RENCONTRE
Un rêve d’installation bientôt exaucé

Dans quelques semaines Pauline Bourdi sera officiellement installée en EARL avec son conjoint. Parcours d’une jeune femme très investie dans l’agriculture.

Un rêve d’installation bientôt exaucé
En janvier prochain, Pauline Bourdi rejoindra son conjoint Sébastien Boutarin sur l’exploitation. L’EARL ainsi créée produira sur 70 ha des semences de plein champ, des grandes cultures et des semences de base sous serres. Sans oublier la transformation de colza et tournesol en huile. ©S.S.-AD26

En janvier prochain, Pauline Bourdi, 26 ans, officialisera son installation en EARL avec son conjoint Sébastien Boutarin, lui-même installé à Divajeu depuis une dizaine d’années. Il y a cinq ans, la jeune femme, qui se présentait pour l’élection « Miss France agricole 2019 », affirmait : « J'aimerais un jour pouvoir m’installer et faire de mon rêve une réalité ». L’heure est donc venue après un parcours diversifié qui lui a permis d’acquérir expérience et maturité dans le monde agricole.

« Après mon bac sciences et technologies de l’agronomie et du vivant (STAV) au lycée du Valentin, je suis rentrée très vite dans la vie active, à 20 ans. Durant presque cinq ans, j’ai été salariée d’une exploitation en vaches laitières à Comps. J’assurais la traite, les soins aux animaux, l’alimentation, le suivi de la reproduction. C’était une très belle expérience et j’aimais ce troupeau », confie la jeune femme. En 2022, elle décide de se rapprocher de l’exploitation de son conjoint dans la perspective de son installation. Elle trouve alors un poste d’ouvrier agricole à temps plein dans une exploitation en ail semence où elle découvre toutes les facettes de cette culture, emploi qu’elle quittera dans quelques semaines.

Deux serres en production de semences de base

« M’installer en élevage était mon but. Mais c’était impossible de construire un projet en partant de rien, que ce soit en bovin lait ou viande, d’autant plus sur un territoire pas forcément adapté pour l’élevage », regrette-t-elle. Son conjoint et futur associé en EARL est à la tête d’une entreprise de travaux agricoles (ETA) et d’une exploitation de 70 ha dont une quinzaine d’hectares en semences pour HM Clause, le reste en grandes cultures. « Sébastien s’est spécialisé en agriculture de conservation des sols. Il a notamment investi dans un semoir direct et essaye de convertir ses clients à cette pratique », précise Pauline Bourdi. L’arrivée de cette dernière devrait permettre de soulager le travail sur l’exploitation. Mais qui dit installation dit nécessité de construire un projet pour dégager un second revenu. Faute de pouvoir s’installer en élevage, c’est vers les semences que s’est orientée la jeune femme. Son projet prévoit la mise en place en janvier prochain de deux serres de 500 m² pour attaquer dès 2024 une production de semences de base* en contrat avec HM Clause. Les premiers semis sont prévus en mars. « C’est une production très technique, très manuelle par exemple pour la pollinisation, mais c’est ce que je recherchais. Je ne voulais pas être toute la journée sur un tracteur », commente la jeune agricultrice. Elle sait également qu’elle sera bien accompagnée par les techniciens du groupe semencier. D’ici trois ans, elle projette d’installer deux serres supplémentaires.

Installation sur une surface réduite

Avec ce projet, Pauline Bourdi peut concrétiser son installation sur une surface réduite avec un investissement maitrisé (serres et goutte-à-goutte pour l’irrigation essentiellement). En parallèle, elle a souhaité mieux valoriser une partie du colza et du tournesol produits sur l’exploitation en s’équipant d’une presse à huile. Ses premiers essais de commercialisation d’huile en bouteille, à la ferme et dans quatre magasins de producteurs, sont concluants.

À quelques semaines de son installation officielle, Pauline Bourdi affiche une grande joie de concrétiser son rêve mais aussi une certaine appréhension. « L’avenir du monde agricole est quand même un peu inquiétant », déplore-t-elle en montrant sur son téléphone les photos partagées par une collègue maraîchère dont l’exploitation a été vandalisée la nuit précédente (lire ici). « Comment faire pour que cette hostilité envers le monde agricole s’arrête ? Pour qu’on nous écoute enfin, qu’il s’agisse du sommet de l’État ou des préfets ? », interroge-t-elle.

Ces questions, elle les partage largement avec ses collègues au sein du syndicat Jeunes Agriculteurs. Depuis 2020, elle est présidente du canton JA de Crest mais s’apprête à passer la main pour mieux se consacrer à son installation. « J’étais très jeune quand j’ai accepté de prendre cette présidence mais l’ancien président avait promis de m’accompagner. J’ai pu prendre mon envol progressivement et j’ai adoré cette expérience », raconte-t-elle. Pour clore ce mandat, elle s’est investie dans l’organisation d’un évènement festif à Crest : la deuxième édition de la parade de Noël des Jeunes Agriculteurs le 9 décembre prochain. Après cet événement, l’esprit de Pauline Bourdi sera tourné vers un seul objectif : le lancement de sa nouvelle activité en janvier prochain.

Sophie Sabot

* Issues de la multiplication des pré-bases, les semences de base sont les semences mères des semences commerciales. Elles exigent un taux de pureté très élevé, d’où la production en structures fermées. Pour l’agriculteur, c’est une production plus contraignante (investissement, temps de travail) mais qui offre une rémunération sur de petites surfaces.