Accès au contenu
Mode de conduite

Mûrir et préparer  sa conversion en bio

La conversion en agriculture biologique est souvent le résultat d’une longue réflexion. Elle ne s’improvise pas. L’accompagnement et le conseil sont nécessaires pour appréhender cette nouvelle pratique.

Mûrir et préparer  sa conversion en bio
Le Gaec Grains de Farines transforme une partie du blé bio produit sur l’exploitation en farine et en pain vendus dans le magasin sur l’exploitation.

La conversion d’une agriculture conventionnelle en bio est un processus auquel il faut se préparer bien à l’avance. C’est du moins la démarche de Didier Boichon, céréalier biologique à Chozeau dans le Nord-Isère, associé du Gaec Grains de Farines qui cultive 120 ha (blé, orge, tournesol, maïs, soja, méteil, pois chiche…). « Depuis 2022, toute l’exploitation est en bio. En 2020, j’ai entamé ma conversion après avoir réfléchi pendant un an et demi. J’ai suivi une formation avec la chambre d’agriculture de l’Isère dont le thème principal “ Transformer son exploitation céréalière en bio, pourquoi pas ? ” m’avait beaucoup interpellé. Je voulais savoir si c’était opportun de s’engager dans cette filière. J’attendais des réponses précises et je ne voulais pas mettre l’exploitation en danger sur le plan économique. Le plus étonnant dans cette démarche de conversion en bio, c’est que j’ai réussi à lever toutes les craintes économiques grâce à mon intérêt personnel pour l’aspect technique. C’était un joli défi technique », raconte le céréalier.
Didier Boichon a complété ses connaissances et sa pratique en suivant une seconde formation sur le désherbage mécanique avec l’Adabio. Avec beaucoup de rigueur, il a suivi toutes les étapes de la conversion en bio et ce d’autant qu’il ne pratique pas l’irrigation pour cultiver ses 120 ha de cultures céréalières en bio. Une démarche peu courante dans la filière. « J’avais une double contrainte technique : la conversion en bio et la non-irrigation. Cet été, certaines de mes cultures ont beaucoup souffert de la sécheresse et j’ai eu des pertes. Mais il y a des avantages à ne pas arroser. On peut se permettre d’avoir une rotation des cultures plus importante. En bio, on accepte par exemple des rendements inférieurs par rapport à la culture conventionnelle. Le passage en bio m’a permis de revaloriser l’intérêt technique de mon métier et de mettre l’agronomie au cœur de mon exploitation. Travailler le sol en utilisant uniquement des engrais organiques, c’est un vrai défi technique et un apprentissage continuel », explique-t-il.
Le Gaec Grains de Farines a profité de cette conversion au bio pour créer un atelier de transformation. Une partie du blé bio est transformée en farine et en pain qui est pétri, cuit et vendu dans le magasin de l’exploitation par la compagne du céréalier, Karine Fournier, installée depuis janvier 2022.

Le conseil et l’accompagnement

Dans la conversion au bio, il ne faut pas brûler les étapes. D’abord, il faut contacter un organisme certificateur pour demander un devis (de l’ordre de 600 € HT/an). Il existe sur le marché onze organismes certificateurs agréés par l’État. Dans un second temps, il y a l’étape d’enregistrement auprès de l’Agence bio, agence de promotion et de structuration de l’agriculture biologique. Tant que l’agriculteur est en bio, il paye l’organisme certificateur chaque année. Le montant peut varier de 400 à 800 € HT/ an.
Renaud Pradon, coordinateur de l’agriculture biologique à la chambre régionale d’agriculture et conseiller bio à la chambre d’agriculture de l’Ardèche, recommande aux futurs agriculteurs intéressés par la conversion en bio de réfléchir sur le pourquoi d’une telle démarche. « Il faut trois choses avant de s’engager : une réflexion, une volonté personnelle et une approche réaliste et commerciale. Nous accompagnons les agriculteurs à toutes les étapes les plus complexes de leur conversion. Notre valeur ajoutée, c’est l’aide à la réflexion et la possibilité de lever tous les freins dans le passage au bio pour adapter ses itinéraires techniques. Nous proposons le conseil et l’accompagnement. Dans certains cas, on peut arriver à la conclusion que le bio n’est pas la solution pour l’exploitant », précise-t-il.
Souvent, les agriculteurs qui s’engagent en bio sans accompagnement peuvent passer à côté d’une aide. Un conseiller a donc toute son importance surtout dans la conjoncture actuelle, plus difficile pour certaines filières qui doivent affronter un tassement de la consommation. « Nous aidons les agriculteurs à optimiser leurs pratiques techniques et commerciales et nous les accompagnons en fonction de la croissance du marché du bio selon les demandes sociétales », conclut Renaud Pradon.

Pierre-Louis Berger
Pour en savoir plus : grainsdefarines.fr