJL) d’accélération des énergies renouvelables, qui intègre la proposition de loi (PPL) « en faveur du développement raisonné de l’agrivoltaïsme », y ajoutant un amendement pour davantage de contrôle des installations. Contre l’avis du rapporteur et du gouvernement, les sénateurs ont voté en faveur d’« un suivi et un contrôle réel des installations agrivoltaïques ». « Dans un souci toujours de préservation de l’activité agricole, ils ne voudraient pas qu’une fois autorisée, une installation agrivoltaïque ne fasse plus jamais l’objet de contrôle, ce qui ouvrirait la voie à des dérives certaines », explique l’objet de l’amendement. Les sénateurs ont adopté un autre amendement, avec l’avis favorable du gouvernement (défavorable du rapporteur), visant à « s’assurer que des bâtiments inutiles voire nuisibles à l’activité agricole ne seront pas construits uniquement pour supporter des panneaux photovoltaïques, et donc d’éviter les nombreux projets « alibis » notamment sous serre ». Le PJL d’accélération des énergies renouvelables doit être examiné le 5 décembre par l’Assemblée nationale.