Découverte
Il crée son activité de fermier-brasseur à Montélimar

Regroupant deux exploitations sur une surface totale de 40 hectares, le Domaine du Bois de Laud, à Montélimar, est une ferme familiale qui n’a eu de cesse d’évoluer au fil des années et des générations.

Il crée son activité de fermier-brasseur à Montélimar
Sébastien Arnaud se revendique comme étant un fermier-brasseur. © AP

Un retour sur les terres de son enfance. Depuis 2020, Sébastien Arnaud s’est installé sur l’exploitation familiale, un ancien domaine viticole acheté par ses arrière-grands-parents en 1954 sur les hauteurs de Montélimar. Après des études d’électronique, il réalise en 2006 un BPREA au CFPPA du Pradel (07) option viticulture. Par la suite, il passe une licence de responsable commercial vin chez Vivarais Formation, à Tournon-sur-Rhône. « J’avais alors 23 ans et l’envie de m’installer. Mais à cette époque, en 2007, les conseillers agricoles m’ont complètement découragé de reprendre l’exploitation. J’ai finalement rejoint le groupe Heineken-France Boissons pour lequel j’ai travaillé en tant que commercial, responsable des vins, chef des ventes et responsable d’entrepôt. Depuis sept ans, je travaille en tant que chef de ventes au sein de la brasserie Paulaner, sur près de quarante départements (Auvergne-Rhône-Alpes, Ile-de-France, Est de la France) ». En parallèle de son activité, Sébastien Arnaud s’est spécialisé dans le monde de la bière, en passant un diplôme de sommelier Bière Doemens en 2019 et de brasseur en 2021. Il est aujourd’hui double actif et partage sa semaine entre son activité chez Paulaner et sur le domaine. « J’ai racheté 10 hectares de terres à ma mère, Agnès Laurent, qui est installée sur 30 hectares et se consacre à la production de plantes aromatiques et médicinales pour sa marque de produits cosmétiques Laud’Al Nature et Cosmétique. Nous avons deux exploitations indépendantes sur un seul domaine », explique-t-il.

Un domaine, deux exploitations

Sur ses 10 hectares, il cultive principalement de l’orge brassicole (en rotation avec luzerne et blé), pour confectionner ses bières Wood’Laud (marque déposée). L’orge est ensuite maltée à façon en Ardèche, puis récupérée pour le brassage qui s’effectue au sein de la brasserie Markus, à Cléon-d’Andran. « C’est une belle collaboration qui me permet de faire mes bières selon mes propres recettes et de bénéficier de leur outil de production. En contrepartie, je suis en capacité de leur apporter toute mon expertise en termes de commercialisation, de réseau de distribution… », indique-t-il. Pour la première année, le responsable d’exploitation est satisfait de sa récolte, avec 10 tonnes d’orge, qui représente environ 450 hectolitres. À moyen terme, le fermier-brasseur espère atteindre les 3 000 hectolitres, un objectif qui passera forcément par un agrandissement de la surface cultivée. « Aujourd’hui, sur 10 hectares, je n’ai pas la rotation nécessaire en agriculture biologique. J’ai un besoin immédiat d’agrandir ma surface à 16 ha. Je réinvestis pas à pas dans les terres, le temps d’accompagner ma mère à la retraite », déclare-t-il. Un projet de houblonnière est également à l’étude.

Créer un lieu de vie

Très attaché à la biodiversité, Sébastien Arnaud envisage aussi, sous deux ans, de redonner un nouvel élan à la ferme familiale. « Le domaine est en bio depuis 2015, mais est-ce que cela suffit aujourd’hui ? Nous avons donc fait le choix de travailler avec l’association L’Hirondelle aux Champs pour replanter des haies afin de clôturer le domaine, mettre des perchoirs et des nichoirs, et permettre à la biodiversité de reprendre sa place », explique-t-il. Seize ruches ont d’ores et déjà trouvé place sur l’exploitation et permettent au Domaine de commercialiser son propre miel.
L’exploitation, labellisée Bienvenue à la ferme, mise également sur un projet d’agrotourisme : « Nous aimerions créer une sorte de ferme pédagogique, avec des petits parcours pour que les visiteurs puissent se balader dans les cultures, découvrir le rucher, observer les nichoirs et les perchoirs… Cela nous permettrait d’avoir l’opportunité d’informer les passants, de les éduquer sur les pratiques agricoles, explique Sébastien Arnaud. Nous souhaitons également mettre en place des ateliers de dégustations (accords mets et bières) dans notre nouveau caveau, pour permettre aux amateurs de découvrir l’art de servir la bière, de la déguster, de la commenter », explique celui qui a participé aux championnats du Monde de sommellerie Doemens le 11 septembre à Munich. Une salle intérieure, pouvant accueillir jusqu’à 50 personnes, sera également proposée à la location.

Valoriser le terroir

Pour l’heure, Sébastien Arnaud a commencé à se faire connaître en ouvrant, début juin, une boutique à la ferme, pour la vente directe des produits locaux (bières de la marque Wood’Laud, produits cosmétiques de Laud’Al, miels de la ferme, vins des Vignerons de Valléon…). Dans le même temps, il propose une activité bar pour la consommation sur place (avec l’acquisition d’une licence 3) et des soirées festives. 
Parmi les projets futurs, le fermier-brasseur a pour optique de créer des bières d’Héritage : un « Barley Wine » (vin d’orge, ndlr) en hommage à son grand-père vigneron, et une bière au pain en hommage à son autre grand-père boulanger. Des bières à la grenade ou au romarin sont également en projet. Sébastien Arnaud souhaite également redonner vie à la vigne - et au caveau créé par sa mère en 2000 et inutilisé depuis une douzaine d’années - en reprenant d’ici peu les 15 ha actuellement en location.
À 38 ans, le gérant du Domaine du Bois de Laud s’est donc lancé dans un projet d’envergure (près de 400 000 € d’investissement à cette date). « Aujourd’hui, il existe 3 000 brasseries en France. En revanche, nous ne sommes qu’une centaine de fermiers brasseurs. L’idée était vraiment de me démarquer avec cette notion de terroir à laquelle je suis attaché, avoue-t-il. De plus, de par mon expérience professionnelle, je connais très bien le marché de la bière et ses réseaux de distribution. Mon expertise m’a permis de voir que j’avais une place dans le paysage de Montélimar. »

Amandine Priolet

Les produits locaux sont à l’honneur dans la boutique du Domaine du Bois de Laud : bières, miels, vins, produits cosmétiques… © AP