Gros potentiel pour des installations photovoltaïques sur bâtiments existants
La chambre d’agriculture est partenaire de la société d’économie mixte Rovaler pour le développement de panneaux photovoltaïques sur les bâtiments agricoles du territoire Valence Romans Agglo.

En 2019, la communauté d’agglomération Valence Romans Agglo (VRA) a adopté son plan climat air énergie territorial (PCAET). Celui-ci prévoit de « développer fortement les productions locales d’énergies ». Dans ce contexte, un potentiel important a été identifié pour la pose de photovoltaïque sur les toitures des bâtiments agricoles existants. « Le gisement brut estimé par la société d’économie mixte Rovaler* [créée en 2010 par VRA pour développer des projets de production d'énergies renouvelables, ndlr] à partir du cadastre solaire est de 70 mégawatts crête (MWc) », explique Jean-Michel Costechareyre, coordinateur territorial en charge du dossier à la chambre d’agriculture de la Drôme. Toujours selon Rovaler, 16 MWc pourraient être installés entre aujourd’hui et 2025, soit une production équivalente à 20 GWh, représentant la consommation d’électricité de 7 000 personnes.
L’idée est de créer une société de projet, qui pourra investir sur les toitures que les agriculteurs lui mettront à disposition dans le cadre d’un bail emphytéotique. D’ores et déjà les membres de cette société sont identifiés : il s’agit de Rovaler, de la Banque des territoires, du groupe Legendre et d’un consortium agricole dont ferait partie la chambre d’agriculture de la Drôme.
Rénover son bâtiment à coût zéro
« L’objectif, précise Jean-Michel Costechareyre, est de proposer à l’agriculteur une solution pour rénover son bâtiment à coût zéro [dans les conditions actuelles de tarifs de l’électricité, ndlr]. La société de projet prendra en charge le désamiantage, l’installation d’une toiture type Bacacier® et la pose des panneaux en échange d’un bail de vingt ans sur sa toiture. » A l’issue des vingt ans, l’agriculteur récupérera l’installation photovoltaïque qui, selon les estimations, serait encore à 90 % de son efficacité de rendement.
Le coût du désamiantage reste cependant un des freins. Dans certains cas, il n’est pas totalement couvert par la rentabilité des panneaux photovoltaïques. Une part peut donc rester à la charge de l’agriculteur. C’est pourquoi Thierry Mommée, élu à la chambre d’agriculture, attire l’attention des porteurs de projets sur l’aide proposée depuis janvier dernier par la Région Auvergne-Rhône-Alpes pour le désamiantage (lire ci-dessous).
Deux promesses de bail signées
Sur le territoire de Valence Romans Agglo (54 communes), l’opportunité est donc offerte de se lancer dans ce projet porté par Rovaler et ses partenaires. « Attention, certains critères devront être réunis, précise Jean-Michel Costechareyre, notamment une surface minimum de 700 à 800 m². » La faisabilité et l’équilibre économique du projet seront également examinés au vu de l’état de la structure du bâtiment et de la distance du point de raccordement au réseau.
« Une dizaine d’études d’opportunité ont été réalisées par Rovaler, indique le conseiller de la chambre d’agriculture, et deux promesses de bail sont déjà signées ». Une cinquantaine de projets pourraient être portés d’ici 2025.
Sophie Sabot
La chambre d’agriculture de la Drôme peut vous présenter ce projet, répondre à vos questions et vous accompagner pour mobiliser l’aide au désamiantage de la Région. Contact : Aurélie Pascolini, [email protected] Tél : 04 75 82 40 00.
* Rovaler est un opérateur énergétique local qui réunit Valence Romans Agglo (51 % du capital), la Caisse des dépôts et consignation (23,9 %), la Compagnie nationale du Rhône (23,9 %) et Energie partagée investissement (1,2 %).
« Ne pas laisser des bâtiments amiantés et délabrés à mes héritiers »

Paul Despesse est l’un des deux premiers agriculteurs à avoir signé une promesse de bail dans le cadre du projet porté par Rovaler. Il exploite 85 ha de céréales. Il dispose également d’un poulailler de 830 m² sur la commune de Valence (poulets de chair en intégration, cinq bandes par an, 16 500 poulets par bande). Celui-ci a été reconstruit en 1995, un an après son installation, suite à un sinistre. Juste à côté se trouve un second poulailler de 850 m², construit dans les années 1970, qui sert aujourd’hui à stocker du matériel. « D’ici deux ans, je ferai valoir mes droits à la retraite. Je sais que le poulailler que j’exploite aujourd’hui a peu de chance d’être repris pour poursuivre l’activité. Il se trouve en bord de route, à proximité d’une zone d’agglomération et ne dispose pas de parcours », commente Paul Despesse. Se pose donc la question du devenir de ces bâtiments à sa retraite. « Je ne veux pas laisser des bâtiments amiantés et délabrés à mes héritiers », précise l’agriculteur. En 2021, il a fait parti des agriculteurs identifiés par la chambre d’agriculture et contactés par Rovaler. « La société Legendre a réalisé une étude de faisabilité pour la rénovation et l’équipement de ces bâtiments en photovoltaïque », explique-t-il. Verdict positif pour les deux, à condition que Paul Despesse prenne en charge une partie des travaux liés à la consolidation de la charpente bois du bâtiment le plus ancien. L’agriculteur a signé la promesse de bail avec ses partenaires et une clause signifiant que les travaux ne démarreront que fin 2023 quand il cessera son activité. Il disposera alors de deux bâtiments désamiantés et remis en état. Le plus ancien pourrait être utilisé pour du stockage de matériel par celui qui reprendra ses terres. Pour l’autre, il espère trouver des candidats à la location, y compris pour des activités non agricoles. « Cela me ferait un petit complément de retraite », conclut-il.
S.Sabot
Une aide de la Région pour le désamiantage
La Région Auvergne-Rhône-Alpes propose actuellement une aide au désamiantage des toitures en cas de solarisation. Condition pour en bénéficier : le ratio « surface couverte en photovoltaïque / surface désamiantée » devra être a minima de 35 %. La chambre d’agriculture de la Drôme peut vous accompagner pour le dépôt de dossier.
Photovoltaïque : aider l’agriculteur dans sa prise de décision

Questions à / Thierry Mommée, membre du bureau de la chambre d’agriculture de la Drôme.
Quelle est la position de la chambre d’agriculture sur le photovoltaïque ?
Thierry Mommée : « Sans revenir sur les ambitions de la France en matière de neutralité carbone d’ici à 2050, on sait que le développement de la production d’énergie décarbonée par l’agriculture est une des orientations affichées. C’est pourquoi, à la chambre d’agriculture de la Drôme, nous avons fait de cette question des énergies renouvelables l’un des axes de notre mandature. Nous soutenons tous les projets, à condition qu’ils permettent de créer une valeur ajoutée pour l’agriculture. Le photovoltaïque nous semble aujourd’hui l’opportunité la plus accessible. Mais cela peut également être la méthanisation, à condition que la vocation alimentaire des exploitations reste la priorité. »
Quelles sont plus précisément les orientations sur le photovoltaïque ?
T.M. : « Celles-ci ont clairement été définies à l’issue des Assises du foncier. Dans un premier temps, il s’agit d’équiper en priorité les toitures de bâtiments agricoles existants et, si un projet de nouveau bâtiment s’avère nécessaire pour l’activité agricole, de réfléchir à l’installation de panneaux dessus. Le photovoltaïque n’est pas nouveau en agriculture mais nous sommes au début d’une période de grande accélération sur ce sujet. C’est pourquoi la chambre d’agriculture se donne les moyens d’acquérir un maximum de références dans ce domaine. Il n’y a pas de gros ou de petits projets. Il n’y a pas non plus un modèle unique dans le portage de ces projets. Notre première action d’envergure a été de nous impliquer aux côtés de Rovaler (lire ci-contre) sur le territoire de Valence Romans Agglo. Mais nous sommes également en réflexion avec une société sur le secteur de Montélimar et nous accompagnons un collectif d’agriculteurs sur le territoire de Dieulefit. »
Que peut apporter la chambre d’agriculture aux agriculteurs dans ce domaine ?
T.M. : « L’objectif est que l’agriculteur ait tous les éléments en main pour juger lui-même de l’opportunité de son projet et non que ce soit les investisseurs qui le fassent pour lui. Notre mission est donc de l’aider à identifier le besoin agricole pour bien calibrer son installation. Notre priorité est que la production d’énergie soit au service de l’activité agricole et non le contraire.
Produire de l’énergie sur une exploitation est une question qui doit être posée. Mais la réponse et le modèle ne seront pas les mêmes pour tous. Nous ne voulons laisser personne sur le bord de la route sur ce sujet. Au-delà du photovoltaïque sur bâtiment, nous travaillons également à l’acquisition de références sur l’agrivoltaïsme, les serres photovoltaïques… La chambre d’agriculture de la Drôme adhère d’ailleurs à l’association France Agrivoltaïsme pour continuer à avancer et sécuriser le tandem agriculture / énergie. »