Les agriculteurs travaillent de plus en plus avec des outils ou des machines connectées. Une révolution qui a notamment démarré au début des années 1990 dans les élevages.
Le numérique est de plus en plus présent dans la vie quotidienne et professionnelle. Le monde agricole ne fait pas exception à la règle. Robot de traite, outils d’aide à la décision, exosquelette, guidage par GPS, détection des chaleurs… Le numérique est partout et, il est « souvent perçu par les gouvernements et les experts comme une opportunité à saisir pour contribuer à l’évolution de l’agriculture, au bénéfice des agriculteurs, des consommateurs et plus généralement de la société », soulignent l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) et l’Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria) dans leur livre blanc « Agriculture et numérique » publié en janvier 2022. Ces outils peuvent en effet aider les agriculteurs à prendre leur décision de manière éclairée. Preuve en est dans l’élevage où les premiers outils connectés sont apparus il y a une trentaine d’années avec l’arrivée au début des années 1990 des compteurs laitiers puis des premiers robots de traite.
L’exemple de l’élevage
« L’élevage a toujours été un grand gourmand de données collectées », expliquait Jean-Claude Pette, agriculteur, producteur de lait et de fromage de brie en mars 2024 à l’occasion d’une séance hebdomadaire de l’Académie d’agriculture de France sur la thématique « Le machinisme agricole à l’heure de la révolution numérique ». Si, selon cet agriculteur, la collecte de données n’est donc pas nouvelle pour les éleveurs, c’est la manière dont elle se passe qui a fondamentalement évolué ces trente dernières années. Si, avant, des prestataires se déplaçaient dans les fermes pour récupérer les données, il a rappelé que « petit à petit » des outils ont été installés permettant « d’avoir des données plus régulièrement et de les traiter directement dans les exploitations » pour élaborer notamment un plan d’alimentation personnalisé par vache.
En élevage, la grande révolution demeure l’arrivée des robots de traite. « Aujourd’hui, un robot est capable de mesurer la température du lait et de la vache, la conductivité du lait, le taux cellulaire, l’urée, les corps cétoniques, la progestérone… […] Nous avons un retour immédiat du résultat de la donnée, même si le constructeur se garde le droit de rester propriétaire de toutes les données en copropriété avec l’éleveur. » Et pour un « éleveur robotisé », si les données peuvent être gérées sur un ordinateur ou une tablette, « le téléphone portable est l’outil indispensable, car un robot vous appelle plusieurs fois par jour pour une vache qui ne se place pas bien ou qui est récalcitrante par exemple. Il y a beaucoup d’interventions à faire ». Ainsi, s’il est certain pour Jean-Claude Pette que le robot a permis de réduire considérablement la pénibilité du travail, le gain de temps lui reste assez faible, car l’agriculture passe beaucoup plus de temps à gérer les données qu’il reçoit et à suivre son troupeau d’une façon différente. « Nous gérons notre temps différemment. L’éleveur a gagné en autonomie de décision. » Au-delà du boîtier dans les bâtiments ou encore les téléphones portables, le numérique s’invite également à bord des tracteurs qui sont, comme l’a rappelé Philippe Gate, membre de l’Académie d’agriculture, « les capteurs qui passent le plus souvent dans un champ, entre le semis et la récolte ».
Gérer les aléas
Par ailleurs, les outils d’aide à la décision qui sont de plus en plus précis et performants sont très développés dans l’ensemble du monde agricole et notamment en grandes cultures. « Pour gérer les aléas, les OAD sont là », soulignait Philippe Gate avant de prendre l’exemple des maladies « qui ne sont plus inféodées à une aire géographique. » Pour Philippe Gate, il y a bien évidemment derrière tout cela des bénéfices économiques et environnementaux. Le numérique permet également de sécuriser les décisions pour la traçabilité, le respect du cahier des charges et la réglementation. Toutefois des questions demeurent et le développement de ces outils demande du temps et de l’argent. La révolution est donc en marche et elle est loin d’être finie.