Combiner les outils pour lutter contre les campagnols
Les prairies, les vergers et les cultures de semences sont victimes des campagnols. Pour autant, il n’existe pas un mais des campagnols. Les plus connus et ceux qui occasionnent le plus de nuisances à l’agriculture sont le campagnol provençal et le campagnol des champs. Tour d’horizon des moyens de lutte.

Malgré la présence de prédateurs, comme les renards, les hermines, les rapaces diurnes et nocturnes, les populations de campagnols explosent tous les trois à dix ans en fonction d’un cycle immuable propre à chaque espèce. Pour maintenir ces dernières à un faible niveau et ainsi réduire les dégâts sur les productions, il faut combiner différentes méthodes de lutte directe (à court terme) et indirecte (à long terme, demandant de repenser le maillage du territoire et les pratiques culturales). Il est cependant très difficile et chronophage de mettre en place les méthodes de lutte indirecte à l’échelle de l’exploitation seulement. Elles ne donnent des résultats que quand elles sont mises en œuvre et pensées pour un vaste territoire : on parle alors de lutte collective.
Un campagnol terrestre. La femelle fait 5 à 6 portées par an de 2 à 8 petits.
Quand lutter ?
La lutte contre les campagnols est annuelle et précoce. Elle met en pratique un ensemble d’outils dont certains sont réglementés. Cela demande d’anticiper le phénomène des pics de pullulation et de se projeter sur une échelle de temps de plusieurs années.
A court terme : une lutte contre les taupes et/ou une lutte directe contre les campagnols par piégeage ou produit.
A long terme : repenser le maillage du territoire en aménageant des haies, en accueillant l’ensemble des prédateurs et en pensant à les préserver lorsque le campagnol est moins présent, en cassant régulièrement les réseaux de galeries existants (travail du sol, pâturage tournant).
Comment lutter ?
• Le bromadiolone. Ce produit phytosanitaire, anticoagulant, utilisé pour les luttes contre les campagnols terrestres en prairie n’est plus vendu depuis le mois d’août 2020. Les stocks peuvent être encore utilisés jusqu’au 21 décembre 2020 : à partir de cette date, son utilisation sera interdite en France.
• Les produits à base de phosphure de zinc. Il s’agit d’une molécule non anticoagulante, qui est autorisée pour la lutte contre tous les campagnols. Après des essais mis en place rapidement pour trouver une solution à l’arrêt des appâts secs à base de bromadiolone, le Ratron GW (appâts de blé à base de phosphure de zinc dosé à 25 g/kg) semble donner des résultats satisfaisants en période sèche et avec une population basse. Il faut cependant rester prudent quant à son utilisation à l’automne, car les essais sont toujours en cours. Dose maximale autorisée : 2 kg/ha/an. Mise en place à l’aide d’une canne distributrice.
• Les produits à base de phosphure d’hydrogène PH3. Les galeries de taupes favorisent l’installation et le déplacement des campagnols. Il faut donc mettre en place sur l’exploitation une lutte efficace contre les taupes via le piégeage ou la lutte chimique par fumigation (PH3, usage réglementé). Le piégeage permet de constater quel animal est présent dans les galeries (taupes ou campagnols) et d’adapter ainsi la lutte.
• Le piégeage. Pour que le piégeage soit efficace, il faut avoir un minimum de 50 pièges. Pour une meilleure efficacité, il est recommandé de les relever deux fois par jour (trois fois pour les taupes). Les suivre ensuite sur deux à trois jours, le temps de ne plus attraper de campagnols. L’ensemble de ces pratiques est à mettre en œuvre de manière permanente et en association.
Se faire accompagner
Si vous souhaitez mettre en place ces différentes mesures de lutte, que ce soit contre le campagnol provençal terrestre, des champs, vous pouvez signer un contrat de lutte avec votre organisme à vocation sanitaire (OVS), qui vous accompagnera techniquement dans cette démarche. Si vous vous êtes inscrit dans une démarche de lutte précoce et collective, et que vous avez souscrit un contrat de lutte, vous pouvez prétendre aux indemnisations des moyens de lutte par le FMSE (Fonds national agricole de mutualisation sanitaire et environnemental). Ces indemnisations prennent en charge certains coûts de lutte à hauteur de 75 % des dépenses plafonnées en fonction des barèmes établis en fin de campagne, lorsque l’ensemble des dépenses et recettes du FMSE sont connus. Le barème du FMSE n’est pas connu en début d’engagement des luttes.
Les indemnités sont financées par les cotisations et les crédits publics. Les cotisations doivent couvrir au moins 35 % des dépenses d’indemnisation ; l’État ou l’Union européenne, via le Feader (Fonds européen agricole pour le développement rural) remboursent jusqu’à 65 % de ces dépenses. Les agriculteurs affiliés au FMSE s’engagent à faciliter les opérations de surveillance aux personnes qui en sont chargées. Ils participent, lorsque c’est possible, à la mise en place et au fonctionnement des réseaux d’épidémio-surveillance et des systèmes d’alerte et de prévision. Lorsque la surveillance n’est pas assurée par les services de l’État, ils participent à son financement.
Fredon Auvergne-Rhône-Alpes
Pour en savoir plus, rapprochez-vous de votre OVS végétal et section d’OVS : Fredon Aura : Catherine Prave 04 74 86 40 68.
Nouveau classement pour les campagnols
Les campagnols nuisibles aux cultures (campagnol terrestre, des champs et provençal) n’ont pas été retenus dans la liste des organismes nuisibles réglementés au titre du règlement européen 2016/2031 relatif à la santé des végétaux qui est entré en vigueur au 14 décembre 2019.
Au regard des impacts sanitaires et économiques importants qu’ils peuvent engendrer en période de pullulation, l’État français, par arrêté du 16 avril 2020 portant établissement des listes d’organismes nuisibles au titre 6o de l’article L. 2513 du Code rural et de la pêche maritime, a classé sept espèces comme organismes nuisibles. Parmi celles-ci, se trouvent le campagnol terrestre (Arvicola amphibius ; compris terrestris), le campagnol des champs (Microtus arvalis) et le campagnol provençal (Microtus duodecimcostatus). Cet arrêté permet de rendre obligatoire, par arrêté préfectoral, la surveillance, la prévention et la lutte contre ces organismes nuisibles. Dans un but de lutte collective, quatre arrêtés obligent à mettre en œuvre des mesures de prévention, de surveillance et de lutte sur les départements de l’Ardèche, du Cantal, de la Haute-Loire et du Puy-de-Dôme.
Nouvelle application mobile de surveillance : Arvicola-Obs
Il est aujourd’hui techniquement possible d’informer rapidement un ensemble d’agriculteurs en temps réel, pour leur permettre de mettre en œuvre des moyens de lutte adaptés à leur situation. Un technicien ou un agriculteur va observer une zone définie. Il fait remonter ses informations à une base de données à l’aide d’une application nommée Arvicola-Obs.
Un serveur de données couplé à un système d’information géographique (SIG) permet de réaliser l’analyse des séries temporelles de données de surveillance qui seront produites sous forme de cartes. Ces cartes sont diffusées par des messages techniques dans des BSV (Bulletin Santé du Végétal), ou des messages d’alerte ciblés, des articles de presse.