SANTÉ
Exosquelette : gagner en confort au moment de la traite

Après plus de vingt ans de traites quasi quotidiennes des vaches laitières, l’épaule droite de Dominique Larue est devenue douloureuse. Une alerte qui l’a incitée à investir dans un exosquelette, dont elle ne pourrait plus se passer.

Exosquelette : gagner en confort au moment de la traite
Dominique Larue : L’exosquelette « s’enfile comme un sac à dos. L’intensité de l’aide est réglable. Je sens qu’il m’assiste quand mes bras arrivent au niveau du cœur ». ©PDL

Dominique Larue est membre du Gaec des Maréchaux avec son fils et son beau-frère, à Mornand-en-Forez (Loire). Ils ont en moyenne 60 vaches de race prim’holstein en lactation. Sur les 170 ha, ils récoltent le fourrage nécessaire à l’alimentation du troupeau ainsi que des cultures de vente. L’agricultrice travaille sur l’exploitation depuis 2001. Elle se charge plus spécifiquement de la traite, des vêlages, des soins aux animaux et du suivi administratif. Cela fait donc 22 ans que Dominique Larue répète les mêmes gestes, deux fois par jour, au moment de traire les vaches. En 2014, deux postes ont été ajoutés à la salle de traite existante, passant de 2 x 5 postes à 2 x 6, sans pour autant changer toute l’installation (décrochage, traite par l’arrière à 60 degrés). Il y a deux ans, les griffes ont été remplacées par du matériel plus léger. Elles sont également équipées du système EasyStart, déclenchant automatiquement le vide d’air lorsque la griffe est soulevée (plus besoin d’appuyer sur un bouton lors du branchement), et d’un système stoppant le vide d’air si elle se décroche du trayon et tombe au sol (évitant ainsi d’aspirer des saletés). Ces évolutions de l’installation de traite font suite à une période de douleurs dans le haut du corps de l’éleveuse. « En 2019, je souffrais vraiment dans l’épaule droite. J’ai passé une radio et une échographie. » Verdict : « une inflammation de la coiffe. Les tendons n’étaient pas atteints, mais il fallait agir rapidement. On m’a prescrit des séances de kiné. J’y ai appris les bons gestes pour éviter de solliciter les épaules, mais également les techniques pour être moins contractée. »

L’essayer, c’est l’adopter

À cette période, Dominique Larue a lu un article de presse dédié aux exosquelettes, relatant des essais dans une ferme expérimentale. « Le témoignage d’une agricultrice m’a interpellée. » Elle est alors entrée en contact avec cette dernière pour en savoir plus sur cet outil d’assistance physique à la réalisation d’une tâche, en l’occurrence la traite. « La personne a été très ouverte et gentille. Ma crainte était d’entraîner des conséquences ailleurs sur le corps. Elle m’a bien rassurée sur ce point. » Quelque temps après, son fils est tombé par hasard sur la publicité d’un vendeur d’exosquelettes. Il a eu les mots pour convaincre sa mère, qui a pris rendez-vous et a essayé l’outil pendant trois jours. « C’est important de le tester en conditions réelles, pendant la traite », insiste Dominique Larue.
Malgré un investissement non négligeable (5 200 euros), l’agricultrice a franchi le pas et s’est équipée de cet appareil. « Les douleurs à l’épaule se sont estompées. Elles ne me gênent plus au quotidien. Je ne sais pas comment j’aurais pu continuer à traire sans cette aide. » Le calcul a été simple : « Si je devais avoir des arrêts de travail, le coût d’un remplaçant serait également élevé », explique l’éleveuse, qui ajoute : « Avoir la climatisation dans le tracteur a un coût mais elle permet de travailler dans de bonnes conditions. C’est la même chose pour l’exosquelette. » Dominique Larue insiste auprès de ses associés pour qu’ils prêtent eux aussi attention à leurs postures et aux gestes quotidiens.

Taille et réglages adaptés

L’exosquelette pèse 2,5 kg. Il est constitué d’aluminium et de renforts en plastique. « Tout est mécanique. Il n’y a pas d’électronique ou d’électricité. » Les protections en mousse et les sangles peuvent être nettoyées à la machine à laver le linge. « Je passe une brosse à dents humide sur les montants », précise Dominique Larue. Elle conseille d’acheter un exosquelette parfaitement adapté à la taille de l’utilisateur et de bien le régler « pour éviter d’avoir une gêne ». L’outil « s’enfile comme un sac à dos. L’intensité de l’aide est réglable. Je sens qu’il m’assiste quand mes bras arrivent au niveau du cœur. Au début, c’est comme un corps étranger, ce n’est pas naturel. J’ai dû insister un peu avant de vraiment l’adopter », décrit-elle Elle relève néanmoins un inconvénient : « L’exosquelette tient chaud comme un gilet. Face au service rendu, je l’accepte volontiers ». Impossible désormais de s’en passer pour traire. Pour laver les vitres de la maison aussi…  

Lucie Grolleau Frécon

Conseils de la MSA

Une salle de traite confortable pour le trayeur

L’installation de traite, qui constitue un investissement important, détermine les conditions de travail pour de nombreuses années. Il est important de bien l’aménager pour gagner en temps, confort et sécurité.

En salle de traite, les risques sont multiples : glissade, chute dans les escaliers, contact avec des produits chimiques et les animaux ou encore troubles musculo-squelettiques (TMS) du trayeur. Les TMS sont des lésions touchant les tendons, les cartilages, les muscles, les nerfs et les vaisseaux sanguins, survenant par une forte sollicitation des structures corporelles qui servent aux mouvements. La Mutualité sociale agricole (MSA) précise qu’ils peuvent donner une symptomatologie très douloureuse et devenir invalidants : syndrome du canal carpien, syndrome de la coiffe des rotateurs, épicondylite (douleur au coude).
En élevage laitier, les TMS sont liés à la répétitivité des mouvements, l’effort physique, l’ambiance de travail, les postures, l’amplitude des mouvements, les vibrations, l’organisation du travail, mais aussi la sensibilité individuelle (âge, sexe, hérédité). Le froid, l’humidité ou encore le stress favorisent aussi le développement des TMS.

Faciliter l’accès à la mamelle

Alors que les installations de traite doivent répondre aux critères techniques et économiques, elles doivent surtout être adaptées au(x) trayeur(s). Pour la MSA, il faut veiller à l’accès à la mamelle, à l’encombrement de la fosse et à l’ambiance de travail (lumière, bruit).
Les grands principes de l’ergonomie doivent s’appliquer à la traite, insiste la MSA : ne pas travailler en ayant les mains situées plus haut que les épaules pendant un long moment ; conserver une position du corps la plus droite possible ; ne pas travailler avec les mains situées au-dessus du niveau des coudes afin que les bras restent dans un angle de confort maximal ; atteindre la mamelle sans être gêné par un obstacle.
Pour la MSA, l’accessibilité à la mamelle est « un élément déterminant dans les postures de travail. Le principe est de rapprocher le plus possible la mamelle du trayeur. Tout doit être mis en œuvre pour dégager un espace optimal d’au moins 70 cm autour de la mamelle. L’accessibilité dépend de la hauteur des quais, du positionnement dans les stalles et de l’emplacement du matériel de traite » (faisceaux trayeurs, plateaux de lavage, boîtier de commande du décrochage, compteur à lait). Plus concrètement, les trayons des vaches doivent se situer naturellement à une hauteur comprise entre les coudes et les épaules de l’opérateur.
En ce qui concerne la hauteur du quai, le trayeur doit pouvoir travailler le buste droit, sans pour autant être obligé de lever les bras au-dessus du niveau des épaules. La MSA indique également que la largeur de la fosse ne doit pas être inférieure à deux mètres pour que l’opérateur ne soit pas gêné par le matériel et que l’endroit puisse accueillir plusieurs trayeurs.
La lumière constitue un point à ne pas négliger, notamment l’emplacement des sources lumineuses ainsi que leur intensité. Selon la MSA, « un éclairage approprié favorise un environnement de travail plus sûr, plus efficace et plus agréable ». Elle conseille « d’éviter de créer des zones d’ombre qui obligent le trayeur à adopter des postures contraignantes pour observer les mamelles ».
La MSA, avec son service santé-sécurité au travail, est en mesure de dispenser de nombreux conseils. Son site internet dédié à ces sujets met à disposition de nombreuses fiches pour bien concevoir sa salle de traite et avoir les bons gestes.

Lucie Grolleau Frécon, d’après MSA

Ce qu’il faut retenir
Les postures et les exigences à privilégier en salle de traite :
- travailler le plus possible les bras en dessous ou à hauteur du cœur ;
- debout, dos droit avec un appui antérieur (au niveau du bassin) ;
- limiter le poids des charges à manipuler par les membres supérieurs (poids de faisceaux, seaux) ;
- éviter les déplacements multiples ;
- éviter les dénivelés ;
- privilégier l’ambiance de travail (éclairage, bruit, température). 

Conseils pratiques, schémas et chiffres sont à retrouver ici