ENTREPRISE
BM Gel, fabricant drômois de bougies contre le gel
A Châteauneuf-sur-Isère, la société BM Gel est spécialisée dans la production de bougies antigel pour l’arboriculture et la viticulture.
Neuf mois après le terrible gel d’avril dernier sur vergers et vignes, la société BM Gel s’active à la fabrication de bougies anti-gel pour le printemps prochain. Bruno Rispal, arboriculteur et cofondateur de BM Gel (lire ci-dessous), compte sur les bougies pour sauver les récoltes si un tel épisode venait à se reproduire. Avec son fils Julien, ils exploitent en société1 une cinquantaine d’hectares de vergers, dont 80 % en abricots, le reste en nectarines et cerises. « Lors du gel de début avril, nous avons protégé 41 hectares à raison de 150 bougies de 10 litres par hectare. Sur le secteur, les températures sont descendues entre -3,5°C et -5°C. Nous avons allumé à 23 h, d’abord un rang sur quatre puis un rang sur deux. Les bougies ont brûlé jusqu’à 9 h du matin. Nous avons quasiment sauvé les trois quarts de notre récolte et commercialisé plus de 700 tonnes de fruits cette année », expliquent le père et le fils.
Paraffine livrée à 90°C
Pour anticiper tout nouvel épisode de froid printanier, ils font tourner depuis plusieurs semaines la ligne de production de BM Gel. « Nous fabriquons nos bougies à base de paraffine minérale d’origine française », souligne Julien Rispal. Une paraffine issue du pétrole et parfois montrée du doigt pour les fumées qu’elle dégage, « mais c’est cette fumée qui protège les arbres, surtout au lever du jour, justifie-t-il. Si nous ne mettons pas en œuvre ces moyens de lutte contre le gel, il faudra importer des fruits et là ce seront des camions sur les routes tout l’été.»
La paraffine est livrée sous forme liquide par citerne de 25 000 litres à une température de 90°C. « Nous la réceptionnons dans une citerne du même gabarit et nous disposons de trois à quatre heures pour fabriquer nos bougies avant que sa température ne redescende sous les 60°C et qu’elle ne se fige », détaille le jeune homme. BM Gel propose deux formats, en six et dix litres. « En six litres, nous préconisons idéalement 600 bougies/ha pour disposer d’une capacité à lutter en cas de froid extrême ou deux nuits d’affilée. En dix litres, on peut tomber à 300 bougies/ha. Nous recommandons d’ailleurs ce contenant qui présente un meilleur pouvoir calorifique et permet de gagner du temps d’allumage », précise Julien Rispal.
Hausse du coût des matières premières
Fin décembre, BM Gel avait déjà commercialisé l’équivalent de 75 000 litres de bougies et préparé autant en stock. « Beaucoup d’agriculteurs ont anticipé leurs achats, même si ce n’est pas évident pour eux de dégager la trésorerie et de trouver la place pour stocker ces bougies », commente Julien Rispal. Les tarifs2 pourraient en effet augmenter de 20 % début 2022 avec un prix de la paraffine qui fluctue en fonction des cours du pétrole et surtout une forte augmentation du prix du métal. Ce dernier représente 20 à 30 % du coût de la bougie. « C’est pourquoi nous avons mis en place pour nos clients les plus fidèles un service de remplissage des pots. Cela peut permettre de les réutiliser trois à quatre fois, tant qu’ils sont en bon état. C’est une économie d’environ 2 euros par bougie, soit 600 euros par hectare », signale le jeune homme, qui supervise la logistique de la société.
Côté production, « nous sommes en capacité de travailler jusqu’à trois citernes de 25 000 litres par jour, soit 7 500 bougies de dix litres », détaille Bruno Rispal. Mais le fondateur de BM Gel avertit : « Nous nous sommes mis à fabriquer des bougies d’abord pour protéger notre verger. Aujourd’hui leur commercialisation apporte un petit complément de revenu mais nous ne pouvons répondre aux demandes de dernière minute ». Le message aux utilisateurs est donc clair : constituer les stocks au plus tôt car les prix pourraient augmenter et les disponibilités ne sont pas garanties au printemps. Et Julien Rispal de conclure : « Une bougie stockée dans de bonnes conditions pourra s’utiliser plusieurs années après sa fabrication et c’est en quelque sorte une forme d’assurance récolte ».
Sophie Sabot
1 SCEA Les Vergers Dauphiné Provence qui compte quatre associés : Bernadette Rispal, son frère Bruno Rispal et les enfants de ce dernier, Julien et Camille.
2 Pour l’instant, il faut compter 2 100 euros pour protéger un hectare avec 150 bougies de 10 litres.
BM Gel en bref
En 1998, Bruno Rispal, arboriculteur à Châteauneuf-sur-Isère, subit de plein fouet un gel de printemps sur ses vergers. L’année suivante, il crée avec Michel Seyvet, commercial en produits phytosanitaires, la société BM Gel pour produire des bougies à base de paraffine minérale. BM Gel dispose d’une ligne de conditionnement qui lui permet de fabriquer des bougies antigel en format 6 ou 10 litres. « Une année où la demande est importante, nous pouvons travailler jusqu’à 1 000 tonnes de paraffine », précise Bruno Rispal. Une grande partie des bougies est commercialisée en vallée du Rhône, via des revendeurs mais également jusque dans le Piémont italien.