Sanitaire
Abricot : le risque monilia bientôt modélisé ?

Maladie problématique sur abricotiers, Monilia continue de causer des problèmes quantitatifs et qualitatifs aux arboriculteurs. Des essais sont en cours depuis 2018 pour établir un modèle de prévision de risque.

Abricot : le risque monilia bientôt modélisé ?
Sur abricotier, le pétale est bel et bien la principale porte d’entrée de Monilia laxa. © CZ

«Dans 95 % des cas, nous nous trouvons face au champignon Monilia laxa, dont la pression varie en fonction du climat. En France, ce champignon se conserve en période hivernale au niveau des chancres, produisant par la suite des conidies qui se développent ensuite sur fleurs et contaminent les vergers », résume Laurent Brun, ingénieur Inrae au Domaine de Gotheron, dans la Drôme. Depuis plusieurs années maintenant, la recherche travaille à l’élaboration d’un modèle de prévision de la maladie en vue de fournir aux producteurs un outil prédictif les aidant dans la lutte contre ce champignon majeur. Ainsi, en 2017 et 2018, des premières expérimentations ont été lancées, afin d’identifier les stades phénologies sensibles et les conditions climatiques favorables à son développement. Les travaux se sont faits sur des abricotiers plantés en pots pièges positionnés en verger, sur la variété Bergarouge.

Des pots en serre scrutés à la loupe

« Trois résultats d’intérêts sont ressortis », note le scientifique. Tout d’abord, la contamination des pots témoins se fait uniquement dès lors qu’ils sont exposés en verger. Ensuite, il n’y a pas de contamination au stade C. De plus, la sensibilité à la maladie est croissante du stade D au stade F. « Enfin, nous n’avons pas pu tester le stade floraison déclinante dans le cadre de ce protocole », précise Laurent Brun. Ces précieuses données ont alors permis de calibrer un premier modèle climatique indiquant le taux théorique de fleurs contaminées par Monilia  laxa en fonction de la pluviométrie et de la température.
En 2020, les travaux se sont orientés vers une nouvelle hypothèse, « à savoir si c’était le pétale qui était bien la porte d’entrée de la maladie jusqu’au rameau ». Dans le détail, les abricotiers en pot ont été installés en chambre froide durant l’hiver. Début février, des séries de douze pots ont été installées en serre, à intervalle régulier avant d’être installés dans le verger non traité pour 24 à 48 heures. Puis, ces pots ont été à nouveau entrés en serre ou enceinte climatique. Les pétales ont alors été retirés (en laissant les autres organes de la fleur) et, un mois plus tard, des observations ont été réalisées sur les rameaux.
Les observations sur le taux de rameaux à fleurs moniliées (Expérimentation sur pots avec la variété Bergarouge en 2020 ) montrent, d’une part, que le pétale est bel et bien la principale porte d’entrée de M. laxa, le passage vers le rameau s’effectuant à partir de la colonisation de ce pétale. D’autre part, il faut noter que la fleur au stade floraison déclinante ne permet pas le passage du champignon vers le rameau.

« Nous avons encore du travail »

« Ces travaux nous ont permis de proposer un classeur Excel de calcul des risques fleur, avec un risque pondéré en fonction des différents stades phénologiques », annonce alors le spécialiste de l’Inrae. En termes d’utilisation, ce classeur est mis à disposition des essais d’évaluation des sensibilités variétales. « La difficulté est que les variétés ne sont pas exposées au même risque car leurs dates de floraison diffèrent. C’est donc plus aujourd’hui un outil d’appui de l’analyse qu’on modèle à proprement parler. Nous avons encore du travail », concède-t-il.
Alors, futur outil d’aide à la décision ? Pas sûr. « Nous devons encore le valider dans différentes conditions expérimentales, géographiques et climatiques, sachant que les dégâts de monilia dépendent à la fois du risque climatique printanier, du stade phénologique et de la sensibilité variétale (en cours d’évaluation), sans compter le stock d’inoculum présent dans la parcelle. Or, ce dernier point est encore bien inconnu, car c’est quelque chose que nous ne savons pas encore évaluer en verger. »
D’autres travaux sont également en cours, notamment sur floraison importante, un éclaircissage à la fleur, « pour voir si cette opération a un quelconque impact sur les dégâts monilia », conclut Laurent Brun.

Céline Zambujo