POLLUTION
Comment préserver le FAP et le SCR des moteurs

Les dispositifs de dépollution (catalyseur SCR et filtres à particules) montés sur l’échappement des moteurs se sont généralisés sur les tracteurs. Plusieurs critères rentrent en jeu dans leur efficacité et leur durée de vie.

Comment préserver le FAP et le SCR des moteurs
©John Deere / Le FAP est toujours précédé d’un catalyseur d’oxydation (DOC)

Arrivés de manière progressive au fil des normes régulant les émissions polluantes des moteurs, les systèmes de post-traitement bien connus sous les appellations de FAP (filtre à particules) et SCR (réduction catalytique sélective) se sont généralisés sur les dernières générations de moteurs répondant à la dernière étape Stage V. La majorité des tracteurs neufs en sont donc désormais équipés. Ces nouveaux composants, qui ont pu être une source de pannes sur les premiers modèles équipés, ont depuis gagné en fiabilité. Les catalyseurs SCR sont généralement conçus pour être fonctionnels toute la durée de vie du tracteur. Quant aux FAP, après avoir préconisé des changements à 3 000-4 000 heures pour les premières générations, les constructeurs ont largement allongé leur longévité, à plus de 6 000 heures, voire pour la durée de vie de l’engin, en conditions « normales » d’utilisation. Il est toutefois conseillé d’appliquer certaines bonnes pratiques, afin de préserver ces accessoires qui peuvent s’avérer très coûteux lorsqu’il est nécessaire de les changer. L’échange standard d’un FAP se chiffre déjà à plus de 1 000 euros sur un petit tracteur.

GNR et huile moteur de qualité

Premier élément pouvant avoir une incidence sur le bon fonctionnement de ces filtres et catalyseurs : la qualité des fluides utilisés. « Dans le cas de pannes prématurées sur un FAP ou un SCR, nous demandons souvent au concessionnaire de prélever du carburant et de l’AdBlue sur l’engin immobilisé, de manière à faire des analyses pour vérifier leur conformité », indique Romain Lucas, chef produit tracteur chez Fendt. L’arrivée du GNR a coïncidé avec l’abaissement des taux de soufre (10 fois moins que dans le fuel domestique) et l’augmentation du taux de cétane, des évolutions nécessaires à la réduction des émissions polluantes et au bon fonctionnement des dispositifs de dépollution.
« L’utilisation d’un gazole de mauvaise qualité, mais aussi d’une huile moteur contenant trop de soufre est propice à l’encrassement des FAP », confirme Franck Schickele, de la société Technifap, spécialisée dans le nettoyage des filtres à particules. « Le gazole doit répondre à la norme EN 590 ou ASTM D975 et avoir un taux de soufre inférieur à 15 ppm, précise Christophe Lebon, chef de projet après-vente, à l’usine de moteurs John Deere de Saran. Les moteurs équipés de FAP et SCR peuvent accepter jusqu’à 20 % de biocarburants dans le gazole. Au-delà, il y a un risque de régénérations plus fréquentes et d’endommagement des filtres. » Les préconisations en termes de qualité d’huile moteur sont plus strictes vis-à-vis des blocs disposant d’un FAP, pour lesquels la norme ACEA E9 ou API CK-4 est le plus souvent exigée.

L’AdBlue additivé pour les faibles charges

Concernant l’AdBlue, en plus du respect de la norme ISO 22241-1 garantissant une teneur en urée de 32,5 %, la qualité de cette solution indispensable au fonctionnement du catalyseur SCR est dépendante des conditions de stockage. En évitant une exposition à la lumière et en réduisant les écarts de température, l’AdBlue arrive à se conserver près de deux ans. Tandis qu’un produit mal stocké pourra se dégrader en six mois. « Les principaux fournisseurs comme Yara et TotalEnergies proposent deux qualités d’AdBlue : standard ou additivé, indique Nicolas Morel, chez New Holland. La version additivée est spécialement conçue pour les applications à faible charge où le moteur ne monte pas suffisamment en température pour un fonctionnement optimal du catalyseur SCR. Elle est tout à fait adaptée aux tracteurs de cours et autres engins de manutention fonctionnant souvent à bas régime ou au ralenti. »

Un remplissage soigné des réservoirs

Outre sa qualité et ses conditions de stockage, l’AdBlue est sensible aux pollutions lors du remplissage. Lors des ravitaillements sur un chantier, il est recommandé de ne pas utiliser des bidons ayant servi à d’autres liquides. « Comme pour le GNR, il faut tenir propres le bouchon et l’orifice de remplissage, afin de ne pas faire tomber des poussières ou de la terre dans le réservoir. Il est aussi fortement déconseillé de retirer le préfiltre présent à l’entrée du réservoir pour pouvoir utiliser un pistolet à gros débit », prévient Nicolas Morel. En termes d’entretien, le circuit d’AdBlue dispose d’un filtre à changer à intervalle régulier. Mais lorsque celui-ci est colmaté prématurément, cela peut être le signe d’une pollution trop importante du réservoir, imposant parfois le nettoyage de ce dernier.

Respecter les régénérations du FAP

Les bonnes pratiques sont aussi essentielles pour préserver la durée du FAP. Son niveau de colmatage est sous contrôle de l’électronique par une mesure de la pression en entrée et en sortie du filtre. Dans le cas des engins dont le moteur est souvent utilisé à faible charge, la faible montée en température du moteur ne favorise pas la régénération passive et provoque par conséquent un colmatage plus rapide du filtre. Le calculateur moteur peut alors demander plus régulièrement à l’utilisateur de valider le lancement d’une régénération plus poussée, garantissant une montée en température efficace pour brûler les particules. Cette étape est parfois repoussée par les utilisateurs, ce qui peut aboutir à un colmatage prématuré du filtre. « Le risque est que le moteur perde de la puissance et consomme plus », avertit Christophe Lebon. Dans bien des cas, une régénération stationnaire, à effectuer pour certaines marques chez le concessionnaire, résoudra le problème. « Mais quand le FAP est vraiment trop rempli de suie, le nettoyage ou le remplacement sont les seuls recours. » 

Michel Portier 

Nettoyer le FAP, plutôt que  de le remplacer

« Les utilisateurs n’ont pas toujours conscience qu’un FAP, malgré ses régénérations, reste un filtre et qu’il est parfois nécessaire de le nettoyer, voire de le remplacer à terme. Mais contrairement aux filtres habituels qui ont une durée de vie préconisée, il est impossible de prédire une échéance pour intervenir sur un FAP », observe Romain Lucas, chef produit tracteur chez Fendt.
Le nettoyage d’un FAP colmaté est une solution technique qui peut s’avérer dix fois moins chère que le remplacement du filtre. Certains concessionnaires font appel à des spécialistes comme Technifap, auxquels ils envoient des filtres démontés pour un nettoyage avec de l’eau et de l’air sous pression. Le nettoyage reste toutefois une solution de dernier recours, car selon Christophe Lebon chez John Deere, « l’utilisation de produits chimiques et de liquides sous haute pression peut parfois aboutir à un endommagement de la structure du filtre. »