En cas d’échange de parcelles, le fermier est tenu de respecter certaines conditions.
Question : Notre commune est très morcelée et, avec les voisins agriculteurs, nous avons l’habitude de nous échanger certaines parcelles afin d’obtenir de plus grande surface, plus facile à travailler. Un de mes propriétaires s’est aperçu que les terres qu’il me louait étaient dans les faits exploitées par un autre agriculteur. Quand je lui ai expliqué que la rentabilité de nos exploitations dépendait directement de ces échanges de jouissance, il a accepté notre pratique. Si un autre propriétaire n’est pas d’accord avec ces échanges, quelles incidences cela peut avoir sur nos baux ?
Réponse : Comme vous le dites, dans les campagnes, des échanges de terres se pratiquent en jouissance permettant ainsi à l’agriculteur de regrouper du foncier autour de son siège d’exploitation, d’éviter des déplacements trop importants, de se retrouver enclavé dans l’exploitation d’un autre agriculteur.
Les règles
Le code rural prévoit cette pratique qui est aussi connue sous le terme d’échanges de culture dans son article L. 411-39 : « Le preneur peut effectuer les échanges… de parcelles qui ont pour conséquence d’assurer une meilleure exploitation ». Le fermier devra respecter certaines conditions :
- l’échange ne doit pas dépasser un certain seuil, fixé par arrêté départemental. Pour le département de la Drôme, le fermier peut échanger la totalité de la surface louée - voir article 5 de l’arrêté préfectoral n°2011343-0001 du 09/12/11 modifié par l’arrêté n°2012335-0019 du 30/11/12.
Selon l’article L. 411-39 du code rural, les échanges ne peuvent porter sur la totalité du bien loué que si sa surface n’excède pas le cinquième de la superficie minimum d’installation, compte tenu de la nature des cultures (pour le département de la Drôme, 1/5e de 20 hectares, soit 4 hectares).
- il doit notifier, préalablement, le projet d’échange au propriétaire. La notification est faite par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Le propriétaire qui s’oppose à l’échange doit saisir le tribunal paritaire dans un délai de deux mois à compter de la réception de l’avis du preneur. S’il ne saisit pas le tribunal dans ce délai, il est réputé avoir accepté l’opération.
Les conséquences
L’échange en jouissance ne modifie en rien les relations entre le fermier et son propriétaire. Le fermier est toujours tenu envers son propriétaire de toutes les obligations figurant dans le bail. Par conséquent, il est donc responsable de tous les agissements fautifs du fermier avec qui l’échange a été passé. Il est à noter que le fermier conserve son droit de préemption sur les parcelles qu’il a loué et qui font l’objet d’un échange.
Le non-respect de la procédure de notification pouvait avoir des conséquences sérieuses. En effet, l’article L 411-39 est considéré comme une exception à la prohibition pour les sous-locations qui peuvent être sanctionnées par une résiliation du bail initial. Ainsi, non seulement la convention d’échange entre les fermiers est nulle, mais le bailleur dispose de la possibilité de demander la résiliation judiciaire du bail initial. La jurisprudence a toujours été claire : dès lors que le fermier est dans l’incapacité de démontrer que le bailleur était d’accord avec l’échange, il encourt la résiliation du bail.
Il convient toujours de respecter les droits des bailleurs et leur propriété en les informant de tout changement qui les concerne sur leur terre. Il est évident qu’un propriétaire souhaite savoir qui travaille ses terres et pour quelle raison. Afin de garder des bonnes relations, il ne peut être que conseillé de respecter cette règle d’information du propriétaire.